Quand l’évangile du dialogue réapparait

La leçon mieux apprise par les hommes politiques qui se succèdent au pouvoir ces dernières années serait celle concernant la vertu du dialogue. Ils s’intéressent très peu à celle portant sur leur devoir de résultats. Les considérations qui consistent à réclamer « un compromis pour mettre le pays sur les rails du changement » se font entendre chaque fois que les autorités sont à court de solutions ou ne peuvent réagir courageusement quant aux maux de la nation. Contrairement aux idées véhiculées à ce sujet, le dialogue ne saurait résoudre les problèmes en dehors d’une mise en oeuvre politique.

La leçon mieux apprise par les hommes politiques qui se succèdent au pouvoir ces dernières années serait celle concernant la vertu du dialogue. Ils s’intéressent très peu à celle portant sur leur devoir de résultats. Les considérations qui consistent à réclamer « un compromis pour mettre le pays sur les rails du changement » se font entendre chaque fois que les autorités sont à court de solutions ou ne peuvent réagir courageusement quant aux maux de la nation. Contrairement aux idées véhiculées à ce sujet, le dialogue ne saurait résoudre les problèmes en dehors d’une mise en oeuvre politique.

La démocratie comme régime politique implique l’établissement d’une passerelle qui favorise la permanence du dialogue. Entre citoyens, dirigeants et opposition, les échanges se font forcé¬ment, sous une forme ou une autre. En dehors des situations où c’est la Constitution même qui recommande la recherche de compromis entre les acteurs, une base sous-jacente doit garan¬tir le minimum d’intercompréhension et d’harmonie qui éparg¬nent des extrêmes.

« Unité nationale », « entente citoyenne » et « réconciliation interhaïtienne » sont des éléments d’un des champs lexicaux les plus récurrents dans les discours sur la crise haïtienne. Ces jours-ci, ces expressions reviennent pour la plus belle à l’occasion du nouveau processus de dialogue annoncé par le président Jo¬venel Moïse. Non seulement l’approche en question tend à faire passer les tensions mal gérées pour une guerre civile qui rend¬rait le pays ingouvernable, elle offre une précieuse excuse aux autorités embarrassées devant leur piètre performance.

Peu de résultats concrets ont été obtenus des célèbres dialogues, « chita tande » ou « chita pale » réalisés ces dernières années. Les personnalités les plus honorables de la société civile, quels que soient les mécanismes définis, ne réussissent toujours pas à réconcilier le pays avec ses élites inconscientes. La seule récon¬ciliation qui soit vraiment nécessaire.

Le dialogue apparait trop souvent en Haïti comme une solution conjoncturelle pour des dirigeants qui veulent contenir les réac¬tions provoquées par leurs propres manquements. À l’instar de la formule qui consiste à créer une commission pour chercher les solutions à chaque crise, l’initiative de lancer « un dialogue » permet aux autorités de souffler pendant que les citoyens s’illusionnent en espérant un quelconque changement. À la vé¬rité, le dialogue social tel qu’envisagé ne profite qu’aux dirige¬ants, car eux seuls réussissent à en tirer avantage. Ils en gagnent de faire croire qu’« aucun groupe n’a de réponse aux problèmes du pays ». Quelle excuse !

Aussi longtemps que les autorités persisteront à se détourner des vrais problèmes qui exigent un virage dans la gestion des affaires publiques, l’évangile du dialogue leur paraitra comme une opportunité face à l’opinion publique. Quand les ressources du pays cesseront d’alimenter la soif de bien-être des cliques de privilégiés, ce sera un premier tournant vers la réconciliation nationale. La violence structurelle qui reproduit des politiques qui tordent le bras aux plus pauvres pour enrichir les élites poli¬tiques et économiques devrait figurer dans l’agenda du dialogue national. L’entente citoyenne sera vaine si elle n’amène pas à la tête du pays un leadership éclairé capable de donner des résul¬tats mesurables à travers le cadre de vie de tous les Haïtiens.

Kendi Zidor

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