Alors que les premiers cas ont été signalés à Wuhan en Chine fin décembre 2019, le coronavirus, qui a bouleversé le monde, a fait son apparition en Haïti le 19 mars 2020. Le gouvernement haïtien, dès lors, a pris un ensemble de mesures, afin de limiter sa propagation. Si plusieurs pays, dont la République dominicaine, ont été frappés de plein fouet par la pandémie, Haïti a été relativement « épargné », et ceci en dépit de l’incrédulité de la population. En cette fin d’année 2020, Haïti compte à peine dix mille cas confirmés et moins de 300 décès. Toutefois, une tendance haussière est constatée ces derniers temps, selon les derniers avis émis par les autorités sanitaires.
 À en croire l’Organisation mondiale de la santé (OMS), tout a commencé le 31 décembre 2019 à Wuhan en Chine où les premiers cas du Coronavirus ont été signalés pour la première fois. L’épidémie va ensuite gagner du terrain pour se transformer en pandémie. De la Chine aux États-Unis, de l’Italie à la France, la pandémie allait mettre à nu la faiblesse des systèmes de santé les mieux sophistiqués du monde. Quant aux pays en sous-développement avec un système de santé précaire, l’on prédisait même le pire.
En Haïti, les deux premiers cas ont été introduits en date du 19 mars 2020, les experts avaient prévu pour le mois d’avril, dans un scénario catastrophique, plus de vingt mille décès et dans le meilleur des cas, deux mille. Pour essayer de contenir la propagation du virus mortel, le gouvernement haïtien avait pris un ensemble de mesures dans le cadre d’une déclaration d’état d’urgence sanitaire. Les aéroports les ports et la frontière avec la République dominicaine ont été fermés depuis le 19 mars.
Par communiqué en date du 26 mars 2020, le gouvernement de la République a mis en place une Cellule scientifique de gestion de la crise du coronavirus (Covid-19). Ses principales attributions étaient de collecter et de traiter les données liées au Coronavirus (Covid-19) et de produire des recommandations au gouvernement sur les mesures sanitaires à prendre.
Cette cellule scientifique se composait de 14 membres, dont 12 médecins. Son coordonnateur, le Dr Patrick Dély de la Direction d’épidémiologie des laboratoires et de recherche. Le Dr Jacques Boncy du Laboratoire national de santé publique (LNSP), membre. Le Dr Martial Bénêche de la Direction départementale sanitaire de l’Ouest (DSO), membre. Le Dr Pierre Sosthènes, représentant de l’Université d’État d’Haïti (UEH), membre. Le Dr Luis Codina de l’OPS/OMS, membre.
Comme autres mesures du gouvernement, on peut citer, le décret présidentiel fixant les règles générales de protection de la population face à la Covid-19 paru dans Le Moniteur du 21 mai 2020 où il est stipulé en son article trois (3) : « Tout conducteur de véhicule ou matériel de transport procède au nettoyage désinfectant du véhicule ou matériel de transport au moins une fois par jour ».
Selon ce décret, c’était le conducteur qui devait s’assurer que les voyageurs respectent les mesures dites « barrières » et comme « l'obligation pour les voyageurs de porter un masque de protection ». Le conducteur avait l’autorisation de refuser l'accès au véhicule à toute personne ne portant pas de masque. En effet dans la pratique, les concernés avaient fait fi de ces dispositions en dépit des sanctions prévues à cet effet. Autres mesures à signaler, par communiqué en date du 30 avril, le Premier ministre Joseph Jouthe avait annoncé que le port de masques faciaux est obligatoire dans tous les espaces publics à partir du 11 mai.
Achat de matériel hospitalier en Chine
À la fin du mois de mars, dans le but de répondre au plan de préparation de réponse du MSPP à la Covid-19, le gouvernement haïtien avait fait l’acquisition de plusieurs matériels hospitaliers sur recommandation du comité scientifique. En effet, la toute première commande placée auprès de la firme chinoise Bowang Co.Ltd/ChinaXu Xia, comprenait 250 mille équipements de protection individuelle comme des lunettes, visières et chaussures, 100 respirateurs et accessoires, 1 500 lits d’hôpitaux, 500 unités de pompes à infusion, 10 analyseurs automatiques de biochimie, 300 mille blouses stérilisées, 2,5 millions de gants médicaux (nitrile), 1,5 million de masques chirurgicaux jetables et 200 mille masques KN 95.
D’après les autorités, ces matériels ont coûté l’État haïtien, un peu plus de 18 millions de dollars et ont été livrés au pays le 15 mai 2020. Pour le Centre d’analyse et de recherche en droits humains (CARDH), le contrat de l’État haïtien avec cette compagnie chinoise a été une violation de la bonne gouvernance.
En dépit de nombreuses faiblesses du système sanitaire haïtien, le système a pu bénéficier de plusieurs matériels pouvant servir à l’après Covid-19 comme les générateurs d’oxygène (pas moins de 21).
La création de la Commission multisectorielle de gestion de la pandémie (CMGP-covid-19)
La CMGP-Covid-19 avait été créée par arrêté du président de la République Jovenel Moïse en date du vendredi 3 avril 2020. Cette commission a été coprésidée par le Dr Jean William Pape et le Dr Lauré Adrien. D’un autre côté le citoyen, Paul Auxila a été nommé contrôleur général des informations.
La principale mission de cette commission, selon l’article 3 de cet arrêté, c’était « d’assurer la planification stratégique et la coordination des ressources provenant des organisations non gouvernementales, du secteur privé des affaires en offrant toute la transparence et la responsabilité nécessaire ». Le président de la République avait installé cette commission le 6 avril 2020.
Faut-il signaler que la veille, soit le 5 avril, le pays avait enregistré son tout premier décès dû à la pandémie. La victime a été, selon la ministre de la Santé publique et de la Population, Marie Greta Roy Clément, un homme de 55 ans qui souffrait d’hypertension artérielle et de diabète.
Les personnalités publiques testées positives et l’épidémie de la « petite fièvre » (ti fyèv la)
Un peu partout sur les réseaux sociaux et à travers certaines familles, une seule question animait les débats pendant le 16, 17, 18 mai 2020 : « w pa santi yon epidemi fyèv, grip e kò kraze » (vous ne ressentez pas une épidémie de fièvre, grippe et courbatures). En effet, ces débats ont eu lieu dans un contexte où la Covid-19 commençait à prendre une ampleur sérieuse à travers le pays. Toutefois, faut-il souligner, malgré cette « petite fièvre », les citoyens, dans leur grande majorité, refusaient de se faire tester.
Parallèlement, le virus avait touché les portes des institutions publiques et des personnalités publiques ont été testées positives. Intervenant le mardi 19 mai 2020 sous les ondes, le directeur général du ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP), Lauré Adrien, a apporté des précisions sur la « Petite fièvre » (Ti fyèv la). Selon le Dr Adrien, à cette date, disait-il, il n’y avait aucune autre maladie virale ou infectieuse dans le pays. Les symptômes de fièvre, de grippe ou encore de courbatures ressentis s’apparentent à la Covid-19, avait-il indiqué.
De ces personnalités publiques qui ont été testées positives, l’on pouvait citer le directeur général de la Direction nationale de l’eau potable et l’assainissement (DINEPA), Guito Édouard, Le DGPNH, Rameau Normil, l'IGPNH Hervé Julien ainsi que l’ancien sénateur de la Grand-Anse, Sorel Jacinthe. « Samedi matin, j’avais ressenti une grosse malaise, je suis allé au centre Gheskio accompagné de mon médecin pour faire le test. Dans l’après-midi on m’a appelé pour me dire que je suis testé positif », avait expliqué publiquement l’ancien parlementaire dans une vidéo avec son cache-nez au visage.
Le virus avait également fait une victime dans les rangs du gouvernement. Le secrétaire d’État aux Affaires sociales, Emmanuel Cantave est décédé le 9 juin 2020 après avoir été atteint du Coronavirus, selon le secrétaire d’État à la Communication, Eddy Jackson Alexis qui confirmait la nouvelle.
Si plusieurs pays dans le monde avaient adopté le confinement pour contenir la propagation du virus. En Haïti, il n’y avait pas eu vraiment de confinement, car la population en majorité vit au jour le jour avec de très faibles moyens économiques. Toutefois, une quantité très minime de la population a pu expérimenter le confinement comme dans plusieurs pays développés.
Le pic de la pandémie
Selon les dires du responsable de la Direction d’épidémiologie des laboratoires et de recherche, le Dr Patrick Dély, également coordonnateur de la commission scientifique les autorités sanitaires avaient « prévu d'atteindre le pic au cours de la 27e semaine épidémiologique », soit la dernière semaine du mois de juin. « Or, sur la base de nos observations, à partir de la 22e semaine, fin mai, nous avons vu une tendance à la baisse du nombre de cas que l'on recense », avait indiqué Dr Dély.
Toutefois pour de nombreux citoyens, il y reste une zone d’ombre qui plane sur le pic de la pandémie, car nombreux ont été les citoyens dans les villes de province qui n’ont pu se faire tester et ont dû recourir aux remèdes traditionnels (thé gingembre…).
Réouverture des frontières avec la République dominicaine et les autres activités du pays
En date du 30 juin 2020, le président de la République, Jovenel Moïse, a pris la décision de rouvrir la frontière terrestre du pays fermée depuis le 19 mars. De son côté la République dominicaine, a gardé la sienne fermée. Ce que le président dominicain fraîchement élu à l’époque avait reconfirmé le mardi 21 juillet. Pour M. Abinader, la frontière avec Haïti devait rester fermée jusqu’au moment où la République dominicaine (Bilan 22 juillet 2020 : 56 043 cas confirmés et 1005 décès) allait voir comment sortir de cette crise sanitaire. Faut-il souligner que généralement ce sont les autorités dominicaines qui expulsent les Haïtiens de leur pays, mais cette fois, et durant cette période, de nombreux Haïtiens ont fui la République dominicaine à cause du nouveau Coronavirus.
En date du 21 juillet 2020, en Haïti, l’avis no 108 du ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP) précisait qu’il y avait 7 146 cas confirmés à la Covid-19, 154 morts et 4 095 personnes traitées dans le pays. Toutefois, face aux dernières mesures du gouvernement haïtien visant à rouvrir les activités en général (Écoles, frontières, boites de nuit…), la population haïtienne a complètement baissé la garde face au virus en ignorant davantage les « mesures barrières ».
Haïti épargné de la pandémie (les explications du Dr Jean William Pape)
Pour le co-président de la Commission multisectorielle de gestion de la pandémie Covid-19, Jean William Pape, le facteur déterminant qui a protégé Haïti de la Covid-19 est la jeunesse de la population. Seulement 5 % de personnes dans le pays ont plus de 65 ans, a fait savoir le médecin, en conférence le lundi 17 août 2020 avec d’autres membres de la commission sur l’évolution de la maladie. À en croire le Dr Pape, Haïti a été épargné de la Covid-19, car, dit-il, moins de 1 % de la population haïtienne a été hospitalisé. Le Dr avait aussi fait savoir que toute la Caraïbe a été épargnée ainsi que l’Afrique équatoriale (protégée).
Si Haïti a été épargné du point de vue sanitaire, les conséquences économiques ont toutefois été désastreuses. « Des 58 mille personnes employées dans le secteur textile par exemple, seuls 36 mille aujourd’hui y sont encore et les femmes ont été les plus touchées par les licenciements », avait fait remarquer le coordonnateur résident du système des Nations unies en Haïti, Bruno Lemarquis, lors de la clôture de la première édition de la semaine des objectifs de développement durable (ODD) en Haïti le 3 décembre 2020.
Un vaccin a été trouvé, mais non disponible encore en Haïti où les cas commencent à resurgir
L’une des rares bonnes nouvelles de cette fin d’année 2020, c’est la disponibilité d’un vaccin intitulée : « Pfizer-BioNTech ». Le lundi 21 décembre 2020, le président élu des États-Unis (Pays le plus endeuillé à cause de la Covid-19) en a reçu la première dose par-devant les caméras de télévision en direct donnant ainsi l’exemple aux Américains où une vaste campagne de vaccination contre la Covid-19 a commencé. À préciser que c’est une infirmière new-yorkaise qui, la première, a reçu le vaccin. Si pour le pays de l’oncle Sam, le vaccin est disponible, en Haïti, ce n’est pas encore le cas, avait fait savoir le directeur général du MSPP, le Dr Adrien.
En cette époque de fin d’année où les gens se déplacent partout à travers le monde pour passer du temps avec leur famille, les nouveaux cas confirmés du coronavirus ont tendance à augmenter. En Haïti, en date du 27 décembre 2020, l’avis numéro 267 du MSPP faisait état de 41 nouveaux cas de Covid-19 et un décès dû au coronavirus, ce qui donnait un total de 9 999 cas confirmés. 236 décès et 8598 personnes traitées.
Dans un message vidéo publié le jour de la Noël, soit le 25 décembre 2020, le patron de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus a indiqué : « Dans le monde entier, pendant cette année terrible, nous avons vu les sacrifices faits par tant de gens pour protéger et préserver la vie. Nous ne devons pas gaspiller ces sacrifices ». Tout en soulignant l’espoir qu’il y a avec les vaccins, il a fait savoir que la vaccination du monde entier prendra du temps.
Faut-il signaler, ce qui tend à semer la panique dans le monde ces derniers jours, c’est l’apparition d’une nouvelle variante du Coronavirus au Royaume-Uni.
Wisly Bernard Jean-Baptiste
