Une quatrième année de croissance négative pour l'économie haïtienne

L'économie haïtienne a connu, pour une quatrième année, une croissance négative. L’accélération de l'inflation, tant au niveau local ainsi qu'au niveau mondial, a beaucoup impacté la valeur des importations. L'enlisement de la crise sociopolitique politique et sécuritaire au mois de septembre dernier a affaibli considérablement les activités au cours de ce dernier trimestre de l'exercice 2021-2022 (juillet-septembre). Des entreprises ont dû fermer leurs portes et le nombre de personnes en insécurité alimentaire est passé à 4,7 millions.

« La crise sociopolitique et sécuritaire a impacté négativement l’activité économique et s’est traduite par un affaiblissement de l’offre ainsi qu’une accélération de l’inflation en Haïti. Les perturbations sociales enregistrées au cours du mois de septembre 2022 ont causé des dommages matériels importants au niveau de l’écosystème entrepreneurial. Le niveau élevé des prix des produits pétroliers sur le marché international en dépit de leur évolution à la baisse et l’indisponibilité prolongée de ces derniers sur le plan national se sont reflétées dans la structure de coût des entreprises à travers le renchérissement des autres intrants. Cette conjoncture a contraint plusieurs entreprises à fermer leurs portes ou à fonctionner suivant un horaire réduit. Les activités de la branche "Restaurants et hôtels", fortement tributaires des arrivées de visiteurs durant l’été, ont également été affectées », a fait savoir la Banque centrale en décrivant l'état réel du pays, dans une note concernant le quatrième trimestre de l'exercice fiscal 2021-2022. 

 

De fait, c'est une dégradation générale du cadre macroéconomique du pays durant la période juillet-septembre. Au niveau mondial, les produits de base ont connu une forte augmentation, ce qui a entrainé de considérables pressions inflationnistes dans l'économie locale. Parallèlement, les transferts d'argent de la diaspora haïtienne ont diminué. « S’agissant des transferts privés sans contrepartie sur l’exercice 2021-2022, ils ont baissé de 5,5 % par rapport à la même période de l’an dernier pour atteindre 3 643,8 millions de dollars ÉU. Cette évolution des transferts s’explique notamment par la hausse de l’inflation dans les pays expéditeurs et son impact négatif sur le revenu disponible des ménages de la diaspora haïtienne », a indiqué la BRH. En effet, elle est également liée, dans une moindre mesure, au fait qu’une partie des transferts, autrefois destinée à Haïti, est envoyée vers d’autres pays notamment la République dominicaine consécutivement à l’augmentation des mouvements migratoires dus à la dégradation des conditions de sécurité dans le pays », a-t-elle poursuivi.

 

 

Du coup, la balance commerciale sur les 11 premiers mois de l'exercice fiscal s'est détériorée. Elle est passée de 3,23 milliards en 2021 à 3,35 milliards en 2022. Pour les exportations, seuls les secteurs de la sous-traitance et de la pêche ont favorisé certaines opportunités à Haïti. « La demande pour la sous-traitance s'est accrue à plus de 16 %, celle de la pêche à plus de 32, 5 %. Les exportations ont crû de 15,03 % pour se porter à 1 172,7 millions de dollars ÉU ». Concernant les importations de biens, elles ont totalisé 4 523,32 millions de dollars ÉU sur la période et se sont accrues de 6,3 % en raison notamment de l’alourdissement de la facture des produits pétroliers, alimentaires et manufacturés. La dépréciation de la gourde continue: le taux de change de référence est passé de 112,62 gourdes en juin à 121,33 gourdes en août avant de revenir à 116,05 pour un dollar en septembre 2022. Les réserves nettes des changes sont établies à 227,23 millions de dollars au 30 septembre 2022, en baisse de 6,14 % par rapport au trimestre précédent.

 

 

En revanche, pour les diverses prévisions de l'État haïtien à propos du budget, il y a une relative stagnation des recettes. « La baisse de l'activité économique, les troubles sociopolitiques ont affecté le fonctionnement régulier des organes de perception. Les taxes et impôts collectés ont connu une progression trimestrielle de 0,05 % en passant de 26 702,25 MG à 26 716 MG. Les dépenses budgétaires ont totalisé 41 903,14 MG au 4e trimestre contre 47 890,03 MG, un trimestre plus tôt. Sur l’exercice, les recettes collectées n’ont pas pu atteindre les niveaux prévus dans le budget; elles ont totalisé 110 107,1 MG, marquant une contre-performance de 8,3 % par rapport à la cible budgétaire (120 135,3 MG). Pour leur part, les dépenses budgétaires se sont accrues de 7,8 % par rapport à l’année 2021 pour atteindre 165 460,6 MG en dépit des mesures de rationalisation de ces dernières à travers l’annulation de la plupart des exonérations et l’arrêt de quelques programmes de subventions », a confié la BRH.

 

 

Néanmoins, le système bancaire continue de marquer des points. Sauf une légère chute, de la rentabilité a été constatée durant la période. Par contre, pour les perspectives économiques pour les jours à venir,  la BRH déclare que l'économie haïtienne est sous la pression de divers facteurs tant mondiaux que locaux. En ce sens, cela dépend de l'évolution de la situation sécuritaire et sociopolitique, de la disponibilité des produits pétroliers et de la baisse de l'inflation chez les principaux partenaires commerciaux d'Haïti. 

 

 

Donc, l’atténuation des troubles sociopolitiques et l’amélioration des conditions de sécurité permettront un meilleur fonctionnement de l’activité économique. Notamment, ceci devrait avoir des incidences positives sur la confiance des agents économiques, une condition sine qua non dans le rétablissement d’un climat des affaires propice aux investissements et aux initiatives privées. Parallèlement, le ralentissement du rythme de progression de l’inflation chez les partenaires commerciaux d’Haïti devrait aider à réduire la facture d’importations du pays et limiter les pressions inflationnistes provenant des produits importés, précise la banque centrale. À rappeler que, dans le contexte actuel, l'inflation a déjà dépassé les 30 %. Les produits importés cumulent à plus de 43, 2 %, tandis que pour les produits locaux, c'est 23,2 %.

 

Oberde Charles

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