À quand le classement des riches familles solidaires des masses en Haïti ?

Dans de nombreuses villes, parfois très reculées en Haïti, certaines des maisons modestes construites pour des habitants du village, des écoles communautaires et professionnelles accueillant plusieurs centaines d'écoliers, et des centres de santé offrant un minimum de services, parmi d’autres activités qui participent au développement local et communautaire sont souvent l’œuvre des membres de riches familles qui évoluent en Haïti, et ne sont pas toujours le fruit des ONG international. Face à ce processus de déshumanisation accéléré (génocidaire, suicidaire et fratricide) que connait le pays ces dernières années, nous devons commencer par apprendre à apprécier les rares bienfaits consentis de part et d'autre, qui peuvent confirmer que les Haïtiens d'en haut et d'en bas ne sont pas toujours des frères et sœurs ennemis. La solidarité demeure fertile et vivante entre les classes sociales malgré tout, malgré nous !

Dans la liste des acteurs du secteur humanitaire en Haïti, en dehors des politiques publiques garantissant certains accompagnements et assistances sociales venant de  l’État, des ambassades et des ONG, elles sont nombreuses les familles qui investissent une partie de leurs recettes ou bénéfices au profit des plus faibles et des plus vulnérable en Haïti. Quelles sont ces riches familles qui ne font pas de publicité malgré tant d'investissement dans le social en Haïti ? Pourquoi et comment classer les contributions sociales et philanthropiques avec  les noms des donateurs, afin d'encourager les autres riches familles à suivre l'exemple ? Pourquoi  certains des bénéficiaires directs et indirects,  dans la grande majorité des cas, ne font pas assez mention de l'aide reçue ou des noms de leurs bienfaiteurs, souvent inconnus et mal connus  ?  

Dans ce pays qui dispose la mentalité du marronnage et la culture de l'intelligence malsaine, parmi les normes traduites dans les comportements individuels et les relations entre les classes sociales, les membres des masses comme des élites se livrent parfois dans des critiques et des accusations pas toujours fondées, pour tenter d'afficher une certaine moralité, tout en se détournant de leurs responsabilités dans le chaos actuel et malgré les écarts et les fossés qui existent dans le niveau de vie entre les masses et les élites. Pourquoi faut-il mesurer les bonnes actions venant des membres du secteur privé et les riches familles en Haïti, en temps normal comme en période de crise et des catastrophes naturelles ?  Pourquoi faudrait-il accorder plus de visibilité aux organisations philanthropiques de la société civile haïtienne, aux fondations et aux initiatives solidaires qui participent à la promotion de la solidarité et du vivre-ensemble dans le pays ? 

Dans le marronnage des riches, qui est parfois une forme d’humilité, d’humanité ou de protection pour ne pas se laisser envahir par un nombre incalculable et imprévisible des personnes en situation difficile, il faut toujours saluer ces gestes qui servent à confirmer que toutes les personnes riches en Haïti ne sont pas à la base de la misère des masses, encore moins insensibles à la souffrance des plus vulnérables. Combien de patrons financent un ou plusieurs de leurs employés régulièrement, lors des situations de maladies, des funérailles, en dehors des problèmes de loyer, d’écolage des enfants sans faire écho de leurs gestes ? Quels sont les autres entrepreneurs issus des riches familles qui subventionnent des projets communautaires dans l’environnement immédiat de l’entreprise et dans des zones très éloignées, sans exiger de la publicité en retour ? 

Dans le marronnage des bénéficiaires en retour, ces derniers en dehors de l'engagement pris pour ne pas attirer plus de regards sur leurs donateurs, profitent bien de cette situation pour s'offrir à d'autres bienfaiteurs sans avoir à se justifier autour des dons déjà reçus. Parfois, cette forme de marronnage des bénéficiaires prend la forme des critiques lancées contre les donateurs moins généreux jusqu'à placer tout le monde dans le même lot. Le plus grand nombre des bénéficiaires ne manifestent toujours ouvertement leur marque de réciprocité, de reconnaissance ou de remerciement à travers une lettre, une plaque et d'autres supports. Quand certains ne vont pas jusqu'à insulter leurs donateurs ou bienfaiteurs. Combien de mains venant des autres classes sociales ont été piétinées après avoir offert leurs aides à des plus faibles qui cultivent la théorie : «Gran mèsi chen se kout baton » !   

Détrompez-vous mes amis, toutes les personnes issues des riches familles en Haïti ne sont pas toutes des corrompues et des criminelles qui ne se soucient pas des besoins des plus faibles et du plus grand nombre. Les membres du petit personnel de leurs maisons, certains chauffeurs, des employés figurent parmi les grands bénéficiaires de la solidarité des patrons souvent racistes, mais qui savent comment protéger leur arrière. Dans chaque famille, chaque institution et chaque classe sociale, on retrouve autant des bons que des méchants qui se complètent, qui se confondent, qui se croisent dans des gestes humanitaires. À quand la publication d'un classement des riches familles et des entreprises qui investissent dans le social de manière à réduire la misère dans le pays ? Pourquoi faudrait-il encourager une plus grande communication autour des investissements solidaires, des actions humanitaires, et de l’engagement social des riches envers les plus faibles, sans humilier ces derniers ?  

 

Derrière la distribution de la drogue, des armes, et d’autres produits nocifs pour la jeunesse haïtienne  par des membres d'une certaine élite dans les quartiers précaires en Haïti, comme souvent les médias traditionnels et sociaux le mentionnent dans l'actualité, il existe parallèlement d’autres distributions plus valorisantes qui méritent une plus grande attention. Pourquoi ne pas classer chaque année en Haïti, les riches familles et les grandes entreprises qui distribuent des matériels scolaires et sportifs dans les quartiers les plus pauvres du pays ? Pourquoi les anciens sénateurs et députés tardent à voter des lois visant à accompagner et à encourager les entrepreneurs et les entreprises qui se livrent dans des solidaires, en tant que philanthropes et mécènes ? Combien de bourses d'études locales et internationales, les patrons du secteur privé haïtien (à titre personnel et à travers leurs institutions) financent, accordent ou subventionnent pour des jeunes des quartiers pauvres, les enfants de leur personnel de maison ou de l'entreprise,  chaque année  ?

 

Dans les hauteurs de la commune de Pétion-Ville, en passant par quartiers et des villes comme Pernier, Tabarre, Delmas,  Turgeau, à l'intérieur de la ceinture des bidonvilles qui entoure la capitale haïtienne, pour arriver dans les quartiers de Cité Soleil, La Saline, entre autres,  quels sont les noms des hommes et des femmes d’affaires évoluant en Haïti qui sont associés à la construction des écoles et à d'autres projets communautaires et sanitaires ? En publiant ces informations et en affichant ces contributions, les riches parents ne font que protéger certains de leurs biens, tout en garantissant un meilleur avenir pour leurs proches face aux éventuelles menaces et colères de certains groupes issus des masses qui vont certainement se rappeler des noms de leurs bienfaiteurs et des donateurs connus de tous. 

 

Dans l’état actuel de la situation critique que connait le pays  à l’approche du 220e anniversaire de l’Independence nationale, même si l’exemple doit toujours venir d’en haut, on ne peut pas uniquement responsabiliser les riches par rapport à leur appétit excessif pour accumuler des richesses au détriment du plus grand nombre. De l’autre côté des masses, il faudrait également interpeller la conscience et l’intelligence des plus faibles sur les conséquences de certains choix, des pratiques autodestructrices, des comportements irresponsables et la manières de faire ou de voir l’autre en face. Plus que jamais, il faudra définir une politique d'éducation populaire nationale inclusive pour former autant les riches et les masses sur le vivre ensemble, le bien commun, la responsabilité partagée, l'éthique, l’entraide et la stratégie pour créer de la richesse de façon responsable et profitable à tous les acteurs.  

Dans ce prochain classement qui proposera un premier bilan des actions humanitaires et philanthropiques des plus riches en Haïti, il ne s'agira pas d’identifier uniquement les noms des familles, des patrons, propriétaires des plus importantes entreprises du pays, notamment  des banques, des industries, des compagnies d’assurances, des importateurs de produits pétroliers, de matériaux de construction, et des produits de luxe, des concessionnaires de véhicules, de motos et de génératrices, des grands propriétaires terriens, entre autres. Ce classement devra offrir  l’occasion d’identifier également le profil social et le capital économique de ces familles, leurs origines raciales et leurs appartenances religieuses, le niveau intellectuel et les valeurs citoyennes, solidaires et humanistes de l’ensemble de ces bienfaiteurs et leurs familles retenues dans le classement et qui choisissent de faire d'aider les plus faibles en toute ou trop de discrétion.  

Dénoncer la méchanceté humaine, les violences économiques, sociales et morales,  l’exploitation abusive des plus vulnérables, l’irrespect des droits des plus faibles par les plus forts sont autant de plaidoyers à supporter, pour l'harmonisation des couches de la population haïtienne. La promotion et la publication d'un classement officiel des initiatives positives et solidaires venant du secteur privé haïtien représentent une des meilleures innovations sociales  en matière d'intervention sociale à encourager. Haïti a grand besoin de s'imposer une culture de reconnaissance et de valorisation des moindres actions positives et humanistes venant de tous les secteurs. Les médias doivent commencer par montrer la voie autant aux plus faibles qu'aux plus forts, qui choisissent d'investir dans le bien commun et le vivre ensemble.    

Désormais, avec la communication qui va accompagner l’organisation du classement annuel en Haïti, de la solidarité des plus riches à l’égard des plus faibles, dans une approche responsable, respectueuse et réciproque, le grand public sera informé des noms de ces hommes et femmes entrepreneurs solidaires, des noms de leurs familles humanistes qui choisissent de s'enrichir et d’investir en parallèle dans le social. Quelles sont les familles et les entreprises qui disposent des plus actives et dynamiques des fondations qui accompagnent véritablement et valablement les couches les plus vulnérables de la société haïtienne ? Et si les bénéficiaires commençaient par apprendre à remercier et à honorer leurs bienfaiteurs et leurs donateurs ouvertement ? En faisant porter certaines distinctions, institutions, des salles de classes, des salles de réunions ou de travail, des sièges et des bureaux, des places publiques et des monuments, les noms de ces femmes et hommes empathiques et solidaires, des humbles et humanistes bienfaiteurs qui sont, pendant trop longtemps, restés inconnus.   

 

Dominique Domerçant

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