BRH et BNC: 43 ans après

Dans l’histoire des institutions financières en Haïti, la date du 17 août 1979 ramène la séparation de la Banque Nationale de la République d'Haïti (BNRH), en deux entités, qui sont la Banque de la République d’Haïti (BRH), en tant que banque centrale, et la Banque Nationale de Crédit (BNC) comme banque commerciale.

 

Deux institutions étatiques qui, depuis pratiquement plus de quatre décennies, participent  dans la vie politique, économique, sociale et culturelle du pays, en dépit de nombreuses crises et les catastrophes qui continuent de retarder certaines de leurs programmations et prévisions respectives.  

Derrière les missions spécifiques, les fonctions républicaines, régaliennes et régulatrices de la Banque centrale, sur qui repose la stabilité de l'économie nationale dans un pays en crise, et le bon fonctionnement du système financier haïtien, l'année 2022, qui marque les 43 ans de l'institution se confirme comme à travers une forme de résistance institutionnelle, urbaine et sociale.

Dans le centre-ville de la capitale haïtienne, qui est de plus en plus très peu fréquenté, et non fréquentable pour plus d'un, la BRH continue d'occuper l'espace envers et contre tous, à travers son siège social, les différents bureaux administratifs, les caisses et le prestigieux centre de Convention et de documentation Antonio André, et le musée numismatique de la Monnaie, qui accueillaient dans le temps des dizaines, et centaines de visiteurs et de participants aux nombreuses réunions internationales et locales. 

Désormais la principale institution hautement stratégique et financière, ou la plus importante institution du pays, en dehors du Parlement haïtien en dehors des infrastructures portuaires, qui continue de justifier l'autorité de l'État haïtien au centre-ville, en dépit du délabrement, de l'insalubrité, et de l'insécurité.

Dans le voisinage du siège social de la BRH, la BNC profite certainement de l'ombre imposant des agents de sécurité de la banque des banques, pour continuer à garder fonctionnel sa succursale du coin, et accueillir les membres de son Conseil d'administration à l'étage du prestigieux bâtiment historique et mythique de la BNRH, que des témoins privilégiés comme le banquier de renom Henry Volmar pourrait bien retrouver des pages d'histoire importantes dans l'histoire contemporaine de la finance en Haïti à la Place Geffrard, durant presque cinq décennies. 

Dans cette commémoration des 43 ans de la BRH, la banque des banques, cette forme de résistance institutionnelle se manifeste selon certains observateurs avisés, à travers la stabilité dans le leadership collectif affirmé par les différents  conseils d’administration qui se sont succédé. En dépit des limites de l’institution financière, comme l’un des maillons importants dans la stabilité économique, face aux multiples crises et les catastrophes que connaît le pays, l’image de l’institution continue d'être préservée tant de l'intérieur que de l'extérieur.

Dans cette commémoration sur fond de résistance, on ne peut s'empêcher de rappeler la dégradation de l’environnement au centre-ville, sur le plan sanitaire et urbanisme, et les interventions et investissements de la BRH pour aménager et renforcer ses espaces de travail, comme une forme de résistance urbaine pour ne pas abandonner cet environnement qui fut la fierté de tout le pays et de toute la région de la Caraïbe, avec la Cité de l'Exposition,  lors de l’exposition internationale portée par le président Estimé.

Dans cette forme de résistance urbaine et institutionnelle, c’est pratiquement la seule ligne de défense dont dispose l’État haïtien pour justifier son autorité et la suprématie du droit et du devoir de ne pas abandonner la capitale face à l'avancée et l’augmentation des violences urbaines, en dépit des victimes déjà recensées dans le périmètre immédiat de l’institution.

Déjà 43 ans de résistance face aux violences de toutes sortes. Des violences naturelles, à travers chaque saison pluvieuse qui draine pratiquement tous les déchets vers la mer en passant par les rues qui entourent le siège et les bâtiments administratifs de la banque. Des violences naturelles se manifestent également à travers le séisme du 12 janvier 2010, qui n’a pas eu gain de cause face à la résistance anti sismique du bâtiment principal.

Dans une forme de résistance contre d’autres formes d'ignorance, la BRH autant que la BNC se doivent d’investir davantage, dans l'amélioration de leur stratégie de  communication publique, afin d’informer le plus grand nombre de la population sur les missions, les objectifs, les innovations à travers les programmes et les projets, les produits et services. 

Devant la vulnérabilité accélérée de la population haïtienne face aux crises économiques, sociales et politiques combinées et intimement liées, les institutions financières publiques et étatiques, sont pratiquement les plus en vue face aux attentes et dans l'amélioration des conditions de vie de la population. 

Dans l'obligation d'informer pour mieux responsabiliser l'ensemble des acteurs du système, pour pouvoir mieux rassurer la population dans ces activités de production et de consommation responsable, tout en préparant cette dernière à mieux se préparer face aux grandes crises économiques mondiales qui se préparent avec les conflits en cours, et parallèlement profiter éventuellement  des prochaines grandes révolutions technologiques en cours dans l'économie planétaire, qui vont certainement .

Dans cette forme de résistance institutionnelle intelligente et indispensable pour la survie de cette institution nationale qui assure la gestion et la protection du patrimoine national, contre les violences autant que l’ignorance qui alimente souvent certaines critiques infondées et la méconnaissance du fonctionnement des leviers du système financier en Haïti, la Stratégie nationale d’Inclusion financière autant que le Programme d'Éducation sociale et financière se confirment comme des leviers incontournables pour informer, former, intégrer et préparer les générations présentes et  futures à mieux comprendre le rôle et les spécificités de chacune des institutions financières et des acteurs économiques.

Dans le sombre décor que connaît l'économie nationale avec les défis que les crises politiques et institutionnelles,  l'insécurité et  la dévaluation de la monnaie nationale imposent aux familles haïtiennes, et aux nombreuses institutions qui continuent d'assurer la résistance urbaine et institutionnelle, la date du 17 août 2022, devrait pouvoir renforcer l'ère de la résistance autour de la lettre "R". 

Derrière les récentes réunions réalisées entre la banque centrale et les institutions impliquées dans la gestion et la recherche d'une stabilité de la monnaie locale, au-delà de la résistance de la population face à la misère, qui a ses limites.  Cette dernière attend en urgence des réponses, des résultats, des réformes, pour la reprise de la vie économique. D'autres acteurs économiques espèrent des recettes pour ne pas fermer boutique, des jeunes ne voulant ou ne pouvant partir, continuent de nourrir leurs rêves d'entreprendre, malheureusement que seul le réseau du système bancaire haïtien aussi puissant et influent qu'il soit, ne pourra pas satisfaire, sans la résolution des crises politiques et le rétablissement de l'autorité de l'État. 

 

 

Dominique Domerçant

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