Brouillard sur l'écran du radar de la gouvernance haïtienne

Beaucoup croient qu'Haïti n'est pas gouvernée en raison de la trajectoire erratique continuelle de son évolution dans le temps. Ici, nous analysons le modèle économique et le système symbolique justifiant cette trajectoire erratique. Une trajectoire qui est un processus performant de défaillance conçu par des pirates stratèges exploitant les failles dans les écosystèmes pour leurs succès.

Un épais brouillard étend ses tentacules sur l’écran du radar de la gouvernance d’Haïti. Dense et ténébreux, cet enfumage voile l’horizon, et obscurcit la vue des capitaines qui pilotent le navire national haïtien. Cette brume, géostratégiquement provoquée, est si épaisse et intense qu’elle fait errer la stratégie de l’indépendance haïtienne, en la déviant de la voie qui était la sienne. Voie vaillamment conçue, il y a 217 ans, par des anciens esclaves qui, du fait de leur profonde humanité, s’étaient révoltés contre la barbarie occidentale, et avaient forgé le projet d’un navire national pour conduire le collectif haïtien au port des peuples libres et dignes.

 

L’esclavage en fréquence mémorielle fossilisée et fissurée

Un port qui semble de plus en plus inaccessible, puisque les pirates, héritiers, par filiation ou allégeance, des anciens colons, se sont approprié le projet du navire haïtien et l’ont sabordé. Ils se sont accordés avec des puissances ennemies pour éloigner le collectif haïtien de la voie initialement conçue pour atteindre la dignité et la liberté. En effet, la traitrise, la médiocrité et l’indignité des générations qui se sont succédé en Haïti, au lendemain de l’indépendance, ont compromis durablement l’idéal de liberté, de dignité et d’humanité qui était associé à cette fulgurante épopée de 1804. Mais, comme on le sait, les fulgurances n’ont vocation à perdurer que si la flamme de leur légende est entretenue dans le temps avec constance, courage, clairvoyance, conviction et cohérence. Or, vivant dans le culte des légendes d’ailleurs, fascinés par les projections contrastées de rêves blancs et de cauchemars noirs, les marrons de la précarité, en générations insignifiantes de l’Haïti post indépendance, se sont constitués, sur leur propre terroir, comme des réserves abondantes et nauséabondes de fumier.  Entretenu pour être disponible toutes les saisons, ce fumier humain sert de contre feux pour, selon le contexte, tantôt aveugler, tantôt enfumer la légende de l’indépendance, en servant des intérêts géostratégiques contraires aux intérêts nationaux.

Ainsi, pendant 217 ans, s’est imprimée, dans le temps de l’histoire et dans la mémoire des hommes, une longue mélodie continument défaillante pour Haïti. Une mélodie qui laisse rythmer, en contre haut et en contre bas, les échos angoissants et assourdissants d’une éloquente médiocrité. Mélodie qui rejoue la balade de l’esclavage où tout reste perverti, déstabilisé, enfumé et dévoyé pour le collectif noir au fond de la cale du navire, tandis que des réussites individuelles se sont multipliées pour les insignifiants se trouvant sur le pont avant. Il est manifeste que des gages, des prix, des ressources ont été distribués, à qui en voulait, pour saborder de l’intérieur le projet du navire national haïtien. Un navire-fantôme dont la gouvernance ne cesse d’errer entre des cycles qui laissent résonner des fréquences mémorielles indigentes : mémoire déshumanisée et fossilisée par l’esclavage ; mémoire morcelée et fissurée par l’indignité des réussites précaires. Voilà la gamme de l’harmonie de la défaillance haïtienne, telle que jouée par la chorale philharmonique des affreux armés, des insignifiants diplômés et des insouciants opulents déracinés.

Évidemment, c’est dans le spectre du référentiel musical blanc que cette gamme indigente a été extraite. Car, au fond, rien n’a vraiment structurellement changé en Haïti, entre le temps ancien où les colons régnaient sur St Domingue et celui d’aujourd’hui où les ONG, les agences internationales et leur armée d’universitaires, de managers et d’experts obsolètes et/ou insignifiants assurent la relève de la barbarie par des voies détournées. L’homme noir n’existe encore, dans certaines consciences effondrées et racisées, que comme accessoire d’expérimentation pour le blanc. Si vrai que les stratégies, pour les peuples noirs, au sud de la vie des institutions occidentales, culturellement pétries de racisme, restent invariantes du point de vue de leur potentiel barbare.

Qu’ils viennent en bourreaux esclavagistes ou sous fausse bannière humanitaire, c’est toujours en projection enfumée de rêves blancs et de cauchemars noirs que les stratèges occidentaux imposent leurs injonctions à Haïti. En 1994, ils étaient 20 000 soldats et plus de 5 000 experts venus restaurer la démocratie, après que le trident maléfique, USA-France-Canada, avait détérioré le pays par les Duvalier et les militaires aidant, pendant plus de 30 ans. Et comme c’était la saison des impostures du Rule of Law, ils nous avaient promis l’État de droit. Mais, dans les faits, ils ont instauré un état de passe-droits pour leurs experts de service et leurs hommes de main locaux. Ainsi, ils ont structuré des gangs armés dans la Police et ont sabordé le radar de la gouvernance de la justice en soudoyant de petits experts nationaux qui ont joué, toute dignité abattue, toute intelligence en berne, les portefaix droits de l’hommistes s’acharnant à faire obstacle à toutes les voix dissidentes qui dénonçaient l’insignifiance de ces projets.

C’est cet édifice institutionnel, renforcé sur des « supports septiques », dans les basses eaux d'expertise des différentes missions onusiennes comme la MICIVIH, la MANUH, la MIPRONUH, la MINUHA, la MINUSTAH, la MINUJUSTH, le BINUH, qui s’effondre aujourd’hui comme une indigence pour révéler la structure de la criminalité de la société haïtienne. Et comme l’effondrement s’est fait à marée basse, il s'en dégage une puanteur exotique qui chatouille les narines blanches trop prudes des experts occidentaux et les obligent à foutre le camp en laissant Haïti dans la merde qu’ils ont entretenu pendant des années. Et comme d’habitude, ils attendront les saisons de marée haute, quand le fumier merdique sera séché par le soleil, pour revenir avec de nouvelles impostures démocratiques, de nouveaux titres académiques, de nouvelles médailles de légions d’honneur, de nouveaux prix littéraires et cinématographiques, de nouvelles nominations et promotions dans des Organisations Non Utiles (ONU) et de nouvelles subventions pour les nouveaux insignifiants. Ainsi se perpétue le cycle de l’indigence haïtienne dont la version actuelle accorde des pleins pouvoirs diplomatiques aux gangs. Or, on se souvient que l’ONU, le CoreGroup et l’incontournable ambassade des États-Unis en Haïti avaient déclaré illégal et terroriste, avant de mettre en déroute, le groupe de policiers syndiqués qui réclamait de meilleures conditions de travail et de vie pour les policiers haïtiens.

Faut-il vraiment se demander pourquoi le G9, les 400 mawozo et les autres gangs qui, au contraire, terrorisent la population ne sont ni inquiétés ni déclarés illégaux ni assimilés à des groupes terroristes ? Faut-il encore douter que le kidnapping des missionnaires américains (comme l’a été d’ailleurs celui des religieux français) par les gangs haïtiens ne soit qu’une partition de la symphonie diplomatique de la défaillance modulée pour Haïti ? Faut-il insister à dire que les dénonciations relatives à l’existence d’un laboratoire qui programme les crises au sud de la vie pour créer un marché de services pour des experts obsolètes au nord ne relèvent pas du complotisme ?

Évidemment, comprendre cela demande une grande intelligence analytique, et l’énoncer comme un axiome suppose un grand courage éthique. Intelligence analytique et courage éthique, deux valeurs extrêmement rares dans l’écosystème haïtien ; lequel est de plus en plus réglé sur une fréquence mémorielle de basses eaux culturelles et modulée en minimum insignifiant. 

 

L’évangile du colonisateur bienfaiteur remis au gout du jour

Pourtant, tous les signaux anticipatifs convergent vers ce qui n’est qu’une mise à jour de l’évangile du colonisateur bienfaiteur. Tandis que les Occidentaux sèment le chaos en amont pour déshumaniser les peuples du sud par la précarisation permanente, ils profitent de ce même chaos en aval pour imposer leurs injonctions dominantes. Mais c’est encore mieux quand cette injonction résonne à travers des voix endogènes autorisées : voix de dignitaires académiciens, voix de littéraires courtisans, voix de partisans joyeux, gais et bien-pensants. Ainsi la domination se fait plus subtile et même plus efficace en s’adaptant aux impostures « droits de l’hommiste » du temps. Ainsi le colonialisme est remis au gout du jour pour mieux invisibiliser le racisme structurel : quel monde parfait que celui qui reflète l’harmonie d’une diversification culturelle où des noirs accèdent aux mêmes titres que les blancs. Le tout est de savoir où trouver les bons noirs, puisqu’ils ne se dissimulent plus derrière des masques blancs, depuis que Frantz Fanon a révélé la supercherie.

C’est là que le chant réactionnaire du révisionnisme colonial intervient comme un Habemus Piratam : Ainsi, tel noir des Caraïbes qui exècre Jean Jacques Dessalines et le transforme en sanguinaire dans des récits de promotion occidentale a toutes les chances d’accéder à l’immortalité littéraire ; tel noir du continent africain, qui, en un trait de plume, noircit d’encre l’Afrique pour enlever aux colons leur immonde responsabilité dans le trafic déshumanisant des nègres a toutes les chances de s’offrir au détour un bon renom littéraire. Telle actrice réputée libertine et livrant des échos de ses engagements gais comme autant de legs et de biens aux femmes caribéennes a toutes les chances d’être nominée aux festivals des arts.

Pour peu que l’on écoute avec attention et anticipation le tempo de l’évangile qui dit l’harmonie du monde, il ne peut nous échapper l’évidence que tout est imbriqué dans une parfaite ambivalence. Tout est rythmé pour que les noirs en sortent stigmatisés, amoindris, déshumanisés, et que les experts occidentaux apparaissent comme les sauveurs, les pacificateurs, les bienfaiteurs. Ainsi fonctionne le processus de l’assistance : on ne peut renforcer que ce qui a été diminué, affaibli, amoindri. Et on aurait tort de croire que c’est seulement par les armes qu’on soumet les peuples à l’affaiblissement. Depuis la guerre du Vietnam l’occident a compris que la puissance des armes n’est pas toujours déterminante dans les guerres, aussi s’est-il arrangé pour fédérer autour de ses intérêts une communauté de gens, venant de toutes les contrées du monde, et ayant en commun une même particularité : des êtres déracinés de leur terroir et prêts à résilier leurs engagements et leurs responsabilités envers leur pays pour défendre, envers et contre tous, de petites réussites personnelles qu’ils font passer pour des valeurs universelles.  

Donc quand on veut trouver les causes de certaines errances, de certaines stagnations, de certaines défaillances anthropologiques, on peut se mettre à écouter la mélodie chantée par ceux qui, dans ces collectifs, voient la vie en rose sur fond de succès médiatisés. Ces succès, étant toujours des gages octroyés à ceux qui aident à saborder la gouvernance de leur pays pour des intérêts transnationaux, ils contiennent des signaux anticipatifs ou déductifs qui annoncent ou expliquent de grandes catastrophes collectives. Même si au fond tout est fait pour que la défaillance retentisse, de Haïti à l’Afrique, comme le murmure de ces mots, dit-on bibliques, qui ont initié les maux des peuples noirs : premier tu as été, dernier tu seras ; de dignité, tu n’en auras point, et de la mémoire de l’humanité, tes légendes seront effacées. Comme si on voulait nous inculquer l’abominable idée qu’une certaine malédiction émerge toujours là où les peuples noirs accèdent à la liberté et assument, par leur insoumission, leur dignité.

 

La gouvernance programmée selon la loin des cartels

Pourtant, cette défaillance n’a rien d’une fatalité. Car les légendes des peuples ne sont pas éternelles, elles meurent dans le temps, sous la cendre cumulée par les réussites produites par enfumage. Et c’est pour entretenir ce fumier intemporel que des précarités sont semées en amont, et des succès donnés en aval, ou inversement, pour intensifier le brouillard qui fait errer certains collectifs. De fait, les marins aux commandes, sur le pont du navire haïtien, ont été retournés, et ont pris un imprudent itinéraire. Escroquerie aidant, ils ont cassé la boussole d’orientation et fracassé le navire qui file droit vers les abysses. Que ce soit à bâbord ou à tribord, à gauche ou à droite, aucune manœuvre adroite et habile ne semble plus possible pour redresser la gouvernance erratique haïtienne. 217 ans de navigation à marée basse, à brouillard intense, à vue réduite, à improvisation répétée, à corruption médiatisée, à conscience effondrée, à dignité vendue, ça épuise et use un collectif. Le choc final semble inévitable, l’extinction anthropologique du peuple haïtien est en instance de maturation. Un lent pourrissement s’est installé dans la mémoire collective qui ne peut plus produire les résonances des arbres musiciens. Et, au rythme d’un chant lancinant, hors du temps, le peuple haïtien agonise.

Pourtant, malgré les soubresauts, les inondations, les violences sociales, la détresse collective, la misère infrahumaine, l’exode massif, les défaillances institutionnelles de ces 70 dernières (pour faire court), il n’y a eu, pendant qu’il était encore temps, aucune volonté du leadership national, si tant est que le dealership managérial qui dirige Haïti en soit un, de redresser la barre, de changer de cap, de repenser l’errance de la gouvernance. Mieux même, les associations patronales et les chefs d’entreprise du secteur privé, ayant pris goût aux réussites indigentes que procurent les mauvais arrangements et le règne de l’impunité, se sont syndiqués en cartels d’entrepreneurs, parfois fédérés, parfois rivaux, et là protégés par la couleur de leur peau, par leur passeport étranger, par leurs accointances diplomatiques, ils ne jurent que d’acquérir davantage de monopole sur ce territoire en déshérence. Ainsi l’économie haïtienne, si l’on croit les textes savants du Docteur Pierre Louis Naud, illustre universitaire doctoré de l’Université de Bordeaux, l’économie haïtienne s’est criminalisée tout au long du processus démocratique haïtien, après la chute des Duvalier, avec l’émergence de 3 facteurs entravant l’ effectivité de l’État de droit : « la persistance de la logique esclavagiste dans la société ; la tendance des tenants du pouvoir à considérer l'état comme une propriété privée ; la banalisation de la corruption et des crimes[i] ».

Ainsi on a vu émerger en Haïti de puissants monopoles, notamment après le regroupement des 184 associations patronales, universitaires et de la société civile qui, en 2004, dans leur lutte pour le pouvoir contre le régime Lavalas, faisaient miroiter au peuple haïtien l’avènement d’un nouveau contrat social. Mais grâce à Wikileaks nous savons que ces associations ne répondaient qu’a des injonctions diplomatiques émises en haut lieu. Alors rien d’étonnant à ce qu’elles aient servi, sans doute à l’insu de certains, de porte dérobée facilitant l’avènement du PHTK et de la criminalité. C’est du reste parce que l’intelligence est absente chez les universitaires, chez les politiciens, les socio-professionnels et les lettrés haïtiens qu’ils n’ont pas compris, et ne comprennent pas encore, que l’occident, dans ses institutions culturelles, politiques, diplomatiques, économiques, ne récompense et ne donne de la visibilité qu’aux nègres qui adhèrent à ses injonctions barbares.

Ainsi, pour comprendre pourquoi la gouvernance haïtienne est aussi erratique, on peut aussi se concentrer sur la cartellisation de l’économie haïtienne. Au même titre que la fabrique de la renommée académique, littéraire et artistique comme caution et adjuvant facilitant le triomphe de la criminalité, la structure de l’économie haïtienne, si l’on croit les travaux des économistes haïtiens Leslie Péan[ii] et Fritz Jean[iii], est fondamentalement et essentiellement une économie verrouillée sur la corruption, la paupérisation, la violence et la criminalité. Une économie qu’on peut ainsi cartographier, pardon cartelliser :  

  • Un cartel contrôle les ports et dispose du monopole des importations et des trafics de tous ordres ;
  • Un cartel contrôle les banques et dispose du monopole des devises et des placements financiers ;
  • Un cartel contrôle l’énergie ou plutôt le blackout et dispose du monopole de la vente de kits électriques et énergétiques alternatifs ;
  • Un cartel contrôle les télécommunications et l’internet et a le monopole d’appauvrir la population en lui faisant payer des mauvais services de communication ;
  • Un cartel contrôle les matériaux de construction et fait exploser le prix du loyer ;
  • Un cartel contrôle les concessions automobiles et des pièces de rechange et dispose du monopole de l’escroquerie du transport privé ;
  • Et enfin un cartel règne sur les produits alimentaires et les supermarchés ayant le monopole d’affamer la population par l’inflation.

Voilà l’infrastructure de la paupérisation des masses haïtiennes qui s’accommode de la gouvernance erratique du pays au travers des monopoles octroyés aux riches entrepreneurs de souche étrangère. C’est sur cette infrastructure qu’émerge le modèle économique qui a besoin de la gouvernance de l’errance pour ses succès de performance. Évidemment, cette infrastructure serait non opérationnelle si elle n’avait pas une armée de cadres techniques, de socio-professionnels et d’universitaires pour déployer ses services, assurer sa performance et vanter ses louanges. Ainsi s’est constituée la couche reluisante des services qui enfume la conscience collective, protège le système et assure sa reproduction. Sur cette couche se structurent deux autres cartels, celui des médias, qui a le monopole de la déférence envers les puissants et la charge d’abrutir la population ; et celui des socioprofessionnels et universitaires insignifiants, qui sont formés, diplômés, médaillés et décorés pour renforcer l’État défaillant et servir de caution académique a la médiocrité.  

Ces deux cartels travaillent en symbiose et forment le système symbolique qui représente l’attraction du système. Ici, on ne relaie en contre haut que les signaux forts de l’insignifiance qui ne dérangent pas le modèle économique. Certainement, pour divertir, on laissera résonner en contre bas la parole bonimenteur de quelques poètes et d’étonnants diseurs de bonne aventure. Ils détourneront l’attention du peuple et lui apprendront, contre des récompenses programmées en haut lieu, à s’évader, à rire et à oublier ses malheurs, sans jamais chercher à comprendre ce qu’il lui arrive et encore moins de savoir comment s’en sortir.

L’errance haïtienne est conduite de manière si performante que, d’une commune erreur, les analystes, en viennent à penser que le pays n’est pas gouverné. Pourtant, rien n’est plus faux. Car Haïti est gouvernée selon les codes programmés par des stratèges qui ont choisi la défaillance comme processus performant pour ceux qui travaillent à désintégrer le collectif haïtien. L’insignifiance du peuple haïtien est de croire qu’il peut confier la gestion de son pays, la sécurité de son territoire, le renforcement des institutions, l’éducation de ses universitaires et la formation de ses cadres techniques à des organismes transnationaux et à des étrangers ou des binationaux qui sont les héritiers légitimes et assumés des esclavagistes qui l’avaient réduit pendant 3 siècles en esclavage et des néo colonialistes qui l’ont maintenu en défaillance durant 2 siècles. L’erreur du peuple haïtien est de continuer de fabriquer des élites culturelles qui courent après les prix littéraires, les titres académiques et les distinctions honorifiques, conçus pour le maintenir en insignifiance pendant qu’on foule au pied sa dignité et révoque son humanité.  

La connaissance, le savoir, la culture sont des outils géostratégiques par lesquels des puissances véhiculent leur hégémonie, leur vision du monde et leur soif de grandeur. S’engouffrer dans ces failles culturelles et académiques sans en mesurer les risques, sans stratégie de réappropriation est un acte d’insignifiance et d’indigence. Tous les peuples qui abandonnent leur dignité pour un peu de tranquillité et de confortabilité finissent toujours par perdre leur liberté et leur humanité. Dans ce contexte, la gangstérisation des institutions haïtiennes est parfaitement modélisable et quantifiable au moyen d’une équation multidimensionnelle mettant en évidence, dans le temps, des variables économiques, les variables socio-professionnelles, culturelles et anthropologiques.

Voilà l’axiomatique que nous avons mis en récit dans une sorte de systémisation contextuelle qui cartographie l’errance anthropologique du collectif haïtien à partir de variables structurantes qui problématisent la réalité haïtienne dans ses liaisons défaillantes avec le local et le global. Rien de bien prétentieux, juste une pédanterie communicationnelle qui ne manquera pas de résonner aux oreilles affutées, sachant capter les notes anticipatives, comme une ouverture sur la problématique systémique…ou provocation structurelle pour rester dans le ton de la provocation qui est le mien.

 

Erno Renoncourt

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