Quand Haïti s’en va « kwe le kwe kwe » !

Dans un temps que « les moins de trente ans » auraient du « mal à connaitre », il était une mélodie qui faisait bouger à la fois les cœurs, les mains et les pieds de tous les vrais mordus du compas direct. Avec un refrain composé des mots à la fois peu singulier, pourtant si facile à dire et à retenir, le groupe Zin, nous entrainait presque tous et toutes, les anciens jeunes des années 90, dans une aventure musicale excitante et inoubliable.

Des rimes vont, reviennent dans cette pièce inédite et célèbre, jadis, aux couleurs festives ou même érotiques et nourrissent toutes les formes d’intensions, de sensations, des expressions ou des manifestations possibles et imaginables portées par une invitation à : « Kwe le kwe kwe ».

Dans cette chanson des quatre saisons, un enfant aurait pu hésiter à la fredonner, en se rappelant des parties suivantes : « Fè li dousman, pa fè maledve. Et pourtant, des parents intelligents savaient au moins que: « Solèy leve tout zonbi kache ». Et pourquoi pas toute la famille finirait un jour par s’entrainer : « An nou kwe le, a sa k vle kwe kwe ».

Deux instruments dominant en alternance, réinvente à chaque fois, toute l’ambiance envoutante et excitante dans cette pièce. Entre le sommeil apporté par le violent et le réveil interpellé par le vent, les paroles et toute l’artillerie de la batterie engendrent les plus belles émotions au rythme de nos cœurs.

Dans « Kwe le kwe kwe », on découvre aussi bien cet univers rempli de paraboles et de métaphores certes. Mais la chanson n’a rien de vulgaire et de monotone, comme celles qui habitent nos présents si cruels. 

Dans le temps, « Kwe le kwe kwe » ne s’arrête pas. Elle entraine tout le monde dans la ronde, et n’autorise personne à faire des pas les pas sur place. Sauf pour déclencher du plaisir abondant entre les jambes. 

Danser est pratiquement l’ultime destination de cette chanson.  Il faut bouger. À moins que l’on veuille se livrer dans une forme de méditation profonde et sensuelle, en activant la rotation des reins, comme le font debout des couples immobilisés dans les coins ou au milieu, sur la piste de danse.  

Dans une thérapie musicale tant recherchée et prolongée, après plusieurs semaines passées sans pouvoir faire le plein, pouvoir obtenir au moins d’un gallon d’essence sur le marché régulier, dans une station d’essence, sans violence et ni une présence policière de trop. 

Dansent dans la tête, un cocktail de nerfs, d’indignation et des maux de toutes sortes, qui prennent forme à travers des mots, comme : machine, gazoline, balle, scandale, bal, carnaval, bossale, parmi d’autres, se sont ainsi tournés dans un voyage dans le temps. Au ton de Zin, Alan Cavé a bien raison de nous rappeler : « Ou gon vye machin ki san gazolin…. ».

Des mains en l’air, avec des gallons jaunes. Tous, ont une « Machin ki san gazolin », avec deux ou quatre roues au moins.  Et d’autres entrepreneurs de l’essence, ne voulant pas attendre,  avancent avec des pas géants : « Pral kwe le kwe kwe, pral blayi nan koudya la ».

Dommage que la bande d’Alan Cavé, d’Alex Abellard, Georges Métellus, et tous les autres talents moins connus du groupe Zin, ne sont plus ensemble pour nous offrir de nouveaux présents.      

Dans la progression rythmique empruntée par cette chanson, les répliques parmi les sensuelles apportées « Ile, ile », par le chœur, nous font tomber dans une douce répétition inlassable. Les victimes de nos jours, trouvent sans peur une voix pour interpeller ceux qui s’amusent à « Kwe le kwe kwe »,  avec l’avenir de la population.  « Kouman pou w fè bal ?  Si w ap fè eskandal. Mon chè w ap trip mal. Mete w anba chal, ou pa nan kanaval, sispan fè bosal…! » 

Dans cet album qui aurait peut-être trente ans cette année, plus ou moins, je ne sais pas trop, mais qui a connu un succès populaire extraordinaire dans les médias, on retiendra que le groupe Zin, nous a laissé une riche contribution dans le patrimoine musical et artistique. Tellement de poésie, de mélodie, de vers et de verbes, de créativité et d’originalité conjuguent avec ses talents au ton du plaisir continu.    

Disons enfin avec : « Kwe le kwe kwe », ce drôle de titre, de refrain tiré dans la culture populaire féconde et l’imaginaire paysan profond, on sent certainement les touches d’un père poète, d’un passeur de mots, sitôt que l’on voyage entre les couplets. 

D’un ton plus envoutant, contrairement à « La pèsòn », « Kwe le kwe kwe » est cette pièce qui l’on peut offrir dans tous les menus, intimes ou festifs. Cette chanson est accessible, pratiquement sans violence, à tous nos sens. Quelle chance, pour notre génération d’avoir su bien profiter de tant de créations inédites, de compositions inoubliables et des animations musicales que seul  le groupe Zin garde encore les secrets et les recettes.

 

Dominique Domerçant  

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