La recette suédoise

Les taux de mortalité en Suède ont considérablement diminué depuis le pic atteint à la deuxième semaine d'avril. Pourtant il n’y a pas eu de mesures strictes de confinement (1) et d’interdiction de déplacements comme en France, en Italie ou en Belgique. Quel en est le secret ?

D’après les chiffres officiels, l'épidémie touche à sa fin en Suède. La surmortalité constatée se produit principalement dans les maisons de retraite qui ne sont pas bien protégées, comme l'explique l'épidémiologiste Anders Tegnell, conseiller principal du gouvernement suédois sur la pandémie du Covid-19. C’est ce dernier qui donne en Suède des instructions en matière de santé et non les politiques, comme on le voit ailleurs.

Par rapport à d'autres pays, la population suédoise bénéficie désormais d'une très forte immunité naturelle au virus Covid-19. On pense que ceci devrait mieux la protéger d'une éventuelle « deuxième vague » prévue en hiver prochain.

Déjà à partir du 12 mars dernier, la stratégie nationale de dépistage n'a été appliquée qu'aux personnes âgées et gravement malades ainsi qu’au personnel médical. Le 13 mars, les autorités sanitaires recommandaient de rester chez soi dès qu’on a des symptômes même bénins et de ne pas se rendre dans les centres de santé ou les hôpitaux de district.

À la mi-avril 2020, on comptait plus de 10 000 personnes infectées en Suède, avec 887 décès. Le virus a fait son apparition dans un tiers des maisons de retraite de Stockholm, malgré l'interdiction des visites. C'est la raison de la forte augmentation des décès.

L'épidémiologiste Tegnell suppose que le nouveau coronavirus SARS-CoV-2 « ne peut être arrêté ». Il estime toutefois que la courbe doit rester linéaire pour ne pas surcharger les hôpitaux. Mais dès le début, l’épidémiologiste a pensé aux conséquences sociales : les restrictions ne devraient pas être trop sévères afin que les gens puissent être en mesure de les accepter des mois durant. En outre, il espère que de cette manière, suffisamment de personnes résistantes attraperont le Covid-19 afin de développer une immunité contre l'agent pathogène.

Selon les dernières études, on s'attend à ce qu’au début de mai, environ un tiers de la population de Stockholm, qui a été la ville la plus sévèrement touchée jusqu'à présent, acquière une immunité.

La méthode suédoise
Dès le début, la Suède s'est appuyée sur une discipline volontaire plutôt que sur des interdictions. Comparées au reste de l’Europe, ces mesures sont parmi les plus libérales, mais similaires à celles du Japon.

Les écoles n'ont jamais été fermées. Elles ont fonctionné jusqu'à la neuvième année. Seules les classes supérieures se déroulent en ligne. Selon les autorités sanitaires, il n'y a pas de preuve scientifique que les enfants sont manifestement un groupe à risque ou porteurs du virus. Les universités sont passées à l'enseignement à distance et les devoirs se font à domicile. Les restaurants, les magasins et les entreprises n'ont jamais été fermés, ainsi que les frontières nationales. Toutefois, il est fortement recommandé de garder ses distances, de se laver les mains et de rester à la maison si on se sent mal. On doit éviter les déplacements sans importance et faire du télétravail si possible. Les visites dans les maisons de retraite ont été interdites. De même que celles aux personnes malades.

Fin mars, la Suède a renforcé son interdiction d'organiser des événements. Avant, on permettait des rassemblements de 500 personnes. Depuis le 29 mars, seulement des regroupements de 50 personnes sont autorisés.

Le quotidien luxembourgeois Tageblatt rapporte que la « stratégie souple de la Suède sur Covid19 semble fonctionner ». Malgré des mesures minimales de sécurité sanitaire et de nombreuses critiques internationales, la situation semble « se calmer clairement pour le moment ».

Un énorme hôpital de campagne, qui a été construit près de Stockholm, reste fermé en raison du manque de demandes. Le nombre de patients dans les unités de soins intensifs reste constant à un niveau faible, voire légèrement en baisse. « Il y a de nombreux postes vacants dans les unités de soins intensifs de tous les hôpitaux de Stockholm. Nous nous approchons de l'aplatissement de la courbe de la maladie », a expliqué un médecin en chef de la « Karolinska Klinik ». Même constatation faite au célèbre hôpital universitaire Sahlgrenska à Göteborg : des lits y sont libres. Pareil dans l'établissement de soins provisoire dans la capitale suédoise.

Des mesures volontaires, très similaires à celles adoptées par la Suède, ont été prises au Japon. Contrairement à d'autres pays asiatiques qui ne disposent pas d'une surveillance généralisée des téléphones portables, le nombre de morts au Japon est extrêmement faible, 286 pour un pays de 126 millions d'habitants.

Les pays sans couvre-feu ni interdiction de contact, tels que le Japon, la Corée du Sud et la Suède, « n'ont pas connu jusqu'à présent une évolution plus négative que d'autres pays », estime le journal en ligne autrichien « meinbezirk.at » en date du 23 avril dernier. Selon le médecin Peter F. Mayer, qui a consacré un reportage au modèle suédois, ce résultat remet en question l'efficacité des mesures de « shutdown ».

L'exemple suédois montre-t-il que les « lockdowns » étaient médicalement inutiles, voire contre-productifs, ainsi que dévastateurs sur le plan social et économique ? Beaucoup de chercheurs le pensent. Comme, par exemple, le professeur Dan Yamin, directeur du laboratoire de recherche en épidémiologie de l'université de Tel-Aviv (Israël), explique dans une interview que le nouveau virus Corona est « peu dangereux » pour une grande partie de la population et qu'une immunité naturelle rapide doit être l'objectif. Les dommages causés par un verrouillage sont énormes, a-t-il estimé. Il pense qu’avec cet argent, il serait plus facile de construire une nouvelle clinique.

Le président du Conseil national pour la recherche et le développement israélien, le professeur Isaac Ben-Israel, affirme que, selon les connaissances actuelles, l'épidémie de Corona prend fin dans la plupart des pays après environ 8 semaines, quelles que soient les mesures prises. Il recommande donc de lever le « verrouillage » immédiatement.

Le professeur Ansgar Lohse, directeur de l'Hôpital universitaire de Hambourg, explique dans une interview : « À mon avis, les mesures suédoises sont les plus rationnelles au monde. Bien sûr, la question se pose de savoir si cela peut être maintenu psychologiquement. Dans un premier temps, les Suédois doivent s'attendre à un nombre de décès nettement plus élevé, mais à moyen et long terme, ce nombre sera ensuite considérablement réduit. La facture sera payée en un an, si les Suédois peuvent tenir le coup. Malheureusement, la crainte de l'infection par le virus oblige souvent les politiciens à prendre des mesures qui ne sont pas nécessairement raisonnables. La politique est déterminée, également par les images dans les médias. ».

De toutes les manières, que les gouvernements prennent ou non des mesures libérales ou strictes, ils seront critiqués, c’est de bonne guerre !

Huguette Hérard

1) http://www.lenational.org/post_free.php?elif=1_CONTENUE/actualitees&rebmun=6451

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