Ce mois de décembre 2024 est particulièrement éprouvant pour les habitants de la capitale. Les nuits sont de plus en plus voraces, et le crépitement incessant des fusils d'assaut rappelle à chacun que nous vivons un temps de guerre implacable. Les incendies répétés d’écoles, d’églises ou de simples habitations ne se comptent plus. Un état de guerre permanent s’est désormais installé dans nos rues.
À Port-au-Prince ou ailleurs dans le pays, la population n’a jamais autant rêvé de quiétude d’esprit et de paix. Les temps, il faut l’écrire une fois de plus, sont extrêmement difficiles. Les Haïtiens tétanisés se demandent, en cette période traditionnellement réservée à la fête et à la sublimation de la candeur, s’il est convenable ou utile de continuer à faire semblant.
Personne ne sait si c’est le feint qui se glisse malicieusement à la place du vrai. Il vaut mieux convenir que la parade guerrière pour contrer, pendant les fêtes de fin d’année, les seigneurs de la déstabilisation ne suffit pas pour faire oublier que le danger est partout présent en Haïti.
On a perdu l’esprit de cette période qui, toute hypocrisie bue, pouvait trouver un sens dans le prétexte des illuminations qui investissent les lieux publics, les commerces et les foyers, même les plus modestes.
Cette année, le besoin de paix et de tranquillité a éclipsé toutes les expressions de légèreté et charité. Personne n’ose parler des enfants assiégés dans des quartiers où la Police tente de reprendre le contrôle pour les soustraire à la toute-puissance des caïds.
C’est en effet douloureux d’admettre que l’année 2024, sur son passage, a abimé tout ce qu’elle a pu, avec ses incertitudes, la violence aveugle des bandits et la belle saison des mythomanes et autres bonimenteurs. La Noël ne pourra, en aucun cas, nous guérir de ce désarroi.
Au journal Le National, nous savons que la Noël n’apportera pas cette petite dose de joie dont les familles haïtiennes ont soif. Mais l’esprit des fêtes survivra à la veulerie des acteurs (politiques et économiques) de tous bords, survivra à ceux qui ont détruit la cohésion sociale, piétiné le droit à la vie des Haïtiens et dégradé l’image du pays.
Nous sommes quand même nostalgiques de la charité obligée, des fausses réconciliations, des messes fades, des guirlandes édentées, du désordre des feux d’artifice, des pauvres fêtes de quartier et du libertinage permis dans les bals et les réveillons.
La joie, même grotesque, a toujours été consolante. Jamais, elle n’a assombri, comme c’est le cas aujourd’hui, notre foi dans l’humanité. Joyeuses fêtes quand même. Envers et malgré tout.
La Rédaction