Dr Catts Pressoir et les chantiers du premier musée de la Médecine en Haïti

Des questions parmi les plus pertinentes à se poser, trouvent leurs réponses et des sommes d’informations pertinentes sur la terre de Saint-Domingue et l’histoire d’Haïti, à la lumière de l'évolution des activités sanitaires et médicales, dans l’ouvrage :”La médecine en Haïti 1927”, du Dr Catts Pressoir.

Derrière l'impossibilité de fournir des informations sur l'aménagement du système de santé et des codes médicaux, via la médecine traditionnelle et les croyances religieuses, mystiques ou populaires entre autres, qui ont existé durant la période amérindienne (avant 1492), cet ouvrage réparti en cinq grands chapitres nous offre la possibilité de voyager dans l’histoire de la médecine haïtienne.

Dans les chapitres un et deux est abordé le thème suivant : “La médecine à Saint-Domingue”. Le troisième chapitre présente  : “Le médecine en Haïti", le quatrième aborde le sujet suivant: “La Science médicale et le problème des fièvres", et enfin le cinquième propose de faire  un tour dans : “La législation médicale et sanitaire de 1900 à 1914”.

Des repères suffisamment intéressants, incontournables, mais surtout inspirants qui offriraient à des producteurs de l'audiovisuel de réaliser des documentaires ou des films sur l’histoire de la médecine en Haïti. À défaut de disposer des images pour illustrer ces informations combien hautement utiles tant pour le développement d’une meilleure compréhension des sciences médicales et pour la diffusion de la culture générale associée à ce domaine combien sélectif et pointu, les chapitres de cet ouvrage fournissent bon nombre de pistes pour monter des expositions, à partir des tableaux, des montages, des reproductions de scènes et des installations.

 

D'où vient le nom de «Morne l'hôpital» dans la capitale haïtienne ? Quelles sont les premières infrastructures sanitaires en Haïti ?  Qui sont les premiers médecins haïtiens ? Comment mesurer les contours de la médecine classique, les connaissances médicinales transmises par les esclaves venues d’Afrique, et l'héritage des Amérindiens sur le plan sanitaire ?   

Dans ce classique de la médecine haïtienne, qui a été rééditée par “C3 Editions”, en 2018, on retient ceci: “ Le premier hôpital construit par les Français à Saint-Domingue se trouvait  au fond du Cul-de-Sac, près de l’habitation Turgeau, à une demie heure de la position de la future ville de Port-au-Prince, au flanc d’une hauteur qui en garda le nom de Morne de l'hôpital".  L’auteur poursuit: “Il était dû à l’initiative même des flibustiers. Cet établissement disparut vers 1708, par suite de démêlés entre les fondateurs et le comte de Choiseul Beaupré.

De quelles institutions sanitaires haïtiennes ou des familles de médecins haïtiens  devraient venir les premières collections du futur musée de la Médecine en Haïti ? De quelles institutions financières, d’une banque ou d’une fondation viendront à la fois le financement et les bâtiments pour accueillir les prochaines grandes expositions thématiques physiques et virtuelles, qui raconteront autant l’histoire de la médecine haïtienne, mais aussi et surtout les contributions des médecins et scientifiques haïtiens dans la médecine universelle ?   

Des années ou des siècles plus tôt, Haïti disposait bien avant 1915, de nombreux chantiers et des institutions qui participaient à la prise en charge des soins médicaux et la prévention sanitaire au bénéfice de la population, nous rapporte l’auteur, le Dr Catts Pressoir.

Déjà quatre ans depuis la réédition de l’ouvrage en 2018, le Dr Agabus Joseph, dans la nouvelle préface, n’a pas manqué l’occasion de faire l'éloge de document, en rappelant que la  publication de cet ouvrage: “s’inscrit clairement dans cette double dimension: un regard objectif sur l'évolution de la médecine haïtienne, mais également la légitime fierté d’une corporation qui n’a pas attendu le débarquement de 1915 pour se mettre en place et oeuvrer à la protection de la santé de la population.”.   

Du premier Jardin royal des plantes pour aboutir  plus tard au Jardin botanique de l’École de médecine haïtienne, tout en se référant aux premiers ouvrages sur la médecine, sont abordés des pans importants de l'écosystème et l’histoire de la médecine en Haïti, le livre invite à découvrir en trois dimensions lors d’une belle exposition le monde de la médecine sur ce coin de terre.

Dans cet ouvrage de référence, on retrouve  à la page 70, les propos suivants : “ Les bonnes femmes d’aujourd’hui préparent pour les malades des sirops, des bouillons et des tisanes qui rappellent bien les préparations de Poupée Desportes qu’on se demande si elles ont puisé dans les vieux exemplaires de son ouvrage restés dans le pays, ou tout simplement à la même source que le médecin Saint-Dominguois, la tradition populaire.”.

Dazile est un éclectique, ayant l’avantage de posséder de sérieuses connaissances dans la chimie et la matière médicale. Le raisonnement médical est excellent chez lui, et ses idées sur les questions sanitaires annoncent le XIXe siècle. Il a publié deux ouvrages, fruit de ses notes et de ses méditations: “Observations sur les maladies de nègres “ (Paris, 1775) et “Observations générales sur les maladies des climats chauds” (Paris, 1785), nous rapporte le Dr Catts Pressoir à la page 71.

Des Bocor ou “Bòkò” ont aussi leur place dans cette belle exposition sur fond de voyage littéraire, mais certainement scientifique. L’auteur  nous dit: “ Le savoir botanique des Africains est loin d'être méprisable. Transportés en Haïti, ils ont dû outre leurs connaissances personnelles acquérir beaucoup de notions utiles obtenues des derniers indiens.’

Dans les chapitres qui alimentent la page 73 de l’ouvrage, on peut lire: “ Les peuples indigènes, disent Castellani et Chalmers, ont également une bonne connaissance des plantes et médicinales et toxiques de leur voisinage, et il est bon pour le médecin qui vit sous les tropiques de se rappeler que l'écorce de cinchona fut tout d’abord simplement un remède indigène de l’Équateur, et que dès lors il n’est pas raisonnable de mépriser entièrement les drogues populaires.’

Des arguments se croisent et se complètent dans le fil des recherches partagées par le Dr Pressoir: “ Combien de fois s’écrie Descourtilz, j’ai vu dans l’épidémie de la fièvre jaune, des mulâtresses arracher à la mort tous ceux qu’elles traitaient par l’emploi des plantes indigènes ou par les procédées du pays.”

Dans le paragraphe suivant, il poursuit: “Le médecin militaire Gilbert, auteur d’une “Histoire médicale de l'expédition des Français à Saint-Domingue” nous apporte un témoignage concordant: "À l'époque de cette grande catastrophe ont vit…les femmes offrir le spectacle des vertus les plus touchantes… Voyant l’insuffisance des remèdes ordinaires, elles en administraient d’autres, dont elles avaient apporté le secret des déserts de l’Afrique… »  

Durant la période coloniale de Saint-Domingue, dans la partie française, l’ouvrage du Dr Catts Pressoir propose dans trois premiers chapitres des faits importants pour rappeler l’histoire et l'évolution de la médecine. Il nous dira que : “Le médecin haïtien peut se retourner sans crainte vers le passé et considérer l'évolution de sa profession avec une légitime fierté. » Comment matérialiser dans l'Haïti d’aujourd’hui cette fierté dans une démarche muséographique ?

Dr Normil Georges Sylvain, dans sa préface s’inspira en ces termes: “En faisant cela, il a accompli une oeuvre politique, dans le meilleur, le seul sens du mot, qui se souvient de polis, l’homme de la cité, celui qui construit la cité de demain…”,

demain, on va continuer de commémorer la journée mondiale de la santé en Haïti, sans pour autant disposer d’un seul espace de mémoire, d’un mémorial en hommage à tous les médecins haïtiens et des médecins étrangers comme Paul Farmer, qui se sont investis dans la santé de la population haïtienne, et sans oublier les autres médecins haïtiens connus ou anonymes sacrifiés,  victimes de violences, torturés, enlevés ou assassinés.

Derrière les grandes difficultés que connait le secteur médical haïtien, depuis plusieurs siècles, à la fois d’ordre institutionnel, politique, économique ou d'éthique entre autres, la société haïtienne et les professionnels du secteur devraient finir un jour par inscrire dans leur agenda les questions autour de l’historiographie, de -la mémoire, des archives, et des collections de toutes sortes,  des organes et des restes humains à conserver dans les laboratoires, des équipements, des matériels et tout autre outil et objet vieillissants ou non, mais témoins de l'évolution du secteur et utilisés par de nombreux spécialistes à conserver et  à transmettre aux générations futures.

De nombreux pays disposent de plusieurs musées de la santé, de la médecine ou d’autres spécialités et spécificités médicales et scientifiques. Des facultés de médecine comme des hôpitaux disposent également des collections accessibles aux étudiants en médecine ou au grand public, suivant la nature des collections et des savoirs à partager aux plus grands nombres, autour des institutions, des professions, des inventions, des interventions et des préventions au bénéfice de la population.

Dominique Domerçant

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