8 octobre 1991 : 30 ans d'embargo continu contre Haïti ?

Déjà trente ans (8 octobre 1991 au 8 octobre 2021), depuis l’embargo qui avait été imposé par l’Organisation des États américains (OEA), à la demande du président en exil Jean-Bertrand Aristide, dans le but d’exercer des pressions sur les militaires au pouvoir depuis le 30 septembre 1991. 30 ans après, les mêmes causes continuent-elles de produire les mêmes effets ?

De nombreux auteurs, entre des chercheurs, des analystes et des politiques se sont déjà exprimés sur le sujet, jusqu’à déterminer, en grande partie, le côté sombre du bilan, ou encore les impacts de cette décision sur la population haïtienne, à tous les niveaux, notamment sur le plan politique, économique, démographique.

De cet embargo qui allait durer jusqu’à la fin des années d’exil de JBA, avant le fameux retour à l’ordre constitutionnel le 15 octobre 1994, on retiendra d’un article du professeur Sauveur Pierre-Etienne, les propos suivants au chapitre 8, de la « Troisième partie. Échec de l’occupation américaine, crise sociétale et réponse des élites politiques » : « Ainsi, la crise de 1991-1994 a été considérée davantage comme l'échec de la transition que comme l’effondrement de l’État haïtien ».

D’autres auteurs, des années avant, comme l'économiste et directeur d’opinion : Herold Jean-Francois, à travers l’ouvrage : « Le coup de Cédras », ou encore Claude Moïse, allaient, en de nombreuses occasions, proposer d’autres grilles d’analyse susceptibles de nous aider à comprendre la dynamique politique qui a suivie en lendemain du 30 septembre 1991.

Depuis cette date du 8 octobre 1991, on ne saurait sous-estimer les impacts de cet embargo sur l'économie nationale et sur le fonctionnement des institutions du pays. En dehors des statistiques qui continuent d’animer les débats relatifs à ce sombre chapitre dans l’histoire politique et économique haïtienne, on ne saurait laisser passer sous silence les milliers de victimes qui portent tous les noms et les anonymes, et sans oublier que cet embargo allait pourtant servir de déclic pour renforcer de façon significative l'appétit de nos plus proches voisins à transformer Haïti, comme leur principale province ou marché pour écouler les produits de toutes sortes.

Des cris d’alarme, des manifestations, des prises de position pour et contre, et même des chansons, en passant par celle du groupe « RAM », avaient alimenté les débats à cette époque. « Anbago ye, Ayiti pran nan anbago, kote moun mwen pa wè moun yo ? ». Qui sont les principales victimes ? Quels sont ceux et celles qui ont finalement profité de cet embargo de l'intérieur comme de l'extérieur ?

Dix ans après ces différents événements qui ont émaillé le mois d’octobre 1991 et de 1994, en passant par l’embargo imposé par la communauté internationale contre Haïti, jusqu’au débarquement des forces militaires étrangères, suivis d’une nouvelle occupation, le cycle infernal et destructif continue de se renouveler avec de nouvelles crises sociopolitiques, économiques, environnementales et institutionnelles.

Il y nécessité de décrypter le fonctionnement de ce cycle macabre de trente-six mois, dont les graines ont été plantées depuis le 8 octobre 1991, et que le pays récolte tous les trois ans : octobre 1991- octobre 1994 ; février 2001- février 2004 ; juillet 2018 - juillet 2021.

Depuis l’imposition de nouvel embargo des temps récents le 8 octobre 1991, après ceux imposés par certains États voisins puissants et des puissances coloniales au lendemain de 1804, les sanctions internationales contre Haïti prennent de multiples formes. 30 ans plus tard, la formule des « pays lock », comme une autre forme d’embargo imposé par les forces politiques internes, est venue renforcer l’autodestruction de l'économie nationale, de la production locale et décourager les investisseurs qui voudraient créer des emplois et de la richesse dans le pays.

Dominique Domerçant

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