Femmes enceintes et coronavirus

Toutes les études disponibles ont montré que la majorité des sujets infectés par le Covid-19 sont des personnes âgées ou malades. Qu’en est-il des femmes enceintes et de leurs bébés ? Experts et responsables de la santé renseignent.

On a beaucoup parlé dans le milieu médical des groupes à risque que représentent les personnes âgées, les fumeurs, les personnes avec des pathologies antérieures (problèmes cardiaques, hypertension, asthme, diabète, maladie du foie, système immunitaire réduit, etc.) Plusieurs études ont pointé du doigt ces catégories de personnes, même si certains résultats n’ont pas encore obtenu l’assentiment unanime de la communauté scientifique, la maladie étant encore trop récente et les recherches, trop éparpillées.

Mais pour ce qui est des femmes enceintes, d’après les indications de l’Institut Robert Koch (1) datant du 30 mars dernier, il n’existe aucune donnée digne d’intérêt y relative. Les experts de cet institut estiment qu’en raison de l’adaptation physiologique et des changements immunologiques survenus pendant la grossesse, « une sensibilité plus accrue à l’infection par le SRAS-CoV-2 ne peut être exclue ».

Quant à la gravité de la maladie chez les femmes enceintes, jusqu’à ce jour, on n’en sait pas beaucoup : il n’y a eu que quelques études dans lesquelles elles ont été examinées en rapport avec le virus. Cependant, ces travaux disponibles ainsi que les résultats du rapport de la Mission conjointe OMS-Chine sur les maladies à coronavirus 2019, ne donnent aucune indication d’une évolution plus grave du Covid-19 chez les futures mères que chez celles qui n’attendent pas d’enfant. Le texte conclut qu’un risque accru d’évolution grave ne peut être étudié de manière fiable que dans le cadre d’études de populations.

Même s’il n'existe aucune preuve d’envergure internationale que les femmes enceintes soient plus exposées au nouveau coronavirus (SRAS-CoV-2) que la population générale. Si, par malheur, la femme enceinte a attrapé le virus, elle doit impérativement s'isoler.

Est-ce que cette quarantaine suite à une infection du Covid-19 suspectée ou confirmée affectera la naissance de son bébé ? Les experts affirment qu’il n'existe actuellement aucune preuve que cette personne ne peut pas accoucher par voie normale ou qu'une césarienne soit plus sûre. Il en sera de même pour la péridurale : rien ne dit qu’elle ne peut y avoir droit.Cependant, on déconseille fortement l'utilisation de l'oxyde nitreux (2), car ce dernier peut augmenter l'aérosolisation et la propagation du virus.

Pour ce qui est du bébé à naître, va-t-il contracter la maladie du Covid-19 si sa mère en a été atteinte, se demandent avec anxiété de nombreuses femmes ? À propos de cette question, l’Institut Robert Koch affirme qu’il existe peu de données viables sur la question. Donc aucune déclaration valable ne peut être faite sur ce sujet. En principe, les spécialistes de la santé affirment qu’une forte fièvre au cours du premier trimestre de la grossesse « peut augmenter le risque de complications et de malformations ».

Comme il s'agit d'un virus récent, il n’y a pas non plus de preuve d'un risque élevé de fausse couche. Ou encore que le virus puisse être transmis au bébé pendant la grossesse (c'est ce qu'on appelle la transmission verticale). Il est donc considéré comme « peu probable » que le virus provoque des anomalies chez le fœtus. Jusqu'à présent, précise l’Institut Robert Koch, seules 20 grossesses ont été signalées au niveau international, toutes ayant eu lieu en Chine. En aucun cas, un nouveau-né n'a été infecté. Aucune anomalie chez la mère et l'enfant n'a été signalée.

Mais on recommande toutefois aux femmes enceintes, comme à tout le monde d’ailleurs, d’avoir des gestes barrières, comme garder une distance raisonnable avec les autres. Si elle a des symptômes de type grippal tels qu'une toux sèche, de la fièvre, un rhume et de la fatigue ainsi que des problèmes respiratoires, des égratignures au cou, des maux de tête et des douleurs aux membres, des nausées, des diarrhées et des frissons, elle peut supposer qu’elle a attrapé le coronavirus.

Par mesure de précaution, on conseille aux femmes enceintes dont l'infection par un coronavirus est suspectée ou confirmée, lorsque les contractions se manifestent, de se rendre pour l’accouchement « dans une clinique où le bébé peut être surveillé électroniquement en permanence et le niveau d'oxygène vérifié toutes les heures ». Cela vaut bien entendu pour les pays où ces conditions maximales existent, ce qui n’est pas malheureusement le cas chez nous, en Haïti. Comme la surveillance continue du fœtus ne peut avoir lieu que dans une unité d'obstétrique où des médecins et des sages-femmes sont présents, on recommande d'accoucher à domicile ou dans une maison de naissance où seules des sages-femmes sont présentes.

Cependant, il n'existe aucun rapport indiquant que les femmes chez qui une infection par le coronavirus a été diagnostiquée au troisième trimestre de la grossesse aient transmis le virus à leur bébé dans l'utérus. La base de données est très petite ; dans les 20 cas évoqués par l’institut, aucun virus n'a été détecté chez les nouveau-nés. Toutes les infections seraient survenues au cours du troisième trimestre.

En ce qui concerne l’allaitement, il n'y a actuellement aucune preuve que le virus puisse être transmis par le lait maternel. « On estime que les avantages reconnus de l'allaitement maternel l'emportent sur les risques potentiels de transmission du coronavirus », soutiennent certains responsables de la santé. Les mères infectées ou les cas suspects doivent éviter la transmission du virus par infection de gouttelettes pendant l'allaitement en prenant des mesures d'hygiène telles que le lavage en profondeur des mains avant et après tout contact avec le bébé et en portant un masque. « Cette recommandation peut changer à mesure que la connaissance du nouveau virus se développe ! », disent les experts médicaux.

Les mêmes mesures s’appliquent pour celles qui pompent le lait maternel. Elles doivent suivre les recommandations de nettoyage de l’appareil après chaque utilisation. Aux mères qui veulent nourrir leur bébé avec du lait maternisé ou non, on conseille de suivre les directives de stérilisation. Si certaines doivent tirer le lait maternel à l'hôpital, il faut utiliser un tire-lait spécial. Si une mère est incapable d'allaiter son bébé, le lait maternel peut également être tiré et donné au bébé par une autre personne, qui doit aussi respecter l'hygiène et de stériliser la pompe et le flacon après utilisation.

Sur un forum français, plusieurs femmes atteintes du Covid-19 ont témoigné avoir continué à allaiter leurs nouveau-nés sans que ceux-ci ne présentent des symptômes suggérant qu’ils auraient attrapé le virus. Pour elles, donner le sein est important pour leurs petits qui, de ce fait, pourront être immunisés contre la maladie du SRAS-CoV-2. L’avenir médical de ces petits nous dira si ces femmes avaient raison ou non de les avoir allaités.

Huguette Hérard

N.d.l.r.

1) L’Institut Robert Roch (Robert-Koch-Institut) est un institut central du gouvernement allemand dans le domaine de la protection de la santé et de la prévention.

2) On l’appelle aussi gaz hilarant en raison de ses effets euphoriques. Il est utilisé en anesthésie, chirurgie, odontologie comme adjuvant (en mélange équimolaire avec de l'oxygène) pour ses propriétés anesthésiques et antalgiques. On l’utilise pour réduire les mauvais souvenirs d'un événement traumatique déclenchant généralement des intrusions récurrentes.

3) Sources: Robert-Koch-Institut, Deutsche Gesellschaft für Gynäkologie und Geburtshilfe e.V. (Société allemande pour la gynécologie et l’aide à la naissance), Berufsverband der Frauenärzte e.V. (fédération des gynécologues) de concert avec German Board and College of Obstetrics and Gynecology.

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