À l'école du Vodou !

Découvrons un ensemble de connaissances partagées et des témoignages venant des autorités culturelles, des personnalités engagées dans la culture et initiées dans les traditions ancestrales haïtiennes qui proposent un autre regard sur le sens et l’essence du Vodou en tant que science populaire et universelle du peuple d'Haïti. Rendez-vous à l'école du Vodou pour mieux apprendre et comprendre le symbolisme du serpent (Damballah), à travers les sources,  les savoirs, la sagesse et les secrets des trois paroles qui définissent  l'existence, l'intelligence et la résistance du peuple d'Haïti !  

 

Dans cet ouvrage de référence portant le titre :«Konesans Vodou», les lecteurs sont invités à entendre la voix de plusieurs initiés, de plusieurs personnalités notoires, des gardiens et des gardiennes des traditions ancestrales qui choisissent de partager la parole sacrée, la parole qui doit servir d’essence pour faire fonctionner le moteur de la conscience collective, l’unique façon d’assurer pleinement la résistance de ce peuple martyr, meurtri et pétri dans le combat permanent pour la survie et le sauvetage de la race noire, et de ses racines profondément ancrées la terre.

 

Dans l’introduction portant le titre: « La parole aux vodouisants»,  Edwige Balutansky rapporte: «En tant qu'équipe, nous avons souhaité apporter un grain de sable dans la conciliation de ces différents aspects de nous-mêmes», tout en poursuivant: «Marginalisés, attaqués, souvent physiquement, les vodouisants, descendants de ces esclaves, se sont repliés et ont garde le silence. Il fallait leur donner la parole».

Dans la préface de la ministre de la Culture et de la Communication de l'époque, Marie Laurence Jocelyn-Lassègue, on retient les paroles suivantes: «Les campagnes de rejeter, aujourd'hui encore, frappent les Vodouisants-es…sous d’autres formes, d’autres noms, avec d’autres moyens. L’acculturation est peut-être l’un des fléaux les plus graves menaçant notre peuple et son avenir, car elle nous vide insidieusement de notre essence, de tout ce qui nous donne la force de nous assumer et de nous affirmer».

 

De la manbo Euvonie Georges Auguste, on apprend que : «c’est dans l’harmonie que nous développons entre nous-mêmes et tout ce qui a été créé: notre relation à Dieu, notre relation avec le cosmos, avec la nature…et tout ce qui existe. Le Vodou est un mode de vie et englobe tout cela. C’est aussi la façon dont nous vivons….Cependant, notre existence est régie par une série de principes que nous devons suivre. Ce sont des principes universels que l’on retrouve partout sur terre, dans toutes les religions.»

De l'ingénieur biochimiste, hougan devenu Ati national, on retient ces paroles: «J’ai décidé de devenir un hougan (prêtre Vodou), pour me guider dans la vie. Pourquoi ? Mon grand-père était sur son lit de mort quand il m’a dit: «Cher enfant, c’est toi qui me remplaceras en tant que grand hougan en Haïti».  

 

Devenir hougan pourquoi et comment ?  Max Gesner Beauvoir poursuit son dialogue: «Mon grand-père est mort en 1973. Pendant une année entière, j’ai réfléchi à ce qu’il m’avait proposé. Je me suis finalement dit: «Au fait, il a raison….pense à ce que tu fais vraiment en tant que chimiste: tu transformes des éléments puis tu les organismes pour obtenir les résultats que tu recherches…».

 

Directeur du Bureau national d'ethnologie, artiste et hougan, Erol Josué, n’est pas resté silencieux dans ce dialogue. À travers ses paroles on retient ces phrases: « Nombreuses sont les raisons qui m’ont ramené en Haïti. J’ai vécu de nombreuses années en Europe et aux États-Unis en tant qu’artiste et hougan. J’ai créé mon propre péristyle dans ces pays. Ma carrière en tant qu’artiste marchait bien. J’ai sorti un album appelé «Regleman» qui a eu du succès. Le tremblement de terre m'a forcé à réfléchir sur ce qui se passait ici, en Haïti. Je me suis posé plusieurs questions et la réponse m’est venue du Vodou: on m’a dit que je devais revenir».

 

Dynamique cyclique: «Presque tous les 10 ans, il y a des attaques contre le Vodou. Ça continue. Lors du dernier, celui de 1987, un haut membre de l'Église, déclara sur la place des Gonaïves que sa mission était d’en finir avec les Vodouisants et les communistes…», a fait savoir l’anthropologue, chercheuse et écrivaine Rachel Beauvoir Dominique.

 

Dans cette communication savante avec les lecteurs autour des lwa Vodou, un autre ancien ministre de la Culture et de la Communication, Eddy Lubin, nous emmène dans un tour d’histoire, en rappelant que : «L’Afrique est énorme. Il n’y a pas une seule forme de Vodou», tout en poursuivant: « Le Vodou de Souvenance, semble avoir été amené par un prêtre Vodou, réduit en esclavage qui aurait amené ses rituels avec lui. Peut-être qu’il venait d’Abomey, la capitale du Royaume du Dahomey vu que les différents esprits qui y sont honorés, ainsi que leurs rituels, semblent venir tout droit de ce royaume».

 

Des rituels de sacrifices dans le Vodou comme dans toutes les autres religions et pratiques ancestrales, le hougan à Lakou Plètil, Jacques Casséus rapporte: «Nous rendons hommage aux esprits pour toute l’aide qu’ils nous donnent. Quand nous fêtons un lwa, nous lui offrons ce qu’il aime manger parce que nous connaissons ses goûts. En novembre, quand c’est la fête de Gede, nous tuons un cabri en son honneur. Quand nous célébrons Kouzen, nous lui préparons du «Tchaka», une soupe épaisse à base de maïs».

Dorsainvil Estimé, un autre prêtre Vodou parti quelque temps de cela, racontait que : «Je crois que Dieu a confié Haïti au Vodou. Nous croyons dans les Lwa, en particulier Ogou Batagri qui est celui que nous honorons ici. Nous qui vivons sur cette terre, nous devons honorer notre culture. Nous ne devons pas nous laisser influencer par d’autres qui veulent que nous l’abandonnions, pour nous convertir à leur religion».

 

Dans son témoignage sur le Vodou, la sociologue et féministe, Jessie Chancy Manigat, nous livre ses expériences sur les traditions ancestrales haïtiennes en es termes: «J’ai aussi été frappé par la dimension Culturelle, l’esprit d’entraide, de tolérance…Le machisme me dérangeait…et continue de le faire. Par contre, la lutte contre l’homophobie est très présente dans le Vodou. Cela me fascine».

 

Difficile de parler de Vodou en Haïti, au cours des deux premières décennies du nouveau millénaire, sans prendre le temps de lire ou d'écouter Fernand Bien-Aimé, l’ancien serviteur de Lakou Souvenance Mystique. Il raconte que : «Les tambours Asòtò sont très mystiques. La danse Asòtò est l’une des plus belles. Il se pourrait que nous soyons les seuls à avoir cette danse. On ne bat pas le tambour Asòtò comme les autres: les danseurs ne font qu’imiter le battement des tambours. Leur forme est également différente de celle des tambours utilisés dans les autres cérémonies».

 

Dans le système de justice traditionnel en Haïti à travers le Vodou, l'Empereur Bizango et hougan, Peterson Dajeanson, informe que : «Ces sociétés fondent leur travail sur la formation mystique et sociale de leurs membres. Ils apprennent les propriétés des plantes et comment les utiliser afin qu’ils puissent protéger leurs communautés quand il y a danger. Beaucoup de gens pensent que les Bizango sont des cannibales. C’est absolument faux », conclut le prêtre.

D'une autre figure importante dans la recherche scientifique et les cultures ancestrales, le docteur Ginette Pérodin Mathurin souligne que: «Les vêvê jouent un rôle clé dans les cérémonies Vodou. Quand un vêvê est tracé, il attire une charge d'énergie à l'intérieur du péristyle qui s’unit aux vibrations des personnes qui s’y trouvent. C’est alors que les initiés peuvent tomber en transe...ils sont montés par les lwa. Ils peuvent alors voir des choses que nous ne pouvons pas voir, dans les temps lointains».

 

Dans une mise en page et graphisme exécuté par Lys Ambroise, de Promundia Haïti, l’impression réalisée par EXL Consulting Group, et achevée d'imprimer en octobre 2013, cette publication autour des connaissances du Vodou sur une vision du monde, s’impose comme un véritable répertoire, un aide mémoire, et un miroir, pour nous regarder à travers les images et les messages des initiés, dont la majorité d’entre eux a déjà fait le grand voyage.

Dans un souci de partager les connaissances du Vodou au plus grand nombre, les principaux sites culturels et les modes d’expressions proposées dans cet ouvrage, les œuvres d’art et l’art sacré, les décors et l’ambiance des Lakou permettront de mieux découvrir en dehors des paroles sacrées, les vérités et les réalités qui confirment l'authenticité et le pouvoir du Vodou.

 

Dominique Domerçant

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