Quel agenda pour la paix dans le monde ?

Dans les relations sentimentales, comme dans la gouvernance d’un État, où les relations institutionnelles prédominent, et même dans les relations internationales, l’agenda représente un élément essentiel dans la formulation des objectifs, la planification des activités communes, et la mobilisation des ressources, dans une forme de synergie entre les acteurs.

Dans la guerre entre la Russie, l’Ukraine et ses alliés qui a franchi une nouvelle étape depuis la fin de février 2022, ce sombre tableau traduit parfaitement les causes profondes de ce vieux conflit entre désormais des frères ennemis.  

D’une part, la Russie tente par tous les moyens d’utiliser ce conflit pour imposer ou confirmer ce nouvel ordre mondial multipolaire. En appliquant presque à la lettre son agenda géopolitique sur la nouvelle représentation de la puissance de l’État russe, en dépit des prévisions d’une guerre éclair, qui devra désormais durer plusieurs mois et des années. Ceci, notamment avec le réarmement en cours de l’Ukraine, par les ennemis jurés de Moscou, qui n’entendent pas réviser l’agenda de suprématie occidentale et ne jurent que par l’affaiblissement ou l’éclatement de cet empire.

D’autre part, cette guerre d’usure offre pratiquement un nouveau terrain pour l’expérimentation des armes et le prolongement de la guerre froide dans une version 2.0, qui, cette fois-ci, risque de provoquer la destruction de l’humanité.

Dans ce conflit, pour le moment régional, mais largement alimenté par des acteurs internationaux, c’est la guerre des agendas des puissances qui se dessine, avec la somme des sanctions imposées à la Russie. Certaines institutions comme l’Union européenne et l’OTAN commencent déjà à revoir leur agenda respectif, tant à l’échelle continentale, régionale et mondiale, avec un regard sur l’Afrique.

De nombreux pays voisins de l’Ukraine ou des anciens alliés de la Russie, comme l’Allemagne ou même la France, commencent par réviser à la hausse leur budget consacré à la défense. Une manne importante pour les industries de l’armement au lendemain de la crise sanitaire mondiale, qui avait grandement ralenti l’économie mondiale. Quel agenda ou quel avenir pour la population ukrainienne dans tout ça ?  

Devant cette crise profonde qui commence déjà à impacter la situation économique planétaire, et certainement la paix dans le monde, les ambassadeurs pour la paix devraient commencer par se réunir afin d’étudier les possibles compromis possibles pour rétablir la paix en Europe, une paix qui devra certainement passer par des négociations gagnant-gagnant entre les acteurs en conflit.

Dans cette lutte en cours pour l’armement et l’alignement des ennemis et de leurs alliés, il ne reste pratiquement presque plus de place pour la paix et l’entente minimale pour éviter la destruction encore de plus de vies et des villes.

Disposant encore de son statut de puissance nucléaire ou de membre du Conseil de sécurité de l’ONU, et de son vaste territoire continental, et d’une culture symbolique et réelle de puissance militaire, en dehors des ressources stratégiques pour négocier même avec ces ennemis, la Russie semble donner l’impression de pouvoir résister encore pour quelques années.

Dans une recherche rationnelle et réaliste d’une possible négociation pour arrêter cette guerre meurtrière de trop, après l’échec des interventions des pays occidentaux en Irak, en Libye, en Syrie entre autres, on pourrait se demander si les initiatives persistantes d’isolement diplomatique de la Russie et de renforcement militaire de l’Ukraine en cours ne visent pas paradoxalement à mettre encore plus de l’huile sur le feu ?

Dans l’impossibilité de rassurer Poutine ou de rapprocher les intérêts de la Russie à ceux des occidentaux, en particulier des États-Unis qui donnent le ton aux autres pays européens, est-ce qu’il serait encore possible dans ce contexte de mondialisation et de désorganisation de certaines grandes institutions internationales, visiblement affaiblies, de vouloir formuler ou même appliquer un agenda international pour la paix, sans une prise en compte d’un acteur aussi important ou potentiellement nuisible que pourrait être un pays mis à l’écart comme la Russie ?

Des scènes identiques aux bagarres dans le préau de l’école se jouent dans le théâtre géopolitique actuel. En dehors des gains qu’engrangeront les multinationales, il n’y aura pas de gagnant dans les deux camps. L’Ukraine prendra du temps pour se reconstruire et réparer ses blessures, et la Russie sortira diplomatiquement et économiquement affaiblie. L’Europe et les États-Unis vont ainsi se mobiliser ouvertement dans une nouvelle guerre froide, épuisante et fragile. Ce qui fera l’affaire de la grande Chine !

Et Haïti dans tout  ça ?  

 

Dominique Domerçant      

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