Nos espoirs évanescents

Nous ne rêvons plus. Le cauchemar se fait quotidien. Nos peurs et nos incertitudes gémissent de toutes parts. Sur les réseaux sociaux. À travers les rues. Entre proches. En famille. On n’espère rien. On s’attend à tout : assassinats, balles perdues, occupation étrangère, crise humanitaire inédite, maladies rares, mort subite… Dans une transition sans échéance et sans lendemain, les espérances paraissent gonflées.

 

Dans le contexte haïtien, aucun génie ne saurait définir la normalité. Le dernier évènement « normal » est un souvenir du bon vieux temps. Certes, il y a de nouvelles normalités : faire une croix sur le carburant ou se résigner à le voir au bord de la route sans pouvoir s’en procurer, sortir avec la peur au ventre, appeler quelqu’un plus d’une fois pour s’assurer qu’il est encore libre de ses mouvements ou qu’il continue de respirer, vivre chaque instant avec philosophie et gratitude… En sus du statu quo, nos murs nous entravent avec gentillesse ; sans le dire.

 

Organiser suppose responsabilité. Mais quand tout devient urgent, définir les priorités  peut être une erreur fatale. Céder inopinément aux instances de la survie prend l’apparence d’un choix de vie. Notre détresse est nosocomiale. Oui, oui, nous la tirons d’un  médecin « primate ». À forte dose, il distribue incompétence, insouciance, maladresse, nonchalance et servilité. Résister ou se tirer ? La question ne se pose plus. Prendre soin de soi et agir avec prudence. Voilà un objectif présomptueux, trop ambitieux pour un mortel livré aux gangs. 

 

Citoyens, nous sommes devenus des infréquentables. La paix et la sécurité ne nous fréquentent plus. L’éducation a pris ses distances. Nos enfants n’y ont plus droit. La réouverture des classes est la défaite politique pour certains. À bas l’école ! Seules les survivances de l’indécence, de la débilité et de la bêtise nous jurent encore fidélité. Louvri je nou !   Tout bagay sou kontwòl !

 

On vivra après l’apocalypse. Respirons en attendant !

 

 

Réginald CALIXTE

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