Invasion du Palais de justice: le CG de Port-au-Prince se prononce 6 jours après

Le vendredi 10 juin dernier, des bandits armés membres l’association criminelle baptisée « 5 Segonn» menée par le dénommé (Izo) ont fait irruption à l’intérieur des locaux du bâtiment logeant le Palais de justice, situé au boulevard Harry Truman ( au Bicentenaire). Les personnes qui se trouvaient encore dans l'espace ont fui de justesse, à cause de la violence exercée par les envahisseurs et notamment des tirs à l’arme automatique qui résonnaient dans l'espace.

Depuis la matinée du vendredi, les bandits ont fait plusieurs tentatives pour prendre le contrôle des locaux du parquet. Ils ont été chassés par deux véhicules blindés de la Police nationale d’Haïti, renforçant la sécurité du périmètre du bâtiment. À la tombée de la nuit, ils ont profité de l’abandon de l’espace par les policiers pour assiéger le bâtiment.

Les employés et les hommes de loi ont failli laisser leurs peaux, dont l’avocat Arnel Rémy qui a indiqué avoir échappé de justesse à cet assaut des malfrats. « Au moment de l'attaque, j'ai perdu le contrôle de mon véhicule, je n'ai eu qu'une préoccupation c'est de laisser le milieu, j'ai pas eu le temps de m’enquérir réellement sur ce qui se passait », a-t-il expliqué.

Dans la panique, d'autres personnes ont été blessées en essayant de grimper la clôture, et même certains magistrats ont été aidés par des détenus, a déclaré Martin Aîné, président de l'Association nationale des greffiers haïtiens (ANAGH). Selon lui, cette action s'inscrit dans le cadre d'un plan visant à agenouiller la justice, afin d'éviter que certains dossiers brûlants soient menés à terme.

Le commissaire du gouvernement de Port-au-Prince sort enfin de son profond mutisme et prend des dispositions pour déplacer certains services permettant au parquet de continuer à fonctionner. « Dans le soucis d'un monitoring d'offre de service public et suivant le rapport de proximité et de fonctionnalité que le parquet entretient avec le décanat du tribunal, le commissaire du gouvernement a installé, à titre provisoire, au tribunal de paix de la section sud de Port-au-Prince les services publics suivants : le service de la légalisation des actes, le service de la plainte, la délivrance d'exéquatur, la réception des requêtes et des correspondances des avocats et des justiciables adressées au commissaire du gouvernement. »

Dans une autre correspondance adressée au ministère de la Justice et de la Sécurité publique, Me Jacques Lafontant exprime sa volonté de retourner au Parquet et requiert un accompagnement sécuritaire. « Le commissaire du gouvernement près le tribunal de première instance de Port-au-Prince vous présente ses compliments et vous requiert de l'accompagner sous escorte policière, avec au moins deux (2) blindés pour qu'il puisse se rendre au Parquet de Port-au-Prince, aux fins de constat des dégâts enregistrés en date du 10 juin 2022, suite aux attaques armées dont a été l'objet le Parquet de Port-au-Prince et de récupérer du même coup, des dossiers gardés aux bureaux des substituts commissaires du gouvernement. »

Depuis plusieurs mois, des associations, dont le barreau de l'Ordre des avocats de Port-au-Prince, plaident pour la délocalisation du Palais de justice. Malgré un rassemblement organisé devant la résidence officielle du Premier ministre Ariel Henry à Museau, l'exécutif continue de faire la sourde oreille. Pour Me Robinson Pierre-Louis, c'était juste une question de temps. Que des bandits envahissent le Palais de justice était prévisible.

« Ce qui s'est produit montre clairement que nous sommes loin de l'État de droit en Haïti », soutient-il. Il déplore, plus loin, que jusqu'à présent les autorités n'aient pas réagi sur cette gifle, dit-il, infligée à l'État haïtien par les bandits. Selon lui, les responsables n'ont aucune volonté de permettre à la justice de fonctionner normalement

D’après les informations qui circulent depuis peu sur les réseaux sociaux, les matériels de bureau emportés par les hommes armés du Palais de justice sont déjà en vente sur le marché informel.

Esdra Jeudy

 

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