Le vaccin d’AstraZeneca « sûr » et « effectif », selon l’Agence européenne des médicaments

Ces derniers jours, on a beaucoup parlé des effets secondaires du vaccin du laboratoire anglo-suédois AstraZeneca. Jusqu’ici, il est difficile d'établir un lien clair, mais les experts qui ont travaillé, hier, sur sa sûreté, rassurent sur ses bienfaits.


En Allemagne, treize personnes ont jusqu’à date (18 mars 2021) contracté une thrombose veineuse cérébrale (1) après avoir reçu le vaccin d’AstraZeneca quatre ou six jours auparavant. Trois au moins sont mortes. Elles avaient entre 20 à 50 ans et la plupart d’entre elles étaient des femmes. De par le monde, on a enregistré jusqu’à date un trentaine de cas sur plus de 5 millions de vaccinés.

Y a-t-il un lien de cause à effet ? L'Agence européenne des médicaments (EMA) qui s’est réunie, hier jeudi, a procédé à une première évaluation pour déterminer si le vaccin contre la Covid-19 d'AstraZeneca pouvait éventuellement provoquer des thromboses potentiellement mortelles. Elle est formelle : le vaccin suédois et britannique est « sûr » et « effectif » contre la Covid-19. Les scientifiques ont affirmé qu’ils ne peuvent pas exclure avec certitude un lien entre le vaccin d'AstraZeneca et de rares caillots dangereux dans le cerveau, mais néanmoins les avantages l'emportent, selon eux, sur les risques.


Le rôle de cette Agence, c’est de prévoir à ce genre de défaillance : dès que surviennent des complications avec un vaccin ou un médicament approuvé - ce que les experts appellent un « signal de sécurité » -, le comité de pharmacovigilance (PRAC) se réunit pour examiner les indications et formuler une recommandation.


Comment cela se passe habituellement ? Il y a un instrument décisif qu’on appelle l’analyse « Observed-versus-Expected Analyse ». Le raisonnement la sous-tendant est le suivant : des millions de personnes dans le monde ont maintenant été vaccinées contre la Covid-19 avec le médicament d'Astra Zeneca et il fallait s’attendre à ce que des maladies surviennent de manière aléatoire chez un si grand nombre de personnes. Cependant, ce qui est décisif, c’est de découvrir si une maladie particulière se manifeste de manière évidente chez les personnes vaccinées.


Déjà la semaine dernière, les cas de thromboses après l’administration du vaccin AZD1222 sont signalés. Cependant l'existence d'un lien avec la vaccination n'a pas encore été déterminée. Mais par mesure de précaution, certains pays ont suspendu les vaccinations avec le médicament d'AstraZeneca. Comme l’Allemagne par exemple.


Dans un premier temps, l'EMA avait donné son feu vert. « Le nombre global d'événements thrombo-emboliques chez les personnes vaccinées ne semble pas être plus élevé que dans la population générale », avait annoncé l'agence en début de semaine. En fait, les thromboses chez les personnes vaccinées sont nettement moins fréquentes que celles auxquelles on pourrait s'attendre dans le reste de la population, a déclaré de son côté Peter Arlett, expert de l'EMA, mardi après-midi lors d'une conférence de presse. Arlett dirige le département de pharmacovigilance et d'épidémiologie de l'EMA. « Entre-temps, la situation en Allemagne a changé. L'Institut Paul Ehrlich (PEI), qui est responsable des vaccins en Allemagne, avait remarqué que les cas de thrombose en Allemagne étaient étonnamment similaires à ceux répertoriés ailleurs. En conséquence, l'Allemagne a également arrêté les vaccinations avec la substance d'Astra Zeneca ».

Cependant, l'analyse de la situation observée par les experts de l’Institut Paul Ehrlich a montré que, par rapport aux 1,6 million de doses d'AstraZeneca administrées en Allemagne, il fallait s'attendre à un seul cas, mais qu'il y en a eu sept. C’est ce qui aurait déclenché cette panique et ensuite cette enquête.

Lorsqu'une maladie est si rare, même un seul cas rapporté peut affecter de manière significative le calcul, indiquent les scientifiques. « En outre, avec des maladies aussi rares, il n'est pas du tout facile de déterminer leur fréquence réelle. Même la définition de la maladie peut varier considérablement. C'est l'une des raisons pour lesquelles chaque cas individuel doit maintenant être réexaminé », précise Julia Köppe, biologiste et journaliste scientifique à l’hebdomadaire allemand, « Der Spiegel ».

Les avantages du vaccin l’emporteront

Dans le cas de la thrombose des veines sinusales, par exemple, l'Institut Paul Ehrlich suppose deux à cinq cas par million d'habitants et par an peuvent la contracter ; d'autres enquêtes estiment que la fréquence est plusieurs fois supérieure. Une étude estime à 13 cas par million de personnes par an. Une autre, à 16 cas.

Mais, même s'il est maintenant démontré que les thromboses cérébrales s'accumulent chez les vaccinés, cela ne prouve pas automatiquement que la vaccination en est la cause, indique Köppe. Il existe de nombreux exemples de causalité fallacieuse dans l'histoire de la science, poursuit l’experte.

Il pourrait y avoir une explication pour les incidents maintenant rapportés. « Par exemple, les femmes sont trois fois plus susceptibles d'être touchées par une thrombose des veines sinusales que les hommes, signale-t-elle. Elles sont aussi plus susceptibles de travailler dans le secteur des soins infirmiers - et ce sont précisément ces groupes professionnels qui ont reçu le vaccin d'AstraZeneca en Allemagne, car initialement seules les personnes de moins de 65 ans devaient être vaccinées. En Grande-Bretagne, cependant, le vaccin a également été utilisé chez les personnes âgées dès le début. Jusqu'à présent, seuls trois cas de thrombose des veines sinusales y ont été enregistrés - sur un total de onze millions de doses de vaccins ».

Les experts ont tenu compte de toutes ces considérations dans leur recommandation. En fin de compte, il est donc probable « qu'il ne s'agisse pas d'un simple calcul mathématique, mais d'une évaluation des risques », commente Köppe avant d’ajouter que « ne pas se faire vacciner coûte aussi des vies ». Malgré l’interdiction d’AstraZeneca, la grande majorité des Allemands est prête à se faire vacciner.


Actuellement, on considère comme « improbable » l’arrêt définitif des vaccinations avec le médicament d'AstraZeneca. Selon une récente déclaration de l’EMA, « les avantages du vaccin d'AstraZeneca dans la prévention de la Covid-19 avec le risque d'hospitalisation et de décès qui lui est associé, l'emportent sur les risques d'effets secondaires ». Cette position a été reconfirmée, hier, par les experts de l'Agence après leur première évaluation de la préparation vaccinale.

De toute façon, même si la suspicion d'un risque accru de thrombose devait ensuite se confirmer, plusieurs mesures sont envisageables, comme l’indique Köppe : 1) Le risque d'une éventuelle thrombose pourrait être signalé sur la notice, comme on le fait habituellement ; 2) Les médecins pourraient également être tenus d'informer les patients du risque et des symptômes de thrombose. Ainsi, en cas de soupçon, des mesures peuvent être prises rapidement ; 3) Jusqu'à ce que des informations supplémentaires soient disponibles, l'utilisation chez des groupes de personnes particulièrement vulnérables pourrait également ne pas être recommandée.

Jusqu’ici, les réactions les plus fréquemment rapportées avec les deux vaccins (BionTech/Pfizer et AstraZeneca) étaient celles également connues des études, comme les maux de tête et les douleurs dans les membres (qui étaient « parfois très sévères » avec AstraZeneca, selon Pamel Dörf du quotidien de Francfort « Frankfurter Rundschau » du 18 mars 2021) les frissons, la fièvre, la diarrhée, les nausées, les vertiges et la fatigue. Il n'est pas rare que des palpitations et des arythmies cardiaques surviennent également.

Huguette Hérard

N.D.L.R.
(1) On parle de thrombose lorsqu'un caillot de sang se forme dans un vaisseau, affectant souvent les veines de la jambe. Ce caillot peut obstruer le flux sanguin et, dans le pire des cas, les organes vitaux ne sont plus suffisamment alimentés.

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