Affaire CAS : la FJKL salue l'ordonnance du juge Morin

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Le 15 septembre 2023, le juge Jean Wilner Morin a rendu une ordonnance qui, selon la FJKL, constitue un tournant majeur dans la poursuite de la justice et la transparence dans le pays. Cette ordonnance fait suite à une enquête de l'Unité de lutte contre la corruption (ULCC) concernant des responsables de la Caisse d'assistance sociale (CAS) accusés de détournement de biens publics, prise illégale d'intérêts, complicité de faux et usage de faux, trafic d'influence, et association de malfaiteurs au préjudice de l'État haïtien.

L'ordonnance du juge Morin soulevant des questions importantes en matière de droit pénal moderne et d'application de la loi. Dans ce contexte, la Fondasyon Je Klere (FJKL) entreprend dans son dernier rapport une analyse approfondie de cette ordonnance et de ses implications pour la société haïtienne.

L'une des pierres angulaires de cette ordonnance, souligne la FJKL, est la référence à la loi sur la déclaration de patrimoine. Cette loi, adoptée en 2008, avait pour objectif de moraliser la vie publique en luttant contre l'enrichissement inexpliqué des personnalités politiques et des fonctionnaires. Cependant, une enquête précédente de la FJKL avait révélé que son application laissait à désirer. Aucune personnalité visée par cette loi n'avait été sanctionnée pour inobservance jusqu'à présent.

L'ordonnance du juge MORIN change la donne en considérant l'absence de déclaration de patrimoine comme une grave présomption d'enrichissement illicite. Selon la fondation, cela envoie un message fort aux responsables publics quant à l'importance de se conformer à cette loi et de garantir la transparence dans l'administration publique.

Une autre avancée significative de cette ordonnance concerne l'abus de fonction. En ratifiant la Convention des Nations-Unies contre la corruption, Haïti s'est engagée à intégrer cette convention dans sa législation interne. Le juge a appliqué l'article 19 de cette convention qui définit l'abus de fonction comme un acte intentionnel d'un agent public qui viole les lois pour obtenir un avantage personnel ou pour une tierce partie.

Cette décision, estime FJKL, écarte l'immunité dont jouit généralement un ministre pour d'autres infractions pénales. En mettant ainsi en avant la primauté de la lutte contre la corruption sur l'impunité, le juge envoie ainsi un signal clair quant à l'obligation des hauts fonctionnaires de l'État de répondre de leurs actes devant la justice.

Plus loin, la FJKL indique que le juge introduit également le concept de délit d'initié, défini par la loi haïtienne comme l'utilisation d'informations réservées ou privilégiées obtenues dans l'exercice de ses fonctions pour un avantage personnel ou pour une tierce partie.

Cette disposition pourrait avoir un impact significatif sur de nombreux fonctionnaires et agents publics impliqués dans des transactions financières douteuses avec l'État. C'est une étape importante vers la régulation de ces pratiques et la prévention de la corruption.

Cependant, la Fondation juge que l'ordonnance présente certaines limites. Car, elle n'explique pas pourquoi Rosemila Petit Frère, citée à comparaître plusieurs fois, n'a pas comparu, laissant planer des interrogations. De plus, elle ne fournit pas d'informations sur les mouvements de fonds des inculpés ni sur les titres de propriété immobilière, des éléments qui auraient pu renforcer la traçabilité des fonds en matière de corruption.

Sommes toutes, la FJKL considère que cette ordonnance marque un progrès significatif dans la lutte contre la corruption et l'impunité en Haïti. Elle dit espérer que les motifs de cette ordonnance influenceront les juges des tribunaux supérieurs pour renforcer la lutte contre la corruption. Elle invite également les institutions compétentes à prendre des mesures pour moraliser la vie publique et garantir la transparence des transactions financières.

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