Le 18 novembre est une date mémorable de notre histoire, car elle est la mère de toutes les batailles contre les forces coloniales et esclavagistes. Une campagne militaire dont le souffle épique a inspiré nos combattants de la liberté et conduisit un an plus tard à l'indépendance de notre pays.
Nous sommes en 2023, loin des grandes commémorations de jadis où tous les Haïtiens se retrouvaient autour des idéaux de nos pères fondateurs.
Depuis maintenant une décade, les grandes dates de notre histoire sont plutôt l'occasion de batailles sans pitié entre politiciens pour des questions de chefferie. Une foire d'empoigne où le chacun pour soi triomphe. Les jeunes n'ont plus de modèles et le passé est souvent évoqué de manière « rance » et nostalgique, alors qu'il devrait nous inspirer pour d'autres « Vertières ». Des victoires à remporter sur nous-mêmes et notre sous-développement. Des combats à gagner contre ce qu'un des collaborateurs du journal a appelé les « enfumages » ou parties de poker menteur qui obscurcissent l'horizon de toute sortie de la crise structurelle qui nous accable.
Mais on en reste aux postures stériles. Le « tout va très bien, madame de la marquise » au beau milieu du chaos est devenu un sport national et les dirigeants du pays se contentent de très peu ou de rien.
Le 18 novembre est passé sans tambour ni trompette. Dans une absolue « discrétion » et sous les eaux d'une dépression tropicale. Il y a certes eu ici et là les habituelles entourloupettes d'un de nos leaders abonné « absent » des grandes dates de notre histoire ou quelques passes d'armes d'escrimeurs de la plume. Et puis rien. La crise continue dans un territoire ravagé par les exactions des magnats du crime organisé. À la veille de la venue de la force multinationale, leur rage destructrice semble se décupler.
Le cri de désespoir de notre peuple demeure inaudible aux oreilles de nos décideurs. ll ne nous reste qu’à espérer que la prochaine date historique ne se heurte à ce même « turbulent silence » que le 18 novembre et nous ramène tous à la raison et à un sursaut patriotique.
Roody Edmé
