Comme prévu, la passation de pouvoir a eu lieu au Conseil présidentiel de transition (CPT). Peut-on dire qu'elle s’est déroulée «sans tambour ni trompette» ? En tout cas, cela s'est fait sans bruit ni fureur. Il faut dire que ce n'est pas dans les habitudes. Nos mœurs politiques nous ont habitués à des esclandres chaque fois qu'il faut changer de «président».
Compte tenu des rumeurs persistantes de «coup d'État» qui bruissaient dans le landerneau politique, on imagine les négociations et autres manœuvres de couloir qui ont permis cette passation, sans heurt, du flambeau entre les deux collaborateurs au sein du même Conseil.
Toutefois, une note de mise au point du Conseiller Emmanuel Vertilaire est venue rappeler que Fritz Jean n'est pas le président de la nation, mais le coordonnateur du CPT. On se demande pourquoi ce rappel ? Emmanuel Vertilaire envoie-t-il un signal qu'il y a anguille sous roche ?
En tout cas, rien de tout cela n'intéresse la population, fatiguée de se faire massacrer. Les manœuvres politiques et les oppositions claniques à la tête d'un État fantomatique ne sont, pour le grand public, qu'un triste spectacle. Un jeu de marionnettes bien loin de son existence éprouvante.
Le nouveau président du Conseil a annoncé la couleur : budget de guerre, augmentation des effectifs des forces de sécurité, redressement économique, préparation des élections. Tout un programme qui annonce une véritable course contre la montre. L'opinion ici et ailleurs est sceptique... et la crise de confiance est plus aiguë que jamais. Le citoyen lambda ne se fie qu'à ses prières et à sa débrouillardise dans ce qui s'apparente à un sursis avant le grand basculement.
Toujours est-il que la résistance est plus forte que jamais et que le front du refus de l'inacceptable se renforce chaque jour, malgré tout. Dans un monde de violence et de chaos, les Haïtiens continuent de croire en un nouveau matin du monde. Et même si l'aube semble lointaine, leur détermination forge l'espoir d'une lumière qui, un jour, dissipera les ténèbres.
Roody Edmé