Haïti et la violence programmée ! Trop, c’en est trop !

La situation d’insécurité actuelle en Haïti est alarmante, préjudiciable au bien-être de la population locale et catastrophique pour le plein épanouissement des Haïtien.ne.s. Le dernier cycle croissant de violence dans le pays, depuis 2018 lors des affrontements entre gangs rivaux, a donné lieu à des massacres, des séquestrations et des enlèvements dont le bilan en coûts humains et matériels est extrêmement considérable.

Le dernier rapport du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH), organisme des Nations-Unies, effectué le 15 mars 2023 présente un bilan catastrophique de la situation sécuritaire et humanitaire en Haïti. Ce rapport présente un bilan total de 531 personnes qui ont été tuées, 300 blessées et 277 kidnappées depuis le début de l’année 2023. Il importe de souligner à l’encre rouge que la reconduction de cette insécurité programmée au moment de ce vide constitutionnel et institutionnel (absence du parlement, de la présidence et des collectivités territoriales), nous fait vivre un passage sans précèdent de l’histoire du peuple haïtien. Il s’agit de la confrontation d’un laxisme et d’un mépris de la part des gouvernants et gouvernantes.  À cela s’ajoutent des palabres interminables de la Communauté dite internationale avec les groupes politiques de négociation autour d’un pays déjà affaissé par toutes sortes de dissentions internes et de précarisations poussées des groupes sociaux minorisés.

L’escalade de violence enregistrée ces derniers mois avec l’attaque progressive de nouveaux territoires par les groupements armés engendre une situation qui frise un ordinaire malaisant, et suffisamment corsé pour casser psychologiquement tout un chacun. Cet état des choses alimente la peur chez la plupart des enfants scolarisés qui voudraient emprunter les chemins de l’école, mais qui nichent à la maison à vivre leur vie d’adulte, dans la peur des gangs. Si le pays continue à produire une cohorte de piètres élèves, ces derniers temps, les observateurs avisés pourront fièrement remercier le parti politique PHTK au pouvoir. Ce regroupement politique au pouvoir depuis plus de dix ans a dans sa gestion calamiteuse du pays poussé à bout les vies des citoyen.ne.s. Il a également poussé les dos des jeunes vers d’autres contrées où la vie n’est pas forcément plus sûre face au mauvais cocktail du terroir fait d’instabilité alimentaire, sécuritaire et politique dans lequel ils-elles sont plongé.e.s depuis des lustres. Oui, cela a trop duré ! Des assassinats notoires et des enlèvements exténuants sont le lot quotidien de citoyen.ne.s qui risquent d’accueillir une balle perdue sur leurs toits. Les enfants sur les bancs d’écoles ne sont pas non plus épargnés par cette situation inqualifiable, jonglant entre kidnapping et mal-être quotidien. Haïti se transforme de manière progressive et accélérée en mouroir, sous les regards impassibles des dirigeants politiques. Ceci est relaté dans la dernière note du Ministère de la Justice et de la Sécurité publique, du 6 mars 2023, qui, sur un ton décomplexé, rappelle aux Haïtien.ne.s que les articles 272 à 274 du Code pénal haïtien leur permettent de mobiliser leurs aptitudes et leurs armes au combat face aux groupes armés, au cas où ces derniers décideraient sur un coup de tête de les attaquer dans leurs maisons. La prégnance de l’insécurité et du manfoubisme politique obligent les institutions étatiques à adopter des positions malencontreuses pour faire face aux incontrôlables bandits. Ce thriller de mauvais gout est hallucinant. Par exemple, la déclaration de la ministre, au double portefeuille de la Culture et de la Communication ainsi que de la Justice et de la Sécurité publique, Emmelie Prophète Milcé de clamer haut et fort qu’elle ne foulerait pas le sol du quartier de Martissant la semaine dernière, est insolite. En effet, la ministre lors d’une interview le 21 mars dernier avec le journaliste Yvenert Foesther Joseph sur la radio RSF a précisé que le quartier de Martissant occupé depuis au moins deux ans par des gangs armés est un territoire perdu de la superficie d’Haïti. Donc, sommes-nous en face de plusieurs territoires perdus parce qu’il existe de nombreux quartiers occupés par des gangs armés dans le pays ? Ou encore, n’est-ce pas un signe d’incompétence, de laxisme et d’incapacité des autorités gouvernementales qui s’installent confortablement dans les ministères à résoudre la crise haïtienne ? Or, ces incapables continuent de jouir de leurs salaires et autres frais faramineux qui atrophient les fonds publics, tout en ayant le moindre souci du collectif et de la gestion de l’urgence humanitaire. Cette inertie du gouvernement actuel est visible par une population locale qui n’a d’autres recours que ses propres stratégies de survie. Oui, je prends la liberté de dire que protéger la vie de ses concitoyen.ne.s, comme ministre ou Directeur général, se révélerait être une urgence plus grande pour toute personne ayant un minimum de bon sens, que la tenue du carnaval qu’elle soit parcellisée, régionalisée ou fantomatique. Les festivités carnavalesques n’ont pas empêché la poursuite des crimes dans le pays. En effet, les associations de défense des droits humains et les Nations-Unies continuent de condamner les conflits armés complexes et insensés des bandits armés, ainsi que les violentes attaques des populations civiles. Des déclarations auxquelles la population est habituée et qui ne font rien bouger. Comme preuve, la proposition du gouvernement haïtien aux pays du Core Group ou des Nations unies de déployer une force militaire de maintien de la paix chargée de protéger les populations civiles et de reprendre le contrôle des quartiers contrôlés par les gangs armés est rejetée plusieurs fois par ces états soi-disant pays amis d’Haïti. Ce cercle vicieux qui propose plus d’une fois son potentiel soutien à la Police nationale d’Haïti (PNH) a aussi signé ses lettres de noblesse depuis l’année dernière en faisant passer la vie des Haïtien.ne.s comme quelque chose à négocier au rythme des pas d’une tortue, sur le long terme, à la queue le leu. Des dizaines, des centaines des compatriotes meurent sans inquiéter nullement, que ce soit de faim ou par balles. La tranchante vérité est que les Haïtien.ne.s meurent en pleine insouciance des pantins de la cité. Doit-on les laisser vivre ces gens du peuple, pour parler comme Maurice Sixto ? Ont-ils-elles le droit d’envoyer leurs enfants à l’école ? Méritent-ils-elles du carburant, ces anciens captifs et asservis qui ont osé questionner l’Occident des Lumières et son système colonial et esclavagiste si juteux pour ces colons-sbires ? D’ailleurs, on sait tous et toutes combien les anciennes missions internationales ont asphyxié Haïti et alourdi le nombre de filles et de femmes victimes de violences sexuelles dans ce pays. Ces missions onusiennes n’ont-elles pas contribué à la décapitalisation du budget national ? Bien que cintrés de toutes parts, on doit se faire à l’idée que ce ne sont pas ces pays amis qui sortiront Haïti du gouffre ni qui pleureront son sort à coup de sanctions fluides. Ce ne sont pas non plus ces décideurs internationaux et leurs alliés nationaux qui, en protégeant leurs postes et privilèges aux pouvoirs par tous types de stratagèmes, ne cesseront de nous imposer des élections frauduleuses et périlleuses. Les Bandi legal et leurs patrons internationaux ne sont pas des amants d’Haïti.  


Les conséquences humanitaires sont énormes avec les déplacements des dizaines de milliers de personnes obligés de fuir leurs maisons pour aller vivre dans des endroits secrets de la région métropolitaine de Port-au-Prince et d’autres villes du Département de l’Artibonite. Comme preuve, le rapport du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH), précise : « la violence sexuelle est également utilisée par les gangs contre les femmes et les filles pour terroriser, soumettre et punir la population. Les membres des gangs ont souvent recours à la violence sexuelle contre les filles enlevées pour pousser les familles à payer une rançon ». Récemment, depuis l'attaque de leurs quartiers en 2023, les femmes, les hommes et leurs enfants paient la lourde tribu du laxisme des dirigeants qui à force de faire du « Bandi legal » aux commandes de la République, en arrive à transformer le pays en une République des gangs armés. Sinon, en une république de voyous avec toutes les mirages extérieurs, dont le fameux programme Humanitarian Parole communément appelé Programme Biden, panaché de l’heure, qui soulage les familles certes, par le fait de permettre à un minime groupuscule d’Haïtien.ne.s d’aller respirer loin de l’enfer du terroir. Oui, mais… Petit rappel avec environs 12 millions d’habitants, qui ne pourront pas tous faire des adieux à cette terre qui est la leur, ce pays continue à se transformer en une véritable « savann » où l’on force les citoyen.ne.s à être des soldats, les enfants à se revêtir d’un manteau de guerrier et les bébés à dormir non avec des comptines, mais avec le chant des balles. Et parfois, c’est avec la voix grognant des bandits qui parfois encerclent les maisons, tout en planifiant le viol de maman, de la tante, de la sœur ou d’une cousine germaine dans l’enceinte familiale. Il s’opère une fragilisation du tissu social, mais aussi de la santé physique, mentale et émotionnelle où des traumatismes s’installent dans le corps des gens. Ces situations intenables pour la psyché humaine se cristallisent dans notre pensée avec les vidéos terribles des gangs qui sans être inquiétés le moins du monde divulguent leurs exploits sur les réseaux sociaux. Trop c’est trop ! Trop pour nos petites têtes ! Trop pour nos Hommes ! Trop pour nos Femmes ! Trop pour nos mères et grands-mères ! Trop pour nos petits enfants ! Trop c’est trop ! Cultiver la honte nous a assez coutés et nous coutera toujours notre humanité ! Cultivons la fièvre de notre colère trop légitime pour se tenir tranquille dans des salles cozy avant qu’une balle perdue dégaine sur nos peurs ! Tuons la honte, sinon la honte nous tuera !

 

Jeanne-Elsa Chéry

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