« Nous allons tous attraper le coronavirus ! »

À l'hôpital universitaire de Hambourg (Allemagne), le médecin légiste Klaus Püschel a autopsié de nombreux cadavres de personnes décédées des suites d’une infection par le coronavirus. Dans une interview accordée récemment à la chaîne de télévision « Ntv » (1), il explique ce que les cadavres révèlent sur la nouvelle maladie et pourquoi la panique ne devrait pas être nécessaire.

En tant que médecin légiste, Klaus Püschel ne détecte pas les virus : c’est plutôt l’affaire des virologues. Il pratique des autopsies sur les cadavres et envoie aux virologues les tissus et les frottis correspondants.

Pour ce qui est de la dangerosité du virus, il déclare en avoir l’habitude : c’est d’ailleurs une situation que les médecins légistes connaissent avec les nombreuses autres maladies. « Nous devons supposer que chaque personne décédée que nous examinons est potentiellement infectieuse. » Selon lui, il y a aussi des virus beaucoup plus dangereux, notamment ceux qui provoquent des maladies chroniques, par exemple l'hépatite, ou encore les bactéries qui provoquent la tuberculose ou la méningite.

Ce médecin estime qu’il s'agit d'une infection virale qui nous est inconnue. Le virus est encore nouveau. On se pose beaucoup de questions à ce sujet. Si le médecin légiste cherche la cause du décès, il y a aussi d’autres spécialistes qui, eux, veulent découvrir autre chose. « Les virologues cherchent à savoir dans quels tissus le virus peut être détecté. Dans les voies respiratoires et les poumons, tout le monde y pense, mais aussi, par exemple, dans le muscle cardiaque, le cerveau ou les organes internes comme le rein ». Il constate dans la communauté scientifique un grand intérêt à détecter le virus dans ces différents organes afin de voir dans quelle mesure ceux-ci pourraient héberger un « réservoir de virus ». On veut savoir si le processus de la maladie dans le système organique est différent. Si la réponse immunitaire, fournie essentiellement par nos organes et les tissus, est différente d'une région à l'autre. Et si cela explique aussi l'évolution différente de la maladie. Il explique que le coronavirus n'est pas un diagnostic et qu’il signifie « seulement que nous avons détecté le virus du Corona ». Il pense que les symptômes de la maladie ne sont pas encore connus. « Cela dépend beaucoup de l'organisme que le virus du Corona rencontre : s'il est déjà atteint de nombreuses autres maladies, si certains systèmes organiques sont plus ou moins gravement endommagés, de sorte qu'ils ont tendance à se décompenser. »

Ce qu’il affirme pouvoir dire à l’heure actuelle, c'est que l'infection par le coronavirus se produit effectivement d'abord dans les voies respiratoires et les poumons. « Ce qui est relativement nouveau, indique-t-il, c'est que l'infection virale a évidemment aussi des effets importants sur les membranes vasculaires internes et sur la coagulation du sang, de sorte que les thromboses et les embolies sont relativement fréquentes ».

Il pense toutefois qu’il ne faut pas paniquer. « Les craintes personnelles sont en fait tout à fait inutiles, il s'agit d'une infection virale comme beaucoup d'autres ! » Il avoue n’avoir aucune peur du virus, convaincu qu’il ne lui sera pas fatal. Le virus serait inoffensif ? Püschel le pense, même s’il comprend la réponse « relativement précoce et globale » apportée par les autorités de son pays - ou ailleurs - visant à empêcher la propagation du virus et à éviter la surcharge des hôpitaux. Il s'agit d'aplatir la courbe, mais il estime que « les gens doivent revenir à une vie normale le plus rapidement possible » et que « l’on ne peut pas empêcher l'infection ». Il se prend en exemple : « Pour être honnête, je préfère attraper le virus maintenant, puis l'avoir derrière moi lorsque les locaux seront à nouveau ouverts dans trois mois. Tous ceux qui n’ont pas cette infection en ce moment l'attraperont de toute façon d'ici un an ou deux, jusqu'à ce que nous ayons l'immunité collective. »
Il ignore si la maladie a atteint le pic de sa courbe ascendante, mais il a constaté qu’il doit actuellement autopsier de plus en plus de cadavres chaque jour, ce qui signifie que les victimes sont « clairement dans la fourchette ascendante ». « En Allemagne, a-t-il ajouté, nous devons donc certainement tenir compte du fait que nous aurons encore de nombreux décès liés au coronavirus et que nous n'avons manifestement pas encore atteint le sommet. »

Pour ce qui est des cadavres qu’il analyse, il y a ceux qui sont décédés du coronavirus et d’autres, d’autres pathologies. Pour lui, la proportion de Corona dans l'issue fatale varie. Pour certains, elle représente 10 %, pour d'autres 90 %, selon l'étendue de la maladie préexistante et l'intensité de l'infection. Il peut certifier pour Hambourg : jusqu'à présent, il n’y a eu de décès que chez des personnes qui avaient généralement plusieurs affections préexistantes et un âge moyen bien supérieur à 70 ans. Il constate aussi que les hommes sont plus susceptibles d'être touchés que les femmes. En tout cas, ces sujets étaient principalement multi-morbides. « Même dans les cas où les gens disent : "il avait 52 ans, il était en très bonne santé", je dirais qu'il ignorait peut-être qu'il avait des conditions préexistantes importantes. C'est tout à fait possible, car beaucoup d'entre nous sont porteurs de maladies dont nous ne connaissons pas les détails ». Les personnes en bonne santé traverseront, selon lui, l'infection comme une infection virale relativement inoffensive dans un délai d'une à deux semaines et l'oublieront rapidement.

À la question de savoir si l’Allemagne connaîtra des conditions sanitaires catastrophiques comme celles qu’ont connues l’Italie et les États-Unis, Püschel répond par la négative : « je pense que les politiciens ont bien géré cela. Notre pays compte 100 millions de personnes, dont 100 000 sont aujourd'hui infectées ! Mais au final, nous aurons plusieurs millions de personnes infectées ! » Il croit que les gens reportent le problème à plus tard pour un certain temps. Ceux-ci espèrent qu’un vaccin pourra l'atténuer ultérieurement, mais il est d’avis que l’on n’échappera pas à la maladie. « Nous pouvons attraper l'infection dans de nombreux endroits - et ce n'est pas si grave. Le meilleur remède que nous ayons est notre système immunitaire. Il peut généralement y faire face s’il est intact et non affaibli par des maladies antérieures. »

Convaincu que le Covid-19 est « une maladie virale relativement inoffensive ». Püschel conseille à ses compatriotes d’apprendre à vivre avec et sans quarantaine. Il appelle la chancelière de l’Allemagne Angela Merkel à rouvrir lentement l'Allemagne. « C'est le bon moment », a déclaré M. Püschel au « Hamburger Abendblatt ». « Le temps des virologues est terminé. Nous devrions maintenant demander aux autres ce qui convient dans la crise du Corona, par exemple aux médecins des soins intensifs. »

Klaus Püschel ne semble pas être le seul à penser ainsi. Le psychiatre de l’enfant et de l’adolescent Michael Schulte-Markwort a déclaré au « Hamburger Abendblatt » qu'aucun des chiffres que nous connaissons « ne justifie la crainte que suscite le virus en Allemagne ». Il a dit qu'il a l'impression que la peur prenait peu à peu une vie propre et que les bonnes nouvelles en rapport avec le virus ne n’attirent même plus l’attention.

Peu importe l’issue de cette maladie, les sujets à risques - personnes âgées et malades – doivent redoubler leur vigilance quant aux mesures à prendre pour se protéger du coronavirus et se préparer à toute éventualité.

Huguette Hérard

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