Issey Miyake, le créateur de mode japonais, est mort

0
753

Le créateur de mode s’est éteint « dans la soirée du 5 août », a indiqué une employée de son bureau.

La mode a perdu un des ses grands noms. Le créateur japonais Issey Miyake, dont la carrière s’est étendue sur plus d’un demi-siècle, est mort à l’âge de 84 ans, a annoncé ce mardi 9 août à l’AFP une employée de son bureau à Tokyo.

« Il est mort dans la soirée du 5 août », a-t-elle dit au téléphone, refusant d’être nommée et sans donner plus de détails sur son décès. Elle a également indiqué que les obsèques d’Issey Miyake avaient déjà eu lieu en présence « uniquement de proches », conformément à ses souhaits. Il n’est pas prévu de cérémonie publique, a précisé cette source.

Né le 22 avril 1938 à Hiroshima (ouest du Japon), Issey Miyake avait sept ans le 6 août 1945 quand les États-Unis avaient largué la première bombe atomique de l’Histoire sur sa ville natale, faisant 140 000 morts et traumatisant à vie les rescapés. Il avait survécu mais sa mère était morte trois ans plus tard des suites des radiations. Il a, lui, enduré de grandes souffrances physiques qui ont handicapé sa marche.

 

Un créateur au style unique

À peine diplômé de l’université des beaux-arts de Tama à Tokyo, il s’était installé à Paris en 1965 et avait étudié à l’école de la Chambre syndicale de la Couture parisienne. Après avoir travaillé comme apprenti chez Guy Laroche et chez Givenchy, il fonde en 1970 son studio de création à Tokyo, et ses premières boutiques ouvriront quelques années plus tard dans la capitale japonaise et à Paris. Sa vision de la mode a été influencée par la révolte étudiante de mai 1968 à Paris. Alors plutôt que de concevoir des vêtements pour quelques privilégiés, il décide d’inventer des habits universels et pratiques, « comme des jeans et des t-shirts », dira-t-il plus tard.

À partir des années 1980, Issey Miyake avait fait rayonner son style à travers le monde en utilisant des matériaux jamais vus dans la mode jusqu’alors (plastique, fil de fer, papier artisanal japonais, crin, raphia...). L’art japonais du pliage (origami) l’inspire aussi. Avec des chercheurs textiles et des ingénieurs modélistes au sein de son laboratoire de recherche-développement, il a également créé une fibre synthétique à partir d’une matière chimique recyclée, en partenariat avec une firme nippone.

Préférant se définir comme « fabricant de vêtements » plutôt que styliste, il a fait partie de la vague de jeunes créateurs japonais ayant apporté un vent de fraîcheur dans la haute couture parisienne à partir des années 1970. Issey Miyake est notamment connu pour avoir confectionné des habits composés d’une seule pièce de tissu (« A-POC, A Piece Of Cloth »), sans couture, optimisant ainsi mouvement, fluidité et confort. Sa ligne « Pleats Please », perfectionnant la technique du plissé pour rendre les vêtements infroissables, a aussi marqué les esprits.

 

« Quand je ferme les yeux, je vois encore des choses que personne ne devrait jamais vivre »

Lancée à partir de 2010, sa ligne de sacs géométriques et en relief « Bao Bao » a encore renforcé son aura. Issey Miyake était aussi le fournisseur attitré des célèbres pulls à col cheminée noirs de Steve Jobs. Un vêtement fidèle au style minimaliste du confondateur et ancien patro d’Apple.

« Issey Miyake, c’est un homme de recherche, un découvreur, un grand inventeur qui a conçu et utilisé des matériaux et des textures uniques au monde », résumait en 2021 auprès de l’AFP l’ancien ministre français de la Culture Jack Lang, soulignant aussi son « élégance morale, intellectuelle » et sa « profonde humanité ».

Pendant longtemps, Issey Miyake avait évité de parler de son expérience de survivant de Hiroshima, de peur d’être catalogué comme tel ou de paraître « pathétique ». Il préférait « penser à des choses qui peuvent être créées et non détruites, et qui apportent de la beauté et de la joie », avant de réaliser tardivement qu’il avait « une responsabilité personnelle et morale » de s’exprimer aussi sur ce thème douloureux.

« Quand je ferme les yeux, je vois encore des choses que personne ne devrait jamais vivre : une lumière rouge aveuglante, le nuage noir peu après, des gens qui courent dans toutes les directions en tentant désespérement de s’échapper - je me souviens de tout ça », avait-il témoigné en 2009 pour plaider en faveur du désarmement nucléaire.

AFP

LAISSEZ UN COMMENTAIRE

0 COMMENTAIRES