Les diplômés : une haine affectueuse

Que vaut un diplôme en Haïti ? Pourquoi hait-on les diplômés ou les gens qui ont investi leur temps pour obtenir un diplôme ? Sont-ils méchants d’avoir sacrifié leur temps pour l’obtention de leur diplôme ? Pourquoi ceux qui admirent les diplômes ont tant de haine pour les diplômés ? Comment demander aux diplômés de regagner l'alma mater pour récolter de la haine à leur égard une fois au terroir ? De telles questions me viennent à l’esprit suite aux échanges que j’ai eus avec des futurs diplômés et de leurs responsables concernant un sujet brulant. J’en ai profité pour baliser une position tendant à être construite comme vérité. Au terme de mes réflexions, je comprends que les concepts sont utilisés à des fins sans finalité pour convaincre ceux qui sont d’habitude éberlués de concepts grandiloquents. Pour se faire valoriser,les gens utilisent les concepts sans comprendre leur portée et leurs sens. Un concept a une histoire. Il n’est pas tombé du ciel. À une mauvaise utilisation, il faut un recadrage. Et c'est normal quand ceux que vous haïssez tant [les diplomes] sont présents pour vous recadrer. Ils font de la lecture leur passion . Pourquoi haïssez-vous tant les livres ? Vous n'avez pas de l’argent ou vous ne disposez de temps ? L’argent vous en avez, car vous en faites éloge au quotidien.

Un autre aspect de réflexion m’interpelle, c’est quand les haineux des diplômés se demandent : pourquoi ne pas utiliser son temps pour faire de l’argent ? C’est avilissant quand la vie est réduite à sa valeur marchande. Si vous avez votre temps uniquement pour faire de l’argent, je vous dis en passant que votre humanité est la plus légère au monde. L’argent n’est pas le socle de la vie. Il n’est plus le numéraire d’autrefois. Pour répéter Daniel Innerarity, le capital d’attention devient essentiel dans le monde. Avec un minimum d’attention, on peut avoir l’argent sans le désirer. Être cupide n’est pas signe d’être humain. Être humain est plus important que d’avoir des millions en poche. Je me sens fier de mes diplômés. Les diplômés sont aussi fiers de leurs diplômes. Je vous conseille d’être fiers (ères) de vos comptes en banque. S’il est évident aujourd’hui que les diplômés sont ainsi représentés en Haïti,cette représentation n’est pas la référence. Ils connaissent leur valeur en terre étrangère malgré tout.

 Être diplômé, c’est déjà une valeur. Quand on a de l’argent, on est utilisé. L’attention se porte sur la valeur de l’argent et non sur l’individu. Sans cet argent, sa représentation n'est que la face intime de la laideur.

En 2011, l’ex-président Michel Martelly a eu horreur des diplômes. Toutefois, j’ai compris son discours électoraliste. Il a seulement considéré le temps du discours Memmi s’il va impacter son administration au-delà du temps du discours. On peut tout aussi bien comprendre le discours de Martelly est circonstanciel. Cependant, la haine des diplômés est générale chez les frustrés. En fait, comment comprendre que des gens qui encouragent des jeunes à obtenir leurs diplômes haïssent ceux qui ont eu leur diplôme en crachant par simple frustration. Si vous n’avez pas de diplômes, on voudrait bien partager les siens. Ils sont aux enchères. Réjouissez-vous ! 

Cette haine des diplômés est une construction sociale inédite. Il n’est pas sérieux qu’une société construise des frustrés pour rien. À mon sens, L’État doit créer les conditions essentielles pour changer les rapports au temps. Le temps du discours anti -diplôme est passé. Aujourd’hui, on a besoin des diplômés. La simplicité ne saurait être une valeur dominante en ces temps de grâce. L’expérience, c’est bien. Il faut aussi les diplômés. De surcroit, les expérimentés avec des diplômes. Quand le linge sale se lave en famille, le traitement n’est pas la norme. La norme se construit dans la douleur de lire les gros livres. 

Aujourd’hui, il faut repenser globalement la société. Elle doit être construite sur des valeurs de sacrifices et non sur la base de l’informalité ou de l’informelle. Les rôles ne doivent pas être régis en routine. Si aujourd’hui, la routine remplace les diplômes et les valeurs, il faut déjà prévoir avec conscience le malheur d’Haïti. L’amateurisme ne peut être la règle. 

Trop d’amateurs nous détruisent. Il faut une carrière qui dicte le ton aux générations futures. Et cela se construit par le niveau de diplomation et la pratique de l’expérience diplômante. Il faut que les expériences se servent de quelque chose de constructif les expériences ne doivent pas être jetées dans les poubelles. Pour les conserver, il faut les diplômes ou la vie d’un diplôme. Car les expériences vaudront pour les générations futures.

Cessez cette haine des diplômes. D’ailleurs, la projection d’un Haïti meilleur ne peut se faire sans les diplômés. Il faut des diplômés de tous les domaines. Mieux vaut échouer avec des diplômés que d’échouer avec des non-diplômés. Dans le premier cas, l’échec est voulu. Dans le second, l’échec est responsabilisé. On ne responsabilise pas ceux qui ne valent pas leurs responsabilités. Responsabilité et compétence[1] vont de pair. Car pour être responsable, des compétences sont nécessaires.

Aux questions, je ne donne aucune réponse. Se donner sa propre réponse est déjà condition de compréhension. Je ne suis pas en train de valoriser les diplômés. L’essentiel est de comprendre quand la société fait choix des non-diplômés, l’échec est voulu. À l’inverse, la responsabilité dans la société doit être assumée. En ce sens, choisir les diplômés ne fait qu’obligation.

 

   Bernadin Larrieux

 

La competence est associée au savoir . Elle est dynamqiue par les experiences. Elle permet d’assumer toute responsabilité decoulant du savoir et des rôles , des tâches en situation.

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