Dans son appropriation dans les deux langues officielles d’Haïti, le créole et le français, avec très peu de modification dans la prononciation, le terme « Bluff ou Blòf », a servi aux créateurs et musiciens haïtiens une riche source d'inspiration pour imposer leurs talents au fil du temps. En dehors de Toto Nécessité, les formations musicales comme Orijinal Rap Staff, System Band, Feeling, Khash et plusieurs, se sont inscrites dans cette démarche, pour illustrer le thème : « Blòf ».
Des connaissances pour démasquer les bluffeurs et bluffeuses, d’ici et d’ailleurs. Des compétences qui se partagent à travers les multiples formes de manifestations et de pratiques du « Bluff », dans toutes les classes sociales du pays. Dans cette approche musicale qui participe dans l’éducation populaire au ton du « Blòf », je vous invite á explorer les contours de ce concept.
Du nord au sud, de l’est à l’oeust, le « Blòf » est chanté à tous les temps et dans toutes les classes sociales en Haïti, pour reprendre ces talents connus et célèbres. Toto Necessité nous dit p « On vit de bluff. C’est que nous bluffions tout lajounen, nan tout lari ! ».
Dans les premières paroles qui suivent, Toto Nécessité propose en dehors de « Tout moun sou manti », la célèbre formule encore très présente dans le vocabulaire populaire et l’imaginaire collectif « Aparans plis blòf egal rezistans ».
Dieu, le seul à qui on ne peut pas bluffer, selon les croyances du chanteur « Toto Necessite », qui persite et signe : « Anba levit, do chire, yap mache ak vèst », « Anba levit, kòl nan kou, yap mache ak vèst”, “Tout moun sou blòff ».
Dans un autre registre, le célèbre album «Kè pòpòz », porté par la formation musicale dans le Rap Kreyòl, des années 90, Original Rap Staff s’est imposé avec le titre « Tout moun sou blòf ».
Défilé des talents, plusieurs voix explorent le sujet à tous les tons. La représentation des différents tableaux qui illustrent les multiples formes de manifestations du « Blòf » est au rendez-vous.
Définitivement « Tout moun sou blòf » rappelle l’un des chanteurs vedettes « Top Adlerman », qui propose dans son propre style ses multiples tonalités vocales pour animer et consacrer le "Bluf". .
Du culte du « Blòf » en Haïti, dans tous les secteurs, notamment dans la religion, ORS aborde ainsi cette histoire du prêtre ou pasteur, qui utilise le bluff comme instrument pour manipuler, influencer et profiter de ses fidèles, a été revisité dans cette chanson populaire. ORS cherche par tous ses talents à réveiller la conscience et à éduquer les masses, avant de conclure : « Tout moun sou blòf. Lè yo bay blòf, son fason pou yo kanpe tòf ».
Dans les relations amoureuses, le sujet est largement exploré et exposé dans le repertoire de la musique haïtienne.
« Depim damou, yo dim sou blòf ». Dans cette composition musicale de la formation « Feeling », qui porte le titre « Blòf », les musiciens et chanteurs explorent les lignes de la relation amoureuse, au son du « Blòf », dans une célébration des émotions, des sentiments et sensations.
Don Polo, un autre talent en solo, avec la couverture du projet musical qui porte le slogan « Tout moun sou do », expose également son discours autour du thème : « Toujou sou blòf ». Plus proche de nous, le trio de « Khash », à travers le projet « The Intro », offre également ses propres couleurs autour de l’adaptation de « Blòf ».
Derrière ces titre moins célèbres dans le répertoire de la musique haïtienne, le groupe mythique System Band, n’est pas resté indiffèrent dans cette éducation populaire, cette littérature manifeste qui se construit autour du culte du « Blòf ». La chanson « Ou sou blòf », persiste et signe dans les relations amoureuses parmi les meilleures créations.
D’un élan de chœur resigné, les hommes de ce système musical repliquent: « Blòf o, ou sou blòf avèm ».
Durant les années 90, quel melomane ne se souvient pas de ces complaintes masculines, de ce refrain aussi célèbre ? De la deception á l'invitation á l'empathie, on est en face du mauvais perdant qui cherche par tous les moyens à se comparer avec le nouveau élu. Il cherche ainsi á justifier le prolongement de son règne. « Cheri a nèg wap fèm sa, li pan anyen pasem. Gade w kite pou nèg sa men lape maltrete. ».
Dans la liste des classiques de la formation du System Band, on est en droit d’ajouter « Ou sou blòf » dans ce répertoire aussi riche en couleurs sociales et fortement animé par des saveurs poétiques accessibles á tous les goûts.
D’autres formations musicales haïtiennes et des talents poursuivent cette exploration du « Blòf » de différentes manières. Entre les refrains et les slogans, chacun cherche son plaisir, pendant que d'autres continuent de satisfaire leur désir, entre l'être ou le paraître qui portent les marques du « Blòf », l'une des facettes du marronnage, l'un des meilleurs instruments pour perpetuer le culte de la résistance ou de la séduction.
Dominique Domerçant