Devons-nous continuer à espérer que notre pays va changer un jour?

Ça fait déjà presque 17 ans que je posais la question suivante à Émeline Michel, notre reine de la musique haïtienne:

Faut-il espérer qu’Haïti va changer un jour? Péremptoirement, elle a répondu sans ambages: « si on n’espère pas qu’Haïti change un jour, on a qu’à se tirer une balle à la tête » « Il faut l’espoir ». C’était dans une entrevue sur radio Promo 2000 d’Atlanta, Georgia en 2005. J’étais l’animateur d’une émission culturelle où je tournais beaucoup les chansons d’Émeline. Dans cet entretien, j’ai découvert dans Émeline une femme mûrie de sagesse qui aime son pays d’un amour incommensurable.

Oui, presque 17 années, Haïti a changé certes, mais pour le pire. Le pays a connu des dirigeants et des soi-disant hommes politiques qui ne sont que des voleurs de grand chemin qui on fait fi de toute décence exigée aux hommes de tous les autres pays modernes du 21e siècle. Mais oui, ne vous étonnez pas! Après plus de deux siècles d’indépendance, Haïti devrait être l’une des nations dans le monde à être émulé par d’autres dans le bon sens du terme.

Pourtant, notre nation est peuplée d’individus sans vergogne, sans scrupules, sans conscience. N’était-ce pas l’écrivain Rabelais qui disait « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » dans son œuvre majeure Pantagruel? La situation est devenue comme une gangrène qui se propage avec une vélocité qui dépasse l’entendement. On a qu’à regarder les actes de banditisme qui ravagent nos zones métropolitaines et les villes de province. Les familles haïtiennes sont ruinées par les demandes de rançon exorbitantes que les ravisseurs exigent pour libérer les kidnappés qui,  parfois,  sont déjà appauvris par le coût de la vie dans le pays.

À écouter certaines histoires vraies provenant d’Haïti, on a l’impression de suivre une pièce de théâtre ou les protagonistes s’entraînent d’avance sur comment ils réagiraient s’ils étaient l’objet d’un kidnapping. Voici un extrait préparé et exécuté par un couple en Haïti:

Martine: chéri, bagay yo pa bon menm non nan peyi a! Kisa nou ta fè si ou jou yo ta pran nou?
Jacques: pa gen anyen nou ka fè ! Selman nou ka mete kò nou tou Piti pandan n ap espere bondye ka fè yo lage nou pou de mil dola nap rasanble depi kèk tan pou si sa ta rive nou an.

Martine : E si de mil dola a pa ase? Nèg yo se milyon yo mande kounye a wi !

Jacques : Ebyen cheri nou t ap tou mouri.

 

Comme pour conjurer le mauvais sort, un jour, ce couple était au bas de la ville, quand ils ont vu un véhicule et un individu sur une moto s’approcher deux: « woy yo pran nou ! ».

De jour en jour, les problèmes de notre pays continuent à  faire la une de l’actualité nationale et internationale. Ce pays que bon nombre d’entre nous chérissent tant,  est sujet à toutes les épithètes provenant de la bouche même de chef d’État: « Shit hole », « pays de sida »…ajouter a tout cela, pays de kidnappeurs, et j’en passe. . 

Pourtant, beaucoup  d’entre nous pensent que le pays va changer un jour pour le meilleur. Alors, dis-moi Émeline. Devons-nous continuer à espérer ou doit-on se tirer une balle à la tête?



Auteur: Dugue Dumond, MBA/Journaliste


PDG/Radio Télé Cosmopolite

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