Le procès mondialisé du système capitalisme impérial

Partie I

L’observation et l’analyse minutieuse, du système capitaliste, d’un simple point de vue humanitaire, indique qu’il s’agit, dès le départ, d’un projet « humanicide » D’ailleurs, il est reconnu par plus d’un que le capitalisme[1] peut tout faire, sauf le bonheur de l’humanité. Car dans son essence, il est l’expression parfaite de la négation du bien-être collectif, d’égalité et de justice sociale.  À contrario, ce système se développe aux dépens des intérêts d’autrui. Les deux principales caractéristiques du capitalisme peuvent être, à elles-seules, justifier l’affirmation ci-dessus. Car, la loi fondamentale du capitalisme réside en : la primauté de la propriété privée des moyens de production ; une dynamique fondée sur l'accumulation du capital productif guidée par la recherche du profit. Cette recherche systématique de la plus-value[2] se fait grâce à l’exploitation des travailleurs par les détenteurs des moyens de production en vue de la transformer d’une partie de cette plus-value en capital[3]. Par exemple, pour se développer, après l’esclavage et le travail forcé, le capitalisme a « enfoncé dans la plaie », à travers les mécanismes d’accumulation primitive du capital, tel qu’il est expliqué par K. Marx dans les chapitres 26 à 33 du livre 1 du capital[4], tout le fondement du capitalisme s’assoit sur le vol, l’exploitation et la domination d’autrui, pour ainsi dire, sur l’assujettissement ou encore sur la déshumanisation, purement et simplement, de l’espèce humaine.  En fait, en établissant les bases de la révolution industrielle du XIXe siècle, Marx a montré clairement comment ce système capitaliste a ses jalons dans le l’esclavagisme, son ancêtre légitime et dans l’accaparement des biens du domaine public de l’État aux dépens de tout le reste de la société. Descendant de l’esclavagisme et du féodalisme, le capitalisme se déshumanise davantage en instituant un dispositif impliquant, à la fois, un mode de production et un système de pensées (l’idéologie bourgeoise) suivant lesquels, s’organisent les rapports sociaux tout en imposant, du même coup, son appareillage de « gouvernementalité[5] ». Il s’agit, pour ainsi dire, d’un système dont le capital prime sur tout, y compris sur la vie humaine. Et, cette vaste « machine » infernale s’érige envers et contre tous via des instruments d’aliénation et de déshumanisation les plus « efficaces » et les plus « efficients » pour le malheur de l’espèce humaine. Ce faisant, un tel système basé fondamentalement sur la corruption, le vol, l’injustice, l’exploitation, l’assujettissement, la domination et même l’abêtissement de l’Homme, nécessite un procès d’exception, mondialisé dont le verdict doit être, inexorablement, la « peine de mort ». En témoignent, pour le moins, ces principaux voies et moyens présentés par Marx, pour expliquer la base du développement du capitalisme impérial contemporain[6] au début du XIXe siècle. Par les capitalistes anglais. L’accumulation primitive du capital s’acquiert à partir de :

  1. L’enrichissement par vagues successives des capitalistes anglais qui ont spolié l’Église de ses biens, aliéné les domaines de l’État, pillé et enclos[7] les terrains communaux, ce qui entraine la révolution agricole tout en entrainant, par voie de conséquence, l’exode rural et des gains de productivité en leur faveur.
  2. L’explosion des bénéfices du commerce colonial au milieu du XVIIIe siècle en particulier grâce aux plantations sucrières de la zone caraïbe en général, et plus spécifiquement d’Haïti, appelé à l’époque Saint-Domingue, profitant du travail gratuit des esclaves[8].

Par ces faits et motifs, nous déclarons la mise en accusation de ce « système cannibale » et injuste en vue de l’épanouissement et le bien-être du genre humain tout entier. Sachant que les biens de la terre sont suffisants à nourrir tout le monde. Sachant qu’il est un principe inaliénable que personne n’a le droit exploiter autrui ; considérant qu’il s’agisse, pour ainsi dire, des droits naturels, inaliénables et sacrés de l’homme qui sont bafoués par le capitalisme, les hommes étant nés libres et égaux en droits. Ce principe étant consacré par l’article 1e de la déclaration universelle des droits de l’homme[9] et du citoyen de 1791, il est repris dans l’article premier de la déclaration universelle des droits de l’homme[10], proclamée par l’assemblée des nations-unies le 10 décembre 1948 et adoptée à l’unanimité par les 58 États membres qui constituaient l’assemblée générale à l’époque. Il y a lieu d’accuser le capitalisme [dans son fondement même] comme étant un système fonctionnant à contre-courant de tous ces principes « universels » corollaires de ces valeurs d’éthique pris en compte dans les deux déclarations ci-mentionnées, à savoir : le respect de la dignité et de la valeur de la personne humaine. Bref, le capitalisme est, à nos yeux, un système opposant aux droits humains les plus fondamentaux. D’où la nécessité et le fondement de son procès.

L’image du capitalisme en Haïti aujourd’hui s’apparente à l’esclavage du temps colonial

Le capitalisme impérial contemporain garde encore les empreintes de l’esclavagisme[11] en Haïti. Ces individus-captifs transportés et transplantés en Amérique, venus d’Afrique notamment sur les côtes du Sénégal, du Benin, du Congo, du Dahomey et de la Guinée-Bissau, etc. qui constituaient le moteur de l’enrichissement du colonialisme esclavagiste semblent être, à nos yeux : des damnés de la terre pour faire un clin-d ’œil à Frantz Fanon dans son texte publié en France en 1961. Le colonialisme, l’esclavagisme, le racisme et le ségrégationnisme impactent encore notre société. Ce constat patent nous permet de soutenir sans ambages qu’il existe en Haïti un système d’apartheid qui ne dit pas son nom. La persistance ou la perpétuation des caractéristiques essentielles du système esclavagisme (qui perdurent encore à bien des égards), me pousse à me demander si les descendants des hommes et des femmes esclavagisés ne sont pas condamnés à la misère à vie par le capitalisme. En tout cas, les descendants d’esclaves africains d’Haïti, eux-mêmes, dans leur grande majorité, vivent dans une situation infrahumaine, d’une part et le mode de traitement indigne d’un être humain qu’on applique aux ouvriers haïtiens, d’autre part constituent à eux-seuls des exemples parfaits et suffisamment éloquents pour justifier cette similitude du capitalisme (ou l’esclavagisme moderne) à l’esclavage aux siècles derniers. Par, exemple leur salaire de misère aujourd’hui équivaut à $ 5.49[12] pour une journée de huit heures de temps de travail et les conditions exécrables dans lesquelles ils travaillent peuvent en attester. À cela, ne peut-on pas ajouter le non-respect total de la dignité humaine qui est symptomatique des agissements des patrons à l’égard de nos ouvriers-ères et travailleurs et travailleuses dans les usines ? Avec un salaire « poitrinaire[13] » et sans aucun avantage compensatif, ils subissent une forme d’esclavage assoupli et déguisé. Tout compte fait, il parait de toute évidence qu’Haïti et tous les autres petits pays opprimés, à quelques exceptions près, soit condamnée par le capitalisme impériale à une peine infamante. Il est vrai, nous reconnaissons que le genre de traitement que les capitalistes nous inflige est pareil dans d’autres pays dominés, mais il y a lieu quand même de dénoncer, à bien des égards, un agissement de deux poids deux mesures à l’endroit d’Haïti, ce qui mous incite à penser que nous aurions commis un « un crime un pardonnable » à l’instar du « péché originel[14] » au regard de ce système d’exploitation. Est-ce que le fait d’oser choisir de : « vivre libre ou mourir » est un « crime impardonnable » pour le capitalisme mondialisé ? Car, en fait, du XVIe siècle à nos jours les conditions d’existence de ce groupe humains d’origine africaine n’ont pas « fondamentalement changé » comme l’a souligné Luc-Joseph Pierre[15] au sujet de la masse d’esclaves de St-Domingue devenus, au début du XIXe siècle, citoyens haïtiens. Cette catégorie sociale dont le sort semble pérenne n’a de cesse d’être victime au cours du 19e et 20e siècle et ce processus de victimisation devient endémique par la suite, selon l’auteur qui le décrit en ces termes :

Les conditions d’existence n’ayant pas fondamentalement changé aux 19e et 20e siècles, atrocités, maladies, calamites, misères, sous-développement, mortalité, mais aussi croyances, superstitions, ignorance, analphabétisme continuant de se poser en facteur déterminants de la condition humaine pour l’ensemble de ces catégories sociales, l’esclave des 16e, 17e et 18e siècles devenus bossale-marron vivant dans l’exclusion au 19e siècle, puis peyizan-moun mòn victime d’ostracisme au 20e siècle, n’aura pas vu sa situation et son statut évoluer de façon significative pour lui permettre de prendre ses distances de l’état nature et de sortir du climat accablant dans lequel se déroulait son existence.

En ce sens-là, sachant que la liberté et la dignité humaines sont inaliénables, nous soutenons que le capitalisme est un système qui doit être inévitablement combattu jusqu’à sa destruction totale pour instaurer un nouveau projet pour le bien-être et l’épanouissement plein et entier de toute l’humanité sous la base d’égalité, d’équité et de justice sociale.  En effet, il y a lieu d’établir la pleine responsabilité du capitalisme dans la misère, dans les calamités, la précarité et même l’invivabilité la plus abjecte de la majorité de la population mondiale en général, et en particulier celle d’Haïti. C’est dans cette logique que nous nous engageons à dresser au nom d’Haïti cet acte d’accusation contre ce système destructeur mondial qu’il convient, répétons-le, de combattre jusqu'à son anéantissement purement et simplement afin d’instituer un nouvel ordre mondial. Il me semble pour l’instant que le communisme serait l’alternative la plus admirable, la plus viable et la plus humainement soutenable en tant qu’idéal de vie la plus digne du genre humain.

  1. Les méfaits du capitalisme en Haïti du début du XIXe siècle à nos jours.

Dès le lendemain de la naissance de la première république noire du monde, on a dû fait face aux divers fléaux : d’une part deux ans après la proclamation de l’indépendance, les anciens-libres, la nouvelle aristocratie noire et mulâtre a comploté et assassiné l’empereur Jacques premier le 17 octobre 1806 pour s’accaparer des biens et des terres libérées au prix du sang de nos vaillants ancêtres esclavagisés. Alors que jusque-là les anciens-libres ou les fils des anciens colons français détenaient encore 66 % de grande habitation coloniale[16]. En ce sens, en tuant l’Empereur Jacques 1er, c’est le premier coup inaugural de nouvelle oligarchie contre le projet « socialisme dessalinien ». Bien qu’une telle assertion ne fasse pas unanimité chez les historiens et intellectuels haïtiens, il nous parait, pourtant, évident que le libérateur avait un projet de société ave un certain penchant socialiste. Il faudra donc approfondir cet aspect pour y voir plus clair. Car, Dessalines, de son côté voulait étatiser des terres détenues entre les mains des anciens colons de st-Domingue en procédant par la vérification des titres de propriétés dans le but d’aboutir à une véritable réforme agraire peu à peu. En réclamant toutes les terres comme héritages de leurs pères, Dessalines leur avait rétorqué : « et les pauvres noirs dont les pères sont en Afrique, n’auront-ils donc rien ? » Cette réponse a été pour les oligarques une déclaration de guerre, laquelle a conduit à l’assassinat de l’empereur et aussi à l’échec de son projet de bien-être fondé sous la base d’équité et d’égalité. Il s’agissait, pour ainsi dire, d’un coup fatal contre le développement et la poursuite de la révolution anti-esclavagiste, anticolonialiste, antiraciste et antiségrégationniste de Saint-Domingue. Par-delà, les anciens libres entamèrent une contre-révolution active à St-Domingue pour saper la révolution des « va-nu-pieds » et remettre le pays libéré sous l’auspice de la France à condition qu’ils jouissaient un peu plus de droits sociopolitiques.

La « dette » de l’indépendance d’Haïti, un fardeau qui continue encore à peser lourd …

Vers 1820 et 1822 (après la mort du Roi Christophe qui opposait à l’idée de payer une indemnité pour la reconnaissance de l’indépendance), avec le concours d’un dirigeant haïtien, (un traitre, un corrompu), du nom de Jean-Pierre Boyer[17] poursuivant le plan enclenché par son prédécesseur, Alexandre Pétion, un ancien libre, mulâtre comme lui, remet Haïti à la France. Cette dernière impose au pays (depuis lors) une dépendance néocoloniale suivant laquelle, la jeune République était astreinte à acheter son indépendance entre les mains de la France esclavagiste, battue et capitulée à la dernière bataille de vertiere le 18 novembre 1803. Pour ce faire, l’ancienne métropole de la colonie de Saint-Domingue, sous l’égide du Roi de France, Charles X, nous ordonne une ordonnance[18](du 17 avril 1825) suivant laquelle Haïti devait verser 150, 000,000 de francs-ors à la France en guise de dédommagement des anciens colons français et du rachat de la reconnaissance de l’indépendance[19] proclamée, il y a plus de deux décennies.  Précisément le 3 juillet 1825, le pays a été contraint de payer à la France 150 millions[20] de francs-ors destinés à « indemniser » les anciens colons maîtres d’esclaves pour perte « de propriétés », en échange de la reconnaissance de son existence en tant qu’État-nation[21], écrit Jérôme Duval dans un article intitulé : « de la colonisation à l’esclavage économique ». Cette double[22] « dette » fallacieuse a coûté beaucoup à la jeune République tout en enrichissant hideusement, la France. Ce qui fait qu’Haïti a vécu pratiquement tout le XIXe siècle en étant endettée. La France nous a rançonné durant plus d’un demi-siècle après la fondation de notre État-nation, cela s’étend de 1825[23] à 1886, soit 61 ans d’endettement injuste et illégitime. Une somme équivalente à dix ans le budget de la république à l’époque[24]. Cela va sans dire pourquoi, par exemple, aujourd’hui la France[25] est l’un des pays les plus riches (5e) au monde, avec son PIB par habitant qui s’élève à : $ 555421 USD, tandis que Haïti est l’un des pays les plus pauvres de la planète (15e) et surtout celui, le plus appauvri du continent d’Amérique avec un PIB de $ 697 USD[26] par habitant en Avril 2021, suivant les données statistiques du rapport de la Banque Mondiale publié sur son site. Voir la note en bas de page, à ce sujet.

Les préjudices de l’occupation d’Haïti par l’impérialisme Américain, (1915-1934).

            Quelques années après que le pays a fini de verser une somme indue à la France, c’est le tour des Etats-Unis d’Amérique de faire mains basses sur les richesse financières et matérielles d’Haïti via une invasion militaire. Après quelques années de chantages, le 28 juillet 1915, les yankees débarquent sur notre sol en prenant le contrôle de toutes les institutions régaliennes et financières de l’État haïtien. Par exemple, nos ports, aéroports, les douane, le ministère des finances, la banque centrale, etc. Nous avons subi pour ainsi dire au début du XXe siècle les assauts de l’impérialisme américain qui nous a envahi en 1915 et y régné pendant 19 ans en pillant beaucoup de nos ressources naturelles et souterraines y compris nos réserves d’ors à la Banque Nationale de la République d’Haïti (BNRH[27]) ont été volé[28] par l’État américain. Cette somme qui représentait 500 000 francs-ors à l’époque a des conséquences désastreuses sur notre économie tout en ouvrant la voie et en jetant les bases du néolibéralisme.

La dictature sanguinaire des Duvalier fait l’affaire des capitalistes internationaux. -

Par ailleurs, il faut souligner que le début de l’ère néolibéral imposée aux forceps par les puissants dominant à travers leurs IFI[29] coïncide à la chute de la dictature de la dynastie des Duvalier après environ trois décennies de règne soutenu par les puissants pays, « maitres du monde » en gérant leurs intérêts capitalistes. En fait, le capitalisme ne recule devant quoique ce soit. Naturellement il ne se gêna pas à soutenir la monstruosité duvalierienne de 1957 à 1986. D’autant plus que, l’occident, au cours de la période de la guerre froide, avait un bon faux prétexte pour supporter inconditionnellement le fascisme duvaliérien, à savoir que le duvaliérisme est anti-communiste. Car, il a fallu aux USA de se créer des alliés pour l’aider à étouffer la jeune révolution cubaine pour qu’elle ne s’expansa pas. Cette politique agressive contre le communisme a provoqué l’extermination de plusieurs centaines de morts suivant ce que rapportent certains historiens et chroniqueurs. Au cours de cette période, pour ne pas s’inquiéter, le dictateur était disposé à hypothéquer tout l’avenir du pays. Il a, en conséquence, ouvert la voie à l’installation du capitalisme impérial et en faisant d’Haïti une réserve de mains-d’œuvre à bon marché suivant l’attribution du rôle et de la fonction d’Haïti dans le déploiement de cet ordre mondial. Ou encore dans le cadre de la division internationale du travail. Cela peut s’expliquer par le nombre d’Haïtiens, paysans en particulier qui ont laissé le pays pour aller travailler dans les champs de canne à sucre à Cuba et en République dominicaine. Via une bourgeoisie compradore, Haïti se voit imposer la fonction d’entretenir une économie extravertie. Il ne s’agit pas de d’investir dans l’industrie locale, mais plutôt de faire la sous-traitance. Par, exemple l’élimination de notre cheptel : cochon créole, de notre riz, de notre petit-mile, etc. Toutefois, il convient de reconnaitre que le foisonnement des programmes du néolibéralisme, nouveau cadre d’exploitation économique et de domination politique du système capitaliste mondial a connu sa vitesse de croiseur à la chute du régime duvaliériste, ou du moins la véritable mise en œuvre du plan néolibéral est post-Duvalier. D’ailleurs, l’effondrement du mur de Berlin le 9 novembre 1989 va constituer un événement considérable et déterminant pour l’émergence de l’Occident, la dissolution des blocs et du même cours, la chute des régimes communistes en Europe, la dissolution de l’URSS, etc. A cet effet, c’est pour ainsi dire, la « belle époque » du capitalisme dans son déploiement et son expansion mondiale dans le cadre de ce processus qu’on aura nommé plus tard, la nouvelle étape décisive dans ce processus de mondialisation[30] qui a commencé concrètement dès la conquête de l’Amérique à la fin du XVe siècle[31]. Il convient de dire que la mondialisation, parait-il, a été d’abord économique et s’établit en divers étapes au cours des cinq derniers siècles. En ce sens-là par l’ouverture des économies mondiales et le développement des politiques de libre-échanges du début des années 60-70, n’en est-elle pas une étape remarquable aussi ?

b) Le capitalisme « démocratique », ou l’État de droit, a supporté la dictature

            La dictature de la dynastie des Duvalier qui a durée pas moins de 29 ans, est une conséquence directe du capitalisme. Car, pour combattre le communisme (son ennemi acharné), notamment l’expansion de la révolution cubaine de 1959, les puissances capitalistes, notamment les Etats-Unis, ont supporté activement la dictature duvalierienne malgré sa férocité insoutenable entre 1957 à 1986.  Cela a coûté la vie à des centaines de milliers de nos compatriotes, les chiffres des historiens sont variés. Le nombre de disparu au cours de 14 ans de règne de Duvalier Père est énorme. Cette version est considérée comme la plus féroce dans histoire de la dictature en Haïti.  Assassinat exécution, torture, emprisonnement, constituaient les principaux outils de terreur de ce régime. Sans compter un peu plus d’un million exilé qui étaient contraints de quitter leur pays sous peine de connaitre la mort ; ce qui a amputé la société d’une partie importante de ses ressources humaines par une fuite de cerveau émigrés à l’étranger pour aller contribuer à l’enrichissement de ces pays occidentaux en particulier. Mais, il faut souligner que les exilés émigraient aussi dans certains pays d’alma mater, comme par exemple : le Zaïre, le Benin. Une telle situation est profitable encore au capitalisme impérial. Ce qui engendre, quelques décennies après, une société en panne de modèle et d’esprit critique et créant, en conséquence, une absence de repère et une masse critique rabougrie.

Après vingt-neuf ans de dictature, une démocratie de saupoudrage

D’un autre côté, à partir de 1986 marquant la chute de l’ancien régime, l’Occident nous a flanqué sa  démocratie capitaliste ou bourgeoise, taillée sur mesure et basée sur la corruption, la violence et le pouvoir du capital. Ce qui enlève au peuple toute possibilité d’exercice effectif de sa souveraineté populaire, élément nécessaire pour instaurer « sa volonté générale » en instituant une démocratie populaire[32]. La prise et la maintenance du pouvoir devient une affaire de capital. Le capitalisme a tout « marchandisé » jusqu’au bulletin de vote des citoyens. Alors que dans le contexte haïtien, non seulement le bulletin de vote est un leurre, mais encore il n’est pas toujours accessible au citoyen delta. Cette dite démocratie qui est censé le masque du capitalisme impérial mondialisé n’est autre chose qu’un leurre. Ceci n’est pas particulier à Haïti, bien au contraire, cela s’inscrit dans l’ADN même de ce système. Par ailleurs, en considérant le taux d’analphabétisme et celui de la pauvreté du pays, vous conviendrez que la marchandisation ou la manipulation de l’expression populaire est beaucoup plus évidente et catastrophique à propos de notre pays, Haïti. Cette dite démocratie ne reconnait au peuple haïtien que le droit d’aller dans les urnes afin de procurer aux choix des pays capitalistes une façade de légitimité soi-disant « populaire ». Alors qu’il est un secret de polichinelle que c’est le capitaliste impérial, l’Occident ou encore, la communauté internationale qui place SES agents-dirigeants à la tête de l’État d’Haïti. Il est un fait incontestable que 35 ans après le renversement de la dictature, le seul pouvoir qui a été choisi par le peuple, c’est celui émané des élections du 16 décembre 1990, où le président Jean-Bertrand Aristide a été élu démocratiquement au suffrage universel direct par une écrasante majorité. C’était quasiment un véritable plébiscite incontestable. Cela ne saurait un fait anodin quand le candidat du FNCD[33], l’ancien prêtre du mouvement de théologie de libération, a gagné haut la main le scrutin avec un pourcentage de 67.48 % contre 14.22 % de M. Marc Louis Bazin, haut fonctionnaire de la Banque Mondiale et ancien ministre des finances[34] sous la présidence à vie de Jean-Claude Duvalier, du parti MIDH[35]. Etant donné que ce n’était le choix des puissances impérialistes, il n’a pas pu exercer son mandat à deux occasions consécutives. Il est un cas unique dans notre histoire : le seul président a subi deux coups d’État. Il n’a jamais pu terminer un mandat parce qu’il n’entendait pas Obéir servilement aux volontés impérieuses du capitalisme impérial. En matière d’élection en Haïti, c’est la volonté des puissants qui compte, ce sont les intérêts capitalistes qui déterminent qui doit être proclamé vainqueur ou vaincu. Les Républiques capitalistes se sont érigées en obstacles devant le peuple haïtiens dans le combat pour son émergence, son autodétermination et l’implantation d’une démocratie populaire sur la terre conquise par Dessalines le grand, Père fondateur de la première République noire indépendante du monde. Il convient de souligner que le capital a ses limites que les capitalistes eux-mes ignorent. Car, en dépit du fait que la USAID, suivant ce qu’a rapporté Le Monde diplomatique[36], a financé les élections de Marc Louis Bazin, a plus de 36 000 000 dollars américains, il n’a pu obtenir que seulement 14% du scrutin de vote au cours de ces élections du 16 décembre 1990. Cela puissance d’argent a ses limites.

La démocratie occidentale est une vraie pièce de théâtre joué constamment en Haïti

L’analyse de ces faits nous porte à comprendre et à soutenir avec le philosophe Alain Badiou que de notre point de vue de peuple opprimé, cette dite démocratie institutionnalisée, étatique, régulière, normée par l’occident est donc une pièce de théâtre que le capitalisme contemporain est en train de jouer dont le titre est, suivant les propos d’Alain Badiou, « La démocratie imaginaire ». Le capitalisme joue si bien cette pièce en Haïti au point que nous n’avions jusqu’ici qu’une seule occasion d’élire véritablement un président à la têt L’État haïtien, pourtant on persiste à nous faire croire que nous sommes en démocratie et que nous avons le droit d’élire nos dirigeant à la tête de cet État néolibéral qui opère en Haïti sous l’auspice du groupe des pays capitalistes les plus développés, en l’occurrence le G8. Notre pays agit pour leur compte. Tout se fait par et pour le compte de ces donneurs d’ordre, etc. Pourtant, ils parlent éhontément de « démocratie » en Haïti ; sans aucune gêne, l’occident claironne sans arrêt ces slogans fantaisistes, à savoir : d’élections démocratiques, équitables, libres, honnêtes, transparentes et inclusives. Alors qu’il est intrinsèquement impossible qu’il y ait de telles élections dans un pays opprimé fonctionnant sous la houlette d’un État néolibéral. Parce que, comme l’a si bien dit David Harvey, les chiens[37] de garde du néolibéralisme nourrissent une profonde méfiance par rapport à la démocratie. Tout « gouvernement de la majorité est perçu comme une menace potentielle pour les droits individuelles et les libertés constitutionnelles » par le néolibéralisme, a écrit David Harvey,[38] dans sa brève histoire du néolibéralisme. Pour camper ce qu’est le néolibéralisme, l’auteur a écrit ce qui suit :

Les théoriciens néolibéraux nourrissent cependant une profonde méfiance à l’égard de la démocratie. Le gouvernement de la majorité est perçu comme une menace potentielle pour les droits individuels et les libertés constitutionnelles. La démocratie apparaît comme un luxe, possible seulement dans un pays où la prospérité serait à peu près générale et la classe moyenne suffisamment puissante pour que soit assurée la stabilité politique. Les néolibéraux ont tendance à privilégier un gouvernement où siègeraient des experts et des élites. Ils ont une préférence marquée pour un gouvernement par décrets et par décisions de justice, plutôt que pour les processus décisionnels démocratiques et parlementaires. Les néolibéraux préfèrent tenir les institutions clés, comme les banques centrales, à l’abri d’éventuelles pressions démocratiques. Étant donné que la théorie néolibérale accorde une place centrale au droit et à une stricte interprétation de la constitutionnalité, il s’ensuit que les conflits et les oppositions doivent être tranchés par les tribunaux. C’est dans le système juridique que les individus doivent chercher la solution et le remède à tous les problèmes qu’ils rencontrent.

Ceci dit, les crises politiques, l’instabilité politique, la précarité de la classe moyenne, la pauvreté, la misère, les pouvoirs de facto, les pouvoirs impopulaires, incompétents et corrompus sont intrinsèquement liés à ce système. N’est-ce pas dans ce registre qu’il faut interpréter le support inconditionnel du Core-groupe au président, hors la loi, corrompu, sanguinaire et, de surcroit illégitime et illégal d’Haïti, en l’occurrence, Jovenel Moise dont son mandat constitutionnel arrive à terme depuis le 7 février 2021 ? Ne devrait-on pas chercher à bien comprendre le sens des manœuvres des puissances impérialistes durant ces vingt dernières années sur le pouvoir en Haïti, à travers ces lunettes-là que nous propose David Harvey en prenant comme cas d’espèce l’ex-président de la République, Jean-Bertrand Aristide, victime de coup d’état en deux occasions après l’avoir combattu avec acharnement aux élections de 1990 ? 

Le président Jean-Bertrand Aristide, un cas d’espèce dans l’histoire contemporaine d’Haïti

S’agissant de ces élections élisant M. Jean-Bertrand Aristide, le 16 décembre 1990, il conviendra de reconnaitre que ce cas particulier a quasiment été échappé du contrôle du capitalisme, en n’arrivant pas à imposer leur agent bien argenté[39] et bien outillé, en l’occurrence, M. Marc Louis Bazin au timon des affaires après la chute de l’ancien régime. Ce faisant, 7 mois après il a été renversé du pouvoir par un putsch militaire supporté par les « États démocratiques » de l’occident via notamment la CIA[40]. Chassé et exilé, il a dû passer pas moins de 3 ans en exile chez l’Oncle Sam. Il a été retourné au « bercail », sous les conditions imposées par le « capitalisme impérial contemporain » après un long processus de chantage et de formatage d’esprit, de vision et de projet de société. Tout a été revu et corrigé par cette coalition des puissances capitalistes qui s’est nommé encore : l’Occident, monde démocratique, communauté internationale, Pays d’État de droit, etc. Par ce coup d’État, l’occident parvint à enlever la légitimité populaire du président démocratiquement élu en lui réhabilitant au timon des affaires en coupes réglées. Toutes ses décisions devaient être nécessairement entériner par la Maison Blanche avant d’être officialisées.   Car, avec ce retour contrasté on lui rend redevable à l’égard du capitalisme impérial imposant ses lois comme il l’entend. Cette redevabilité doit se traduire dans l’application servile des politiques néolibérales. Depuis lors, tout se fait en Haïti par et pour le capitalisme via ces mécanismes néolibéraux mis en place. Cela entraine, ipso facto, que le pouvoir d’Aristide va devoir changer de cap pour se conformer au plan du groupe des pays capitalistes-oppresseurs.

Une « restauration de la démocratie » par une force d’occupation militaire en 1994

À partir de ce coup de force de l’impérialisme (Nord-Américain en particulier), c’est-à-dire, le renversement et le retour d’Aristide d’exil le 15 octobre 1994, après 3 ans de pirouettes, de dilatoires et de manigances, en collaboration avec les alliés putschistes des Forces Armées d’Haïti, instituées par l’armée américaine avant leur départ du pays en 1934, la matérialisation du plan néolibéral entre d’emblée en exécution en faisant un bond remarquable.  À cette occasion, le capitalisme a fait des bouchées doubles pour instituer ses volontés les plus capitalistiques. Tandis que les USA se chargeaient « de restaurer la démocratie » via une flotte militaro-civile composée notamment de 22 000 marines[41]  et les IFI[42], de leur part, prétendaient apporter la stabilité financière et du développement à travers un plan dit : « plan d’ajustement structurel », ( PAS); à partir de ce moment, il est clair que la souveraineté, à la fois politique, économique et financière du pays se trouve hypothéquée entre les mains de ses créanciers, aux grandes puissances et au « dieu du marché international » pour parodier Sophie Porchellet[43]  dans son article intitulé : construire ou reconstruire Haïti.  Et, l’imposition du plan d’ajustement structurel du FMI et de la Banque mondiale impliquant une campagne de privatisation des principales institutions Étatiques sous le couvert de cette rhétorique vide que : l’État est failli, il est trop faible, il est corrompu, il est donc inapte pour gérer. Il doit les privatiser en les liquidant aux puissances capitalistes qui peuvent mieux les gérer profitablement dans l’objectif de la réduction de la pauvreté et d’augmenter le rendement de la productivité tout en assurant le bien-être de tous et de toutes.  Cela implique que l’État doit volontairement abdiquer sa souveraineté sur les mouvements de biens et de capitaux au profit du marché mondial. La privatisation peut être absorbée par la bourgeoisie compradore qui opère dans le pays tout comme cela peut être fait avec des entreprises multinationales ou étrangères. C’est donc la « liberté de marché » et « le libre-échange » qui s’impose. Par exemple notre système de télécommunication sera acquis par une compagnie du Vietnam, le vietel à 60%. À partir de cette privatisation, la communication en Haïti est devenue un véritable luxe pour les couches sociales défavorisées. Il faut noter qu’en abdiquant sa souveraineté l’État renonce à la fois à sa propriété et aussi à son droit de régulation. Aristide aura tenté de contourner les exigences qui lui ont été faites. Il a résisté un petit peu, mais il n’a pas pu tenir tête jusqu’à remporter la victoire. Pour cette raison au cours de son deuxième mandat (2001-2006), il sera victime d’un nouveau coup-d ’État punitif qui l’obligeait à passer pas moins de sept ans d’exil en Afrique du Sud, où il a été catapulté par le trio : USA-Canada-France. Un seul président, deux coups d ’États en moins que trois quinquennats. Cela ne saurait être un fait anodin. De retour d’exil pour la deuxième fois le Mars 2011, il sera contraint de rester en retrait de la politique active. Toutefois, il est censé rester assez populaire et plus populaire que quiconque au moment où nous écrivons cet « acte d’accusation ». Certaines personnes peuvent aller jusqu’à dire qu’il reste incontestablement un leader d’une certaine « popularité imbattable » et « politiquement redoutable ». Toutefois c’est un avis qui mérite de réserves.

L’omniprésence de la corruption dans le fonctionnement du système capitalisme

A partir du moment qu’on commence à exercer des pressions sur Aristide, au début de son deuxième mandat, pour l’accomplissement de ses promesses, la situation commence à se dégénérer jusqu’à ce qu’Aristide perde la pédale. Il a durci sa position en renforçant sa base sociale. Il a armé quelques milliers d’OP[44] pour la défense de son pouvoir menacé. Pour entrainer ces bases armées et ses partisans pacifiques des quartiers défavorisés, dans les ghettos, il a surplombé les institutions comme la douane et la Téléco, par exemple. La gabegie s’installe. La corruption va commencer à gangrener nos institutions de manière effrayante en partant du plus haut niveau de l’État jusqu’au simple subalterne. Une telle situation a entrainé la faillite effective de certaines institutions étatiques. Car, il a fallu de toute façon, pousser Aristide à la faute par tous les moyens pour pouvoir le discréditer ensuite tout en lui faisant perdre de sa popularité incontestablement acquise. Cela va de soi en sachant que la corruption est l’essence même de ce système ou pour mieux dire, c’est la norme fondamentale du monde capitaliste, comme l’a écrit si joliment, le philosophe Alain Badiou en définissant la corruption comme étant la loi du monde[45]. « L’omniprésence de la corruption » est la loi du monde, écrit-il dans son essai : à la recherche du temps perdu. La corruption est là, partout et toujours. Mais, surtout, dans des pays comme Haïti si appauvri par les causes que nous avons déjà évoquées plus haut, si misérable, en conséquence, vous pouvez supposer combien la corruption peut emporter, en un clin d’œil, les maigres ressources dont dispose le pays, tout en pervertissant quasiment tout le monde. Ce qui provoquera, pour les couches défavorisées : la misère abjecte, le chômage, la privation de services sociaux basics et la faim endémique. Le clan des puissances capitalistes développées a miné le pouvoir entre les mains d’Aristide jusqu’à l’éjecter de sa fonction, une deuxième fois, sur la troisième année de son mandat. Puis, ils installent un pouvoir technocratique sous l’égide d’un haut fonctionnaire de la Banque mondiale, du nom de Gérard Latortue pour mettre en œuvre le chantier qu’Aristide a hésité de démarrer hâtivement et servilement.

Une occasion opportune pour donner le dernier coup de marteau…

La gouvernance de Latortue a été une occasion très propice pour l’implémentation du programme de privatisation et le durcissement des mesures de restructuration politiques et économiques de l’État néolibéral d’Haïti. En conséquence, la vie des masses devient plus misérable. La classe moyenne décapitalisée avec une quantité importante de travailleurs, cadres et agents de la fonction publique qui se trouvent en chômage tout bonnement à cause de la privatisation de la majorité des institutions publiques qui a provoqué cette vague de licenciement entre 2007 et 2008. La plupart de ces employés révoqués vont se réfugier en terre étrangère, (en Rep. Dominicaine en particulier) ; d’autres dans les usines de sous-traitance de l’aire métropolitaine. D’autres, au contraire, se sont dirigés dans le transport : conducteur de motocyclette, chauffeur de camionnette, de mini-bus, ou encore, certains vont intégrer ou réintégrer le mouvement des gangs armés. Et, les dés sont jetés. La néolibéralisation triomphe et l’État devient un pot de chagrin. Un État pariât, dépendant totalement de l’extérieur. Ce qui pousse plus d’un à parler d’un État fictif au sujet d’Haïti.

Une nouvelle phase dans la néolibéralisation d’Haïti avec la nomination de M. René Préval

Ce plan d’ajustement structurel qui commençait à être matérialisé depuis vers les années 1980 a été systématisé à travers un nouveau document portant le nom de : « Document de Stratégie Nationale pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté, (DSNCRP), élaboré vers les années de 2007 avec l’installation du président René Garcia Préval.  En fait, M. Préval a été clairement « nommé » de force par les puissances impérialistes en vue d’accomplir entre autres, ces tâches. Son accession à la présidence pour un second mandat a été fait en dehors de tous les prescrits constitutionnels. Parce que les résultats de son « élection » n’était pas conforme à la charte fondamentale votée par le peuple haïtien le 27[46] mars 1987, en son article : 134.  Vu que le bloc des oppresseurs, capitalistes ont proclamé la victoire de M. Préval à un pourcentage de 47 % des bulletins de vote. Or, la Constitution prévoit que pour être élu au premier tour, le candidat doit obtenir la majorité absolue[47] de cinquante pourcents plus un (50 + 1 %). Tel n’a pas été le cas. À cet effet, à 47%, il a fallu un second tour. Mais, l’international communautaire[48] a décidé autrement en comptabilisant les votes blancs et les bulletins nuls au prorata pour pouvoir justifier la victoire souhaitée, celui de leur agent, déjà expérimenté au cours du précédent mandat (1996-2001). Très fidèle aux instruments du capitalisme, Préval a terminé ces deux mandats sans manquer même un iota. Ainsi, il a, suivant les diktats de la Banque Mondiale et du FMI, organisé le « départ volontaire » dans les institutions publiques, comme : la CINAH, AD’H, la TÉLÉCO, ED’H, l’AAN l’APN, la MINOTERIE, la CAMEP, etc., etc. Ce qui revient à dire que le Président Préval a été plus fidèle, plus obéissant aux ordres des puissances capitalistes que le président Aristide. Au moins, Aristide a tenté de faire un tout petit peu de résistance devant les blancs racistes. Et, cela lui a coûté très cher. Il aura payé lourdement les conséquences jusqu’à sa mort. D’ailleurs, même l’obéissant Préval n’aura pas connu une fin heureuse. Il sera châtié à être condamné à mort par le club des puissants pour avoir osé dire « l’indicible » une rare fois au peuple haïtien à travers un film documentaire.

 

Jean Willy  BELFLEUR

 


[1]. Il convient de noter qu’en critiquant le capitalisme, nous l’abordons à partir de la « définition classique » connue de tout le monde, celle de Karl Marx, suivant laquelle, le capitalisme se définit comme étant un mode de production fondé sur « l’exploitation des uns par des autres » et que le capitaliste (propriétaire du capital) ne rétribuant pas le travail de l’ouvrier à son juste prix, tire de ce travail  « non payé » une plus-value qui lui permet d’accroitre son capital,  et donc d’accumuler de nouveaux profits. Dans le même temps, « ce que le salarié s’approprie par son labeur est tout juste suffisant pour produire sa vie », c’est-à-dire pour continuer à travailler.

[2]. Le surplus prélevé sur le travailleur. La plus-value (ou parfois survaleur1) est un concept forgé par Proudhon, puis repris et développé par Karl Marx dans sa critique de l'économie politique, et détaillé dans Le Capital. Karl Marx reprend et complète la théorie de la valeur des économistes classiques (Adam Smith, David Ricardo, etc.), selon lesquels la source de la valeur d’échange d’une marchandise est le travail qui y est incorporé.

Dans la théorie de la valeur de Marx, la plus-value a une signification précise : c’est la différence entre la quantité de valeur ajoutée par le travailleur à la marchandise initiale et la valeur de la force de travail nécessaire (le travail lui-même étant "incommensurable" au sens de non-marchandisable puisque le travail, c'est l'individu, un être vivant, pensant, et non une marchandise).

[3]. Il est le résultat de la transformation des plus-values réalisés par les capitalistes (ceux qui détiennent les moyens de productions) grâce à la force de travail des prolétaires.

[4].  Voir la section huit du livre I (du capital) dans la traduction française publiée en 1872, la toute dernière qui a été révisée par l’auteur avant sa mort.

[5]. Foucault, le courage de la vérité – le gouvernement de soi et les autres II (1984), où il précise le contenu de ce concept dans son analyse du pouvoir : « cette approche « impliquait que l’on place au centre de l’analyse non le principe général de la loi, ni le mythe du pouvoir, mais les pratiques complexes et multiples de gouvernementalité qui suppose d’un côté des formes rationnelles, des procédures techniques, des instrumentations à travers lesquelles elle s’exerce et, d’autre part, des enjeux stratégiques qui rendent instables et réversibles les relations de pouvoir qu’elles doivent assurer » cf. Texte de 1984, Dits et écrits, T. IV, [Gallimard] 1994, p. 584. Cité par Pierre Lascoumes. Pierre Lascoumes, « La Gouvernementalité : de la critique de l’État aux technologies du pouvoir », Le Portique [En ligne], 13-14 | 2004, mis en ligne le 15 juin 2007, consulté le 18 septembre 2021. URL : http://journals.openedition.org/leportique/625 ; DOI : https://doi.org/10.4000/leportique.625

[6]. Suivant un concept d’Alain Badiou dans À la recherche du réel perdu, Fayard 2015, p.26.

[7]. Ces propos sont présentés dans les mêmes termes que Marx par Michel Beaud dans son essai intitulé : Histoire du capitalisme de 1500 à nos jours, publié dans les Éditions du Seuil, France 1990, (4e édition), p. 58.  Où il a écrit à propos de l’émergence du capitalisme qui prit sa vitesse de croisière au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle, lequel considéré comme étant le siècle d’élargissement des échanges marchands […] et plus spécifiquement, celui du renforcement du capitalisme anglais. En fait, écrit-il, « […] l’indépendance des colonies d’Amérique entraîne l’entreprise de la nouvelle vague des enclosures et la prolétarisation de masses rurales, avec le mouvement cumulatif d’accumulation, avec les progrès techniques, les conditions de la grande révolution industrielle du XIXe siècle ».

[8]. En effet, Michel Beaud a écrit plus loin : qu’au XVIIe siècle « la traite des esclaves atteint aussi de hauts niveaux : cinquante-cinq mille par an en moyenne pour l’ensemble du siècle (alors qu’il était de l’ordre de deux mille par an au XVIe siècle), avec des périodes où elle atteint cent mille par an ; […]. Des millions africains arrachés à leurs sociétés et à leur terre par la violence et le troc ; des millions de travailleurs non payés, dont beaucoup ne recevaient pas de quoi reproduire leurs forces et s’épuisaient en quelques dizaines de mois : c’est là, ne l’oublions jamais, une base essentielle (mais largement gommé dans la pensée occidentale) de l’enrichissement bourgeois dès XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles.  […] En effet, le travail forcé des esclaves noirs et des populations d’Amériques du Sud permet de dégager une énorme masse de plus-value ; celle-ci est appropriée sous forme monétaire par des négociants et des fabricants, des banquiers et des financiers d’Angleterre, principalement, mais aussi d’Europe et des colonies d’Amérique du Nord soit directement ou indirectement… » Cf. Michel Beaud, Op. Cit.

[9]. L’article premier de cette déclaration votée par l’assemblée nationale de France après la révolution de 1789. Il dit précisément : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. Cf. https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/menu/droit-national-en-vigueur/constitution/declaration-des-droits-de-l-homme-et-du-citoyen-de-1789#:~:text=Les%20hommes%20naissent%20et%20demeurent,Art.&text=Ces%20droits%20sont%20la%20libert%C3%A9,la%20r%C3%A9sistance%20%C3%A0%20l'oppression.

[10]. https://www.un.org/fr/udhrbook/pdf/udhr_booklet_fr_web.pdf

[11]. « L’histoire d’Haïti est frappée du sceau de l’esclavage qui a laissé des empreintes encore présentes dans la vie des Haïtiennes et des Haïtiens. La forme dominante du travail dans la société esclavagiste était le travail forcé que fuyaient celles et ceux qu’on a appelé les marrons. Cette nécessaire représentation du travail comme pénibilité à fuir se retrouve-t-elle encore aujourd’hui dans le rapport au travail en Haïti ? » Ces propos découlent de cette conférence, publié sur ce site : https://calenda.org/849493 lors d’une vision conférence réalisée par charesso le 30 avril 2021.

[12]. Voir l’arrêté présidentiel publié le 31 octobre 2019 dans le journal officiel Le moniteur, spécial # 20 fixant le salaire minimum dans le secteur de la sous-traitance à 400 gourdes pour une journée de huit heures de temps de travail.

[13]. C’est ainsi que nous l’appelons en Haïti dans le monde syndical pour parler du « salaire de subsistance » Certains salaires ne permettent pas de subsister en Haïti.

[14]. Voir péché adamique.

[15].  Dans Haïti. Vodou. Esclavage et identité, l’auteur mettant en évidence les méfaits de l’esclavage sur le devenir des haïtiens et soutient que les séquelles sont visibles ils caractérisent voire déterminent même l’identité des masses esclaves. P. 14.

[16]. Le chiffre 66 %, nous l’écrivons avec un peu de réserve, car nous ne l’avons lu que seulement dans un petit livret titré : « Pou kisa yo asasinen Desalin ? », publié par une organisation progressiste basant dans département du centre du pays, dénommé : komite rezistans popilè Benwa Batravil. L’auteur du dit-livret ne s’inscrivant pas dans un registre scientifico-académique, ne donne absolument aucune référence des propos de leur pamphlet. Cependant pour les besoins de la cause et par souci académique, nous nous faisons l’impérieuse obligation d’aller vérifier les plus authentiques documents historiques sur la période, nous n’en trouvons pas encore d’autres sources corroboratives de cette donnée précise. Toutefois, les propos de l’historien Paul Moral ne disent pas le contraire. En effet, l’idée selon laquelle, la plus grande quantité d’habitation coloniale d’Hayti se trouvaient encore monopolisée plus de deux ans après entre les mains des anciens-libres nous parait évidente à bien des égards. Toutefois, cela reste à vérifier du point de vue de quantification précise. Voir Paul Moral, LE PAYSAN HAÏTIEN (étude sur la vie rurale en Haïti), Éditions Fardin, Haïti, 2002, pp. 29-31.

[17]. Homme politique et soldat, président d'Haïti de 1818 à 1843, né à Port-au-Prince en 1776, mort à Paris le 9 juillet 1850.  Jean-Pierre Boyer, mulâtre de père provençal et de mère guinéenne, est élevé en France. Après avoir combattu le général noir Toussaint Louverture et s'être rallié au chef mulâtre Alexandre Pétion, il est au côté de ce dernier contre Henri Christophe, quand l'assassinat de l'empereur Jean-Jacques Dessalines (1806) transforme en rivaux les deux leaders. Désigné par Pétion pour lui succéder à la présidence (1818) Boyer peut unifier le pays après la mort de Christophe. Pendant sa présidence, Jean-Pierre Boyer tente d'enrayer le déclin de l'économie, initié avec la révolte victorieuse des esclaves noirs contre leurs maîtres français dans les années 1790, en faisant voter le Code rural. Ce texte tente d'attacher les travailleurs agricoles à leurs plantations en leur interdisant de quitter celles-ci, d'entrer dans les villes, de créer des fermes ou d'ouvrir des boutiques en propre. Il prévoit aussi la création d'une police rurale pour mettre ses dispositions en application. Ce dispositif ne parvient pas toutefois à arrêter le déclin de la production. Boyer négocie un accord avec la France en 1825, par lequel celle-ci consent à reconnaître l'indépendance d'Haïti contre le paiement d'une lourde indemnité, à titre de compensation pour le massacre de planteurs français par des esclaves noirs pendant les guerres d'indépendance. Même réduits de 150 millions à près de 60 millions de francs en 1838, ces paiements, ajoutés à la destruction des plantations, représentent un fardeau financier impossible à assumer pour un pays déjà appauvri. Jean-Pierre Boyer entretient aussi une immense armée et des fonctionnaires corrompus qui harcèlent continuellement la population rurale. Le fossé entre paysans noirs de la campagne et mulâtres des villes se creuse pendant sa présidence. La corruption et le marasme économique mènent à une rébellion en 1843, qui oblige Boyer à fuir à la Jamaïque, puis à Paris, où il achève sa vie. Cf. https://www.universalis.fr/encyclopedie/jean-pierre-boyer .   

[18]. L’article 2 de cette ordonnance stipule clairement ce qui suit : « Les habitants actuels de la partie française de St-Domingue verseront à la caisse des dépôts et consignations de France, en cinq termes égaux d’année en année, le premier échéant le 31 décembre 1825, la somme de cent cinquante millions de franc destinés à dédommager les anciens colons qui réclameront une indemnité ». Cela est documenté dans un mémoire publié en 1828 à Nantes au nom de plusieurs anciens colons propriétaires résidant à Nantes sous le titre de :  Sur l’indemnité des anciens colons de S-Domingue Mémoire publié au nom des anciens colons propriétaires résidant à Nantes. Là-dans, l’ordonnance est publiée textuellement. Voir ce lien : http://www.manioc.org/gsdl/collect/patrimon/archives/PAP11183.dir/PAP11183.pdf .

[19]. L’article 3 stipule : « Nous concédons, à ces conditions, par la présente ordonnance, aux habitants actuels de la partie française de l’isle de St-Domingue, l’indépendance pleine et entière de leur gouvernement ».

[20]. Suivant la Loi du 30 Avril 1826 votée en France.

[21]. Propos tiré dans un article de Jérôme Duval, publié sur le site de PAPDA, en voici le lien :  https://www.legrandsoir.info/haiti-de-la-colonisation-a-l-esclavage-economique.html .

[22]. Afin de souligner que pour payer la dette de l’ordonnance, Haïti était obligé d’emprunter entre les mains des financiers français une « dette onéreuse » Cependant la dette a été renégociée en 1838.

[23]. Suivant les prescrits de l’ordonnance de Charles X du 17 Avril 1825.

[24]. Voir Benoît Joachim, les racines du sous-développement en Haïti, Port-au-Prince, Haïti : Imprimerie H. Deschamps, 1979.

[25]. Rapport banque mondial, avril 2021. En visitant ce site : www.banquemondiale.org/fr

[26] . Op.cit., 

[27]. Il s’agit de l’ancien nom de la Banque centrale depuis 1910 avant de devenir la BRH, banque de la République d’Haïti ou Banque centrale.

[28]. Cela s’est passé le 16 décembre 1914.

[29] . Institutions financières internationales.  

[30]. Voir David Harvey, point communs et divergences entre globalisation et mondialisation. Il est un géographe, économiste marxiste d’origine Britannique et professeur émérite d’anthropologie et de géographie. Il est né en 1935.

[31]. Soit le 11 au 12 octobre 1492 par le navigateur espagnol C. Colomb en débarquant sur la petite l’Ile de Guanahani, actuel San-Salvador.

[32]. Elle doit être entendue, suivant la définition de Léon Trotski, dans la Révolution permanente en 1936, comme une « démocratie d'un type nouveau et amélioré, grâce à l'absence de la classe des capitalistes ».  Il y a lieu de distinguer d’autres types de démocratie : démocratie formelle, démocratie prolétarienne, etc.

[33]. Fond National pour la concertation Démocratique.

[34]. À l’époque cela s’appelait plutôt : secrétaire d’Etat des finances et aux affaires économiques. Il occupa ce poste entre Février et juillet 1982.

[35]. MIDH : mouvement pour l’instauration de la démocratie en Haïti, Fondé par Marc Louis Bazin.

[36]. Cité par Ayibopost, dans un article…p.2

[37]. C’est nous qui utilisons cette expression. Quant à David Harvey, il a plutôt utilisé le terme théoriciens.

[38]. https://journals.openedition.org/nrt/2037 . / David Harvey, Brève Histoire du néolibéralisme, Paris, Les Prairies ordinaires, coll. « Penser/Croiser », 2014, 320 p.  Cité par Lyonel Jacquot.

[39]. https://www.monde-diplomatique.fr/1994/04/A/18772

[40]. https://ayibopost.com/30-septembre-1991-et-11-septembre-1973-deux-coups-detat-pour-un-meme-projet/  < https://www.lemonde.fr/archives/article/1995/12/10/l-etrange-jeu-de-la-cia-dans-l-affaire-haitienne_3886118_1819218.html

[41]. Cité par Ayibopost Op.cit., p. 2. Voir, à cet égard, ce lien : <   https://ayibopost.com/les-etats-unis-ont-ils-un-role-dans-le-naufrage-dhaiti/ >.

[42].  Institutions financières internationales.

[43]. Voir aussi : pourquoi trois entreprises de l’État haïtien se trouvent entre les mains du secteur privé ? à partir de ce lien : https://ayibopost.com/pourquoi-trois-entreprises-de-letat-haitien-se-retrouvent-aux-mains-du-secteur-prive/.

[44]. Ce sigle est l’abréviation de : organisation populaire. Mais, bien entendu avec une certaine connotation de la perception haïtienne. En réalité ce n’était pas de véritables organisations populaires structurées et légales. Mais plutôt des groupes informels qui opéraient sous le diktat de M. Aristide. Il s’agissait pour ainsi dire d’une sorte de milice légèrement sournoise dans leur fonctionnement.

[45]. Ibid., pp. 16-18. À la page 16 du livre, il a écrit, par exemple : « un symptôme intéressant de notre société, c’est que le scandale est en général un scandale de corruption. C’est son nom essentiel. Il est assez curieux que la corruption fasse scandale, car l’on pourrait soutenir que la société est corrompue de A jusqu’à Z. On pourrait même soutenir que la corruption est la loi intime, et que c’est pour dissimuler cette corruption systémique, et tout à fait réelle, que le scandale désigne ce qui est finalement, une sorte de bouc émissaire ».

[46]. Nous écrivons 27 mars au lieu de 29 mars parce qu’en réalité le referendum constitutionnel a eu lieu le 27 mars 1987 et la publication de la nouvelle constitution dans le journal officiel, Le Moniteur aura lieu le 29 mars 1987, deux jours après sa votation. Nous soutenons, pour ainsi dire que, c’est la date du vote qui doit primer sur la date de publication, mais non l’inverse.

[47]. Cf. art. 134 de la constitution haïtienne du 27 mars 1987 stipule : « Le président de la République est élu au suffrage universel direct à la majorité absolue des votants. Si celle-ci n’est pas obtenue au premier tour, il est procédé à un second tour. […].

[48]. Voir anile Louis-Juste Jn Anile dans « crise sociale et l’internationale communautaire en Haïti, 08 aout 2003, Alterpress.

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