Dans le prochain musée national de la danse en Haïti, les femmes occupent certainement une place importante. Dans la liste de ces figures féminines qui seront immortalisées, avant, pendant et après leur retraite, une salle sera certainement dédiée à Nicole Morisset Lumarque, fondatrice de la compagnie de danse Ballet folklorique d'Haïti.
Dans l’histoire de la danse en Haïti, nombreuses sont les femmes visionnaires et engagées au-delà de leurs talents, qui décident de se lancer dans la fondation d’une institution capable de porter d’ambitieux projets artistiques et culturels majeurs et mobilisant un grand nombre de talents polyvalents et complémentaires.
Développer et diffuser les techniques de danses traditionnelles haïtiennes aux quatre coins du monde a toujours été l’un des principales missions et objectifs de cette académie de danse, qui porte l'énergie de Nicole Lumarque.
Dans les performances qui explorent la thématique Tezen, le Ballet folklorique d'Haïti de Nicole Lumarque s’impose comme un véritable laboratoire de création et d’animation. Dans l’un des derniers hommages à l’immortel Ansy Derose, on se souviendra pendant longtemps de l’accueil et de l'émerveillement du public, face aux talents confirmés et formés par Nicole Lumarque.
De l’école de danse Nicole Lumarque à l'intégration du “Ballet folklorique d’Haïti”, ce fut tout un cheminement pour une sélection de jeunes, notamment des filles qui ont bénéficié de la formation et de l’encadrement de celle qui disposait d’une certaine longueur d’avance sur ses pairs, par la valeur ajoutée qu’elle apportait dans ce processus de transmission de savoir, de sagesse, de spiritualité et de sérieux dans la danse. Et ce n’est certainement pas Soraya Carmelle Yanick Louis ou Ronite Louima qui diront le contraire !
De nombreuses scènes historiques et mythiques d’Haïti ont dansé sous les pas des talents du Ballet folklorique d'Haïti, durant plus d’une décennie.
Dans le cadre du quarantième anniversaire de la journée mondiale de la Danse (29 avril 1982-2022) n’est-ce pas une belle occasion de saluer le travail accompli par Nicole Lumarque, comme parmi d’autres grands noms, ces hommes et femmes qui se dédient corps et âme dans cet univers artistique.
Des plus mûrs aux plus jeunes talents, on se souviendra également de la participation des juniors du Ballet folklorique d’Haïti, en tant qu’invité d’honneur à la deuxième édition du festival “Vol au Vent”, qui se tenait au Parc historique de la Canne à sucre.
Des rythmes et des rites célébrant souvent les esprits ancestraux qui animent et alimentent l’essentiel dans les traditions populaires haïtiennes. Quand les couleurs ne célèbrent pas visiblement les esprits d’Ogou, de Danmballa, ou d’Agwe, ce sont les tambours qui résonnent avec Bawon, Simbi, Erzulie Dantor et Fréda.
Dans la biographie de son célèbre mari, le professeur Jacky Lumarque, le chapitre de sa vie privée met en lumière une synthèse de la biographie de cette femme aux multiples talents. “Jacky Lumarque rencontre Nicole Morisset en classe de seconde. Ils se marient en 1974, après le Bac. Artiste aux multiples talents, Nicole Lumarque, diplômée de l’Institut Technique Commercial de Porto Rico, de l’Institut Technique de Banque (Paris), licenciée en Gestion et en Art respectivement à l’INAGHEI et à l’École Nationale des Arts, abandonne une importante carrière bancaire pour se consacrer entièrement à la danse, en devenant professeure de danse et de yoga, spécialiste de danses folkloriques et sacrées.”
Dans la liste des plus importantes réalisations de Nicole Lumarque, on retient qu’elle a fondé la compagnie de danse “Ballet folklorique d’Haïti”, ainsi que la Fondation qui porte le même nom. Le couple a eu deux enfants, une fille (Tabitha) et un garçon (Sébastien). Ce dernier est décédé tragiquement à l’hôpital universitaire de Tampa en 2014, à la suite d’une erreur médicale. Le couple a aussi adopté un garçon, Jethro Moïse (Janak). »
Drame familial et détermination à aller de l’avant, en dépit des soucis de santé et des autres formes de souffrances alimentées par sa sensibilité artistique et sociale, entre autres.
Dans bon nombre de spectacles portés par cette institution patrimoniale, on découvre souvent des mariages esthétiques et/ou symboliques entre les danses traditionnelles haïtiennes, les danses de jazz afro, le Yoga, et d’autres tendances modernes et innovantes.
De la banque à la culture, avec la danse comme fer de lance, Nicole Lumarque se confirme comme l’une des figures contemporaines les plus respectées, par ce qu’elle produit, peaufine et propose au public.
Durant les multiples manifestations culturelles, notamment les expositions d’hommage organisées en Haïti en l’honneur de Jean Claude Garoute dit Tiga, cette danseuse était également présente lors des rencontres du comité.
Durant cette occasion, j’avais été honoré de visiter la résidence de cette grande dame de la culture e et collectionneuse de nombreuses œuvres d’art, notamment celles de “Tiga”. Ce qui m’a permis lors des échanges de découvrir certaines des valeurs citoyennes et la vision culturelle de Nicole Lumarque. Cette femme représente pratiquement une banque de connaissance sur l’histoire d’Haïti et de savoirs sur la culture contemporaine, en dehors de la danse !
Dominique Domerçant
