Le poème comme voyage

La poésie est un voyage retrouvé à travers les mots et la vie dans ce qu'elle a de plus nue ou noble. Elle demeure une excursion à travers le langage dans la tentative du poète de le disloquer, de lui tordre le cou et de sa reconstruction d'une manière nouvelle propre au soi du poète.

Être poète et faire le métier de poète c'est se faire Prométhée. Être Prométhée ! Être voleur de feu. Les mots sous les doigts de l'écrivain en effet dans leur ingénieux agencement, tout en créant une rythmique nouvelle, doivent exploser. Explorer. Retourner la vision étriquée du monde du commun des gens.

 

Déchirure

Au plus profond de la vie, la poésie se meurt de l'accommodement, du déjà-vu. Le poème est essentiellement révolte. Car la part de déchirure qu'elle met à nu en nous c'est le réveil de cet amour du beau ( je ne perçois pas le beau ici dans son aspect marginal qui l'oppose au laid, démarche dichotomique: beau/laid / du manichéisme : bon/ mauvais). Car ce qu'on peut prétendre d'une laideur avérée peut porter en lui le germe du beau, une part de beau ( cf Les Fleurs du Mal de Charles Baudelaire), on pourrait porter le débat plus loin, jusque dans le choix de ce poème dont l'aîné capital de la poésie française a donné le titre provocateur/ ( si provocation il y en a) « Une Charogne ».

Le poème demeure une unité de parole autonome. Il parle même à ceux qui pensent et croient dans leur for intérieur que toute poésie doit emprunter le chemin de la simplicité et c'est leur droit le plus entier. On ne demande pas au poète de choisir un camp quelconque. De même on ne saurait le demande de s'accrocher à telle quelconque thématique.

Artistique

Le poète en tant qu'artiste de la langue travaille son inspiration au gré de son imagination et de sa sensibilité. Exit toute tentative de réduction à une école ou d'inclusion forcenée dans une quelconque république de copinage littéraire.

Le texte littéraire demeure le double reflet de la psychologie auctoriale et du réalisme ambiant. Cette ambivalence reste l'aléa jacta est des littératures du monde et non l'apanage résolu​ d'une seule. Le poète dans sa démarche de restitution de soi, en partageant son vécu intimiste et en témoignant du vécu des rapports sociaux dichotomiques, le fait en fonction de son imaginaire et d'un intimisme avéré.

Acta

La poésie est acte. Par acte, on entend qu'elle agit. Le poète doit être un acteur à travers sa plume du changement. Eluard dans « Liberté », Prévert dans « Barbara » et autres textes, Char dans « Feuillets d'Hypnos » ont chacun à leur façon transformés leur stylo en arme contre l'occupation de leur pays et pour dénoncer l'absurdité des guerres où enfoncent leurs peuples, les «grands» de ce monde.

 Ainsi le poème tient-il sa raison de ce lieu-là ? Car il y a urgence ! La poésie est urgence. Urgence de dire que la nuit a trop longtemps pris trop de place. La nuit a trop duré sans faire place à l'aube. Au jour.

Excursion

La poésie ne vit pas du silence. Elle est parole qui trace le chemin de la voix du poète vers l'éternité . Qui ouvre les bras pour recueillir l'immensité des expériences de l'homme. Simple, fulgurante, à la limite même d'un prétendu hermétisme, la poésie se donne toujours un objet: dire, voyager, se révolter, aimer. Et cet amour, cette belle amour, le poème la cultive pour l'homme dont il témoigne tous les jours dans son excursion infinie à travers la langue ou le langage.

 

James Stanley Jean-Simon

E-mail: jeansimonjames@gmail.com

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