Blessée dans son corps comme dans son âme

Dans la ville, la peur et l’angoisse étreignent plus que jamais les cœurs. Une folle rumeur répandue sur les réseaux sociaux annonçait que des bandits avaient pénétré dans l’enceinte d’une école. Bien que la nouvelle soit loin de la vérité, elle n’en demeure pas moins inquiétante : elle reflète en tout cas l’état d’esprit des gens. Il semblerait qu’effectivement les « terroristes » poursuivaient une proie qui se serait réfugiée à l’intérieur dudit établissement.

Les réseaux sociaux bruissent de rumeurs les unes plus folles que les autres, mais elles sont cependant une source d’informations non négligeable en ce qui concerne la multiplication des attaques sur la population civile et l’extrême mobilité des assaillants.

Cette semaine a été particulièrement éprouvante pour le monde de l’éducation qui devient la cible des bandits. Un professeur d’histoire enlevé puis libéré sous caution. Des écoles au milieu de la tourmente à Thomassin, à Turgeau et au Bas de la ville. Une directrice enlevée non loin de son établissement. La traditionnelle « Fête des philosophes », renvoyée dans la plupart des établissements. Nos élèves deviennent dans ces conditions de nouveaux « marrons du syllabaire ».

Dans le sillage des assassinats crapuleux des policiers à Pétion-ville et à Liancourt dans l’Artibonite, la tension a monté d’un cran depuis une semaine.

Blessée dans l’âme, la Police nationale prend du temps pour se remettre. Le corps est pris de frissons annonciateurs de grandes pathologies : coups au-dessus de la ceinture entre gradés, esprit de rébellion dans la troupe, infiltration du grand banditisme. Un tableau complet d’une Institution atteinte dans son âme comme dans son corps. Et comme l’affirmait récemment un confrère, nous ne pouvons pas nous permettre de voir disparaître une institution importante.

L’heure est donc à chaque fois plus grave. Certains patriotes, nationalistes jusqu’à la naïveté, maintiennent leur mantra que nous pouvons nous en sortir seuls, tandis que d’autres dans un cynisme tout aussi « sincère » affirment appuyer à distance une solution haïtienne. Selon un récent sondage, 69 % de la population serait en faveur d’une assistance militaire. Pourtant, on ne voit rien venir, car les résistances, quoique minoritaires, sont fortes, car culpabilisantes.

Entre-temps tout s’effrite, se liquéfie dans le sang et le cri inaudible des femmes et des filles violées.


Roody Edmé

LAISSEZ UN COMMENTAIRE

0 COMMENTAIRES