Pour sauver l’année scolaire

Tant vaut l’école, tant vaut la nation. Cette maxime établit le rapport réciproque entre la nation et l’éducation et sied parfaitement à la réalité actuelle. Le système éducatif haïtien, au même titre que la nation, se trouve en pleine déliquescence. Faute de pouvoir ériger un système éducatif haïtien solide, on n’arrive pas à transmettre les matériaux nécessaires à la construction de la nation haïtienne. Car, l’école demeure l’institution, par excellence, de transmission des valeurs constituant le socle de toute nation, digne de ce nom.
Et la crise actuelle, qui remet en question les fondamentaux mêmes de la nation, nous montre à quel point nous sommes en retard de phase dans le concert des nations. Plus de trois mois après que le pays s’était plongé dans une paralysie quasi totale, le secteur éducatif, principale victime de la crise, tente timidement de sortir la tête de l’eau. Certaines écoles ont donné rendez-vous cette semaine pour la reprise des activités, d’autres jouent encore la carte de la prudence en observant la réalité. Car tout parait incertain dans cette situation de crise aiguë où la nation semble se livrer à elle-même.
Les écoles, qui essaient de fonctionner, le font presque en cachette comme si le pays était en guerre contre les écoles. Cette réalité est la preuve par quatre que le pays n’est pas dirigé. Jusqu’à présent, aucune communication officielle n’est venue pour annoncer la reprise des activités scolaires et énoncer les dispositions arrêtées pour garantir la sécurité des uns et des autres, ainsi que le plan de redressement pour le reste de l’année académique.
Dans ce pays où règne le « chacun pour soi et Dieu pour tous » (chak koukouy klere pou je w), ce sont les écoles qui bataillent pour reprendre les activités en profitant de la disponibilité de l’essence dans les stations-service pour sauver au moins le reste du mois de décembre.
L’inquiétude d’esprit et l’éducation ne riment pas. Et à présent, personne ne sait à quand le prochain épisode de « pays lock ». Car, la situation reste encore très tendue dans certaines zones prises d’assaut par des groupes armés. Et le carburant n’est pas partout disponible, selon des témoignages venant de certaines villes de province où des propriétaires de pompes semblent écouler le gaz sur le marché parallèle. 

À cette phase, au-delà des divergences de vues, de classes, d’intérêts et de chapelles politiques, la société, dans toutes ses composantes organisées, se doit de trouver un accord spécial pour sauver le reste de l’année scolaire. Avec un trimestre (le plus important en termes d’heures d’apprentissage) quasiment perdu, l’année scolaire devient très fragile. N’importe quel autre épisode de « lock down » peut perturber gravement le reste de l’année scolaire qui, techniquement, doit compter sur un certain nombre d’heures de classe pour être validée.
Les écoles classiques, les écoles professionnelles, les universités, de véritables canaux de transmission de valeurs et de savoirs dans toutes sociétés qui aspirent au changement, surtout au développement du capital humain, ne peuvent pas fonctionner dans l’expectative. Ces établissements de services publics devraient être des sanctuaires protégés par tous. Malheureusement, les responsables de l’État ne se montrent pas à la hauteur de leurs responsabilités de garantir le droit à l’éducation de tous tel que prôné par la Constitution ainsi que les conventions, traités et accords que le pays a paraphés et ratifiés en la matière.
Les multiples épisodes de « pays lock » ont déjà causé, par le passé, beaucoup de torts au système éducatif déjà miné par la médiocrité. Tant vaut l’école, tant vaut la nation. Avec ce système médiocre, il ne faut pas s’attendre à ce qu’il produise, demain, des dirigeants brillants.

 

La Rédaction

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