Coronavirus : peut-on parler de déconfinement pour Haïti ?

En début de semaine, le Premier ministre haïtien, Joseph Jouthe, a annoncé la reprise prochaine des activités en Haïti. Mais en réalité, les activités n’ont jamais été arrêtées en Haïti, et le Gouvernement n’avait pas la capacité de faire respecter sa décision dans le cadre d’un confinement total ou partiel du pays. Outre l’école, le trafic aérien et les activités religieuses, le pays fonctionnait comme s’il n’y avait rien à craindre.

Arguant qu’Haïti ne peut pas maitriser parfaitement la pandémie, le Premier ministre pense que le pays devra apprendre à vivre avec la Covid-19. Pour le pouvoir en place, il n’est plus question d’attendre une disparition du virus. De ce fait, le Gouvernement va autoriser la réouverture des écoles, églises, et un fonctionnement régulier de l’autorité aéroportuaire nationale (AAN) et l’Office national de l’aviation civile (OFNAC) qui n’ont jamais cessé leur activité réellement. Joseph Jouthe a promis de communiquer la date de la reprise lors d’une adresse à la nation programmée pour le jeudi 11 juin.

« Nous sommes obligés de prendre une décision, nous ne pouvons pas maitriser parfaitement la pandémie du coronavirus », déclare le Premier ministre, faisant l’aveu de l’incapacité de son équipe à assurer la gestion de cette maladie qui tue un peu partout dans le monde entier. Dans beaucoup de pays, la pandémie était difficile à maitriser, mais beaucoup d’efforts gouvernementaux ont permis d’éviter une catastrophe. Par exemple, dans 11 pays européens, le confinement, une décision gouvernementale très sévère, aurait permis d’éviter 3 millions de morts, selon une étude réalisée par l'Imperial Collège de Londres.

Étant donné l’impact économique et social du confinement, les gouvernements au niveau de ces 11 pays (l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, la France, l'Italie, la Norvège, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse) ont tout mis en œuvre pour aider la population à le respecter dans l’idée d’endiguer la maladie. Haïti était à seulement 2 cas officiels au moment où le pouvoir avait décidé d’adopter cette mesure le 19 mars dernier. Mais contrairement aux pays dont les autorités s’inquiètent pour la vie et la santé de la population, aucun effort n’a jamais été fait pour le respect de cette mesure. Les officiels ont contribué à son échec.

L’accompagnement promis par le Gouvernement via Moncash est un fiasco. Les dirigeants du Fonds d’assistance économique et sociale (FAES) avaient en leur possession 487 000 375 gourdes pour accompagner la population à travers un programme de distribution de kits alimentaires en ces temps de Covid-19, mais personne n’a vu les résultats, aucun effort n’a été fait par l’Électricité d’Haïti (EDH) pour améliorer ce rationnement drastique du courant électrique observé dans le pays depuis l’arrivée de Jovenel Moise au pouvoir. Pourtant, l’électricité est révélée comme étant un aspect important dans le respect des règles du confinement.

En gros, le pouvoir en place n’avait aucun souci pour œuvrer en faveur le respect des mesures de confinement. Et si aujourd’hui le pays est passé de 2 cas positifs à près de 4 000 pour environ 55 décès, en deux mois, c’est en majeure partie la faute des autorités qui n’ont pas agi en fonction de leur propre décision. Pourquoi la réouverture des usines textiles a été autorisée alors que le pays était sous l’état d’urgence sanitaire ? Le Gouvernement même n’avait pas respecté sa décision de confiner la population. Et aujourd’hui, beaucoup de cas de contamination et plusieurs décès sont enregistrés dans les usines, notamment à Codevi qui est un terrain fertile à la propagation du virus. À ce jour, parler du déconfinement de la population serait une aberration. Haïti n’a jamais affiché l’image d’un pays confiné même partiellement.

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