Qu’est-ce qu’on fait ?

L’escalade que connait le pays ces derniers temps a fait des victimes au sein de toutes les couches de la société. Hélas, ceux qui confondaient quelques façades à la réalité ont eu la déception de leur vie. L’insécurité instaurée par des gangs, la crise à répétition de l’essence et les protestations violentes ont provoqué, depuis des lustres, une diminution progressive du flux d’activités économiques exacerbé par une déprime généralisée dans la capitale et d’autres grandes villes du pays. Personne ne semble y échapper.

 

La situation actuelle est comparable à celle d’un patient qui a attrapé un tétanos pour avoir négligé une piqûre au pied. Car la dynamique de la crise a suivi un ordre de progression que les autorités ont, elles-mêmes, favorisé par leur laisser-aller et leur agenda inavouable. La guerre des gangs qui a paralysé des pans entiers de l’économie et privé de revenus les vaillants commerçants de la Croix des Bossales et du boulevard Jean Jacques Dessalines a marqué le début d’une phase de dégénérescence que nul ne devait banaliser. Mais, les éléments des classes dominantes se sont bouché les oreilles, croyant qu’ils pouvaient se retrancher éternellement dans le confort de leur petit périmètre protégé.

 

La fermeture de grands hôtels et d’autres entreprises, conséquence de troubles politiques, est un coup dur pour le pays. Dans l’état de fébrilité de l’économie, les licenciements massifs et les journées mortes affectent tous les compartiments du système. D’autant que les grands opérateurs économiques sont les principaux payeurs du fisc.

 

Toutefois, l’idée que la santé de l’économie puisse se réduire au fonctionnement de bars chics et d’hôtels luxueux est un raisonnement absurde. Les modestes familles qui vivent quotidiennement du commerce au Centre-ville ont été les premières victimes de l’effondrement de l’autorité de l’État qui fait régner le chaos d’aujourd’hui. Sauf que ces gens sont des sans-voix et ne font partie d’aucun cercle de privilégiés. Leurs pertes ne font pas l’objet d’opérations comptables et ne sont pas mentionnées dans des communiqués de presse.

 

Haïti, c’est un seul pays. Quand des marchands de La Saline et de Tokyo sont chassés par des bandits et que des zones commerciales sont le théâtre de massacres, personne ne devrait trouver d’excuse pour garder le silence. Pourtant les autorités et une bonne partie de la société exprimaient très peu d’émoi à l’occasion des tueries et des guerres de gangs qui ont débuté en novembre 2018 dans ces quartiers défavorisés. Comme si on pouvait scinder le pays pour garder les pauvres loin des riches !

 

À cette phase, il convient de rappeler que l’anarchie ne fait jamais de quartier et finit toujours par tout renverser.

 

La lutte pour des lendemains meilleurs ne sera efficace que si elle est inclusive. Le combat pour la bonne gouvernance, la restauration de l’autorité de l’État et le redressement de l’économie est une cause commune à laquelle les grands entrepreneurs et les petits marchands doivent s’identifier.

 

Ce n’est plus le moment de bomber le torse. Un gouvernement intérimaire, sans mandat, ne peut prétendre pouvoir résoudre des problèmes séculaires par la force. Il est venu le temps que toutes les élites s’entendent autour de la direction à donner au pays. Aujourd’hui, Haïti est en plein cœur du chaos. Qu’est-ce qu’on fait ?

 

 

La Rédaction

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