Reprendre la route

À entendre certains discuter, la question de la corruption ne serait pas importante. Surtout si une seule personne, et pas n’importe qui, peut la juguler. À la limite, si celui qui fait son beurre dans la corruption investissait dans des choses ayant une valeur pour la collectivité, on pourrait prêter honteusement l’oreille à certaines arguties. Mais en général, le corrompu ou le corrupteur n’a que faire de la bonne marche de la collectivité ou de la nation.

 

C’est encore plus flagrant chez nous où une effroyable mentalité nous emprisonne dans le laid, le petit dans ce qu’un grand dramaturge chez nous a pointé du doigt comme le « kokoratisme ». Chez nos voisins corrupteurs et corrompus ont un certain panache en tenant à disposer d’un vrai Théâtre national, à se mouvoir dans un environnement propre, pensé, maîtrisé en un mot moderne. Ici, difficile à penser ce qui se passe dans la tête des uns et des autres.

 

Argument lancé à la face d’un citoyen qui ne voit dans le phénomène de la corruption que la résultante du désir normal de toute personne d’avoir un train de vie que la précarité ne lui permet pas. « Ou men, si w direktè, minis, sa w t ap fè ? » C’est là qu’on se rend compte que tout un pan de notre société est en train de sombrer. On oublie, on veut oublier, que notre société, en dépit de tout, peut donner en exemple de nombreux hauts fonctionnaires anciens directeurs généraux et ministres qui ont oeuvré pour le bien de la nation, toujours dans des conditions plus que difficiles et qui ont eu un respect sans faille pour les deniers publics. Pour la plupart, ils mènent une existence simple, tranquille, pouvant justifier à n’importe quel moment le peu qu’ils ont pu gagner, économiser, au cours de leur parcours.

 

On veut faire croire aux citoyens qu’il n’y a qu’une voie. Cette voie qui permet à n’importe quel quidam d’avoir pignon sur rue, car cette voie accepte l’ignorance, la bêtise, tout en refusant à la Culture et à l’Intelligence la place qui leur revient de droit dans toute société digne de ce nom.

 

Il faut vraiment souffrir d’un dysfonctionnement mental pour considérer comme normal le fait qu’à trois cents mètres environ du palais présidentiel, un hôpital public, le plus grand du pays ne dispose pas du minimum même pour soigner une simple blessure. Sur les réseaux sociaux, s’affichent sans fausse honte, les délires de citoyens à la limite de la délinquance qui défendent l’indéfendable parce qu’ils bouffent à la table de l’indéfendable où, par peur du retour d’un passé que personne évidemment ne souhaite.

 

Honnêteté, dialogue, amour de la patrie ! Voici ce qu’il faut pour que nous ayons une chance d’être à la hauteur des rêves des fondateurs. Pour l’instant, nous en sommes loin. Si loin que nous devrions avoir honte. Mais il faut reprendre le bon chemin. Il est long et parsemé d’embuches. Nous n’avons plus le choix.

 

La Rédaction

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