Huitième partie : la mort expliquée aux enfants ( no 2)

Éduquer: pour quoi faire?

« Il y a deux façons de se leurrer. La première, c’est de croire ce qui n’est pas vrai ; la seconde c’est de refuser de croire ce qui est vrai »

Soren Kierkegaard, (1813-1855)

 

Comment sait-on qu’une personne est morte pour de bon ?

Mon petit Lucas, dans les temps très anciens, seul le  prêtre pouvait déclarer qu’une personne était décédée. Plus tard,  malgré l’apparition et  l’évolution de la science, on a commis beaucoup d’erreurs en ensevelissant des gens qui n’étaient pas vraiment  morts. Cela arrive encore aujourd’hui même, particulièrement dans certains pays pauvres comme Haïti, qui ne disposent pas de toute la technologie médicale moderne. Ces malheureux sont fréquemment achevés par les croque-morts, comme cela se passait dans les temps anciens. Ceux qui travaillent dans les pompes funèbres en témoignent souvent, néanmoins avec beaucoup de discrétion. Une telle attitude est due en grande partie à la superstition, à l’ignorance, et surtout à la peur morbide de la mort.

 

Donc, on ne peut jamais être sûr à 100% que quelqu’un est vraiment décédé ?

Je crois que  tu as entièrement raison. De quoi peut-on être  totalement et définitivement certain dans la vie ? De très peu de choses, en fait. L’on s’imagine à tort que la science est infaillible, comme d’autres le pensaient autrefois de la religion. Le savoir est dynamique. Vérité d’aujourd’hui : erreur de demain. Et vice-versa. Autrefois, les religieux d’abord, puis, les hommes de science  soutenaient que  la terre était plate. Ensuite, ces derniers se sont rendu compte qu’elle était plutôt ronde. Pour expliquer l’alternance du jour et de la nuit, on enseignait la théorie d’Aristote à savoir  que le soleil tournait autour de la terre, centre présumé  du monde. Galilée qui défendait la théorie contraire, à savoir, celle de Copernic, a dû abjurer pour échapper à la mort. Aujourd’hui tout le monde sait que c’est la terre qui en tournant autour du soleil, expose  à ce dernier, ces différentes faces. D’où l’alternance du jour et de la nuit.

 

 En fait, comme pour l’univers, les êtres humains ont toujours compris et  diagnostiqué la mort,  en fonction de leur époque. Dans les temps très  anciens,  pour déterminer si une personne apparemment inconsciente était vraiment  décédée, on la pinçait ou on  lui mordait le gros orteil. C’était un simple test de sensibilité. Un peu plus tard, on s’est  plutôt basé sur la fonction  respiratoire considérée alors  comme essentielle. Un miroir était alors placé devant la bouche du mourant. S’il  se couvrait de buée (vapeur d’eau), cela signifiait que l’individu continuait de respirer et donc, était encore vivant. Je t’explique : quand tu inspires par tes narines, de l’air (essentiellement de l’oxygène) pénètre dans tes poumons. Quand tu expires, tu rejettes à la fois, du gaz carbonique et de la vapeur d’eau. Cette dernière, condensée, rend tout blanc le miroir. Tu apprendras tout cela,  un peu plus tard à l’école. Par la suite, les scientifiques  ont jeté plutôt leur dévolu sur le cœur qui pompe le sang dans tout le corps et qu’ils ont considéré comme l’organe vital essentiel. Pour diagnostiquer un décès, le médecin posait alors l’oreille sur la poitrine du concerné afin de percevoir les éventuels battements cardiaques. Le stéthoscope, inventé en 1816 par un médecin français appelé René Laennec, fut, par la suite, utilisé préférentiellement, parce qu’il permettait de mieux entendre les bruits du cœur et des autres organes. Beaucoup plus tard, on mit sur pied un appareil plus sensible et plus précis appelé « électrocardiographe », lequel indique sur papier, sous forme de tracé, de courbe, même les faibles battements cardiaques normalement imperceptibles à l’auscultation. Un tracé ou « électrocardiogramme plat » signifiait alors la mort puisque le cœur s’était arrêté de pomper du  sang (et donc de l’oxygène) vers les différents organes.

 

Et aujourd’hui en 2023 ?

 Par la suite, les scientifiques ont accordé et continuent d’accorder la prééminence au cerveau lequel, selon eux, produit la conscience. Un nouvel appareil baptisé électroencéphalographie, branché sur le cuir chevelu, mesure l’activité cérébrale sous forme d’un tracé électrique  appelé électroencéphalogramme. Lorsque ce dernier est plat, l’on conclut que le cerveau ne fonctionne plus. Donc, en 2023, la mort est définie scientifiquement comme l’arrêt du cœur et du cerveau mesuré par l’électrocardiographe et l’électroencéphalographie. Et pourtant, il y a beaucoup de gens  répondant à ces critères (conditions) qui sont revenus à la vie et qui  témoignent. Ces retours  existent  depuis l’aube de l’humanité. Le philosophe Platon, qui a vécu environ 500 ans avant Jésus-Christ, rapporte, dans l’un de ses écrits, l’histoire d’un soldat appelé Er, qui meurt sur le champ de bataille et  revient à la vie pour raconter ce qu’il a vécu dans l’au-delà. À cette époque, la science n’était pas encore née.

 

Mais, tous ces gens étaient-ils vraiment décédés ?

Excellente question qui montre que tu es un enfant vraiment précoce. C’est l’argument massue  des sceptiques. Aujourd’hui, comme nous l’avons indiqué précédemment, c’est l’arrêt du cœur et  surtout l’extinction du cerveau qui permet de conclure au décès. Et pourtant, aujourd’hui encore, un grand nombre de gens diagnostiqués morts (avec électrocardiogramme et électroencéphalogramme plats) reviennent à la vie et rapportent avec un luxe de détails, ce qui s’était passé autour d’eux et même à une très longue distance  durant tout le  temps où  leur  cœur et leur cerveau s’étaient  arrêtés de fonctionner. Ils prétendent   avoir observé  du plafond, leur corps sur lequel médecins et réanimateurs s’affairaient. Ils disent souvent  avoir été accueillis, accompagnés dans « l’au-delà » , par des proches  déjà décédés, parfois des grands-parents ou arrière-grands-parents et qu’ils n’avaient parfois pas connus avant. Il s’agit de ce qu’on  appelle aujourd’hui  les «  Expériences de Mort imminente (EMI) ».  En anglais, on dit : Near Death Experience ou NDE.

Ces phénomènes  ont commencé officiellement à être  étudiés scientifiquement, à partir des années 1960 et 1970 grâce à deux médecins : Elizabeth Kubler Ross et surtout  Raymond Moody. Ce dernier a publié un best seller  intitulé « La vie après la vie », ouvrage que j’ai lu vers l’âge de 13 ans. De nombreux ouvrages, de nouveaux faits, de nouvelles études scientifiques apparaissent régulièrement. Il est fort  probable  que, dans un  demi-siècle ou un siècle, d’autres appareils plus sophistiqués seront inventés pour diagnostiquer un décès.. De nouveaux critères  encore plus précis seront établis. Néanmoins, les gens continueront de revenir de la mort laquelle  gardera précieusement son  mystère, à moins que l’on ne change de lunettes.

 

 Selon toi, peut-on vraiment revenir de la mort ?

Je crois que l’on peut parfaitement revenir de la mort. Beaucoup de gens l’ont fait d’ailleurs  et  le font encore de nos jours. Le problème vient de notre conception du phénomène. La frontière entre la vie et ce que nous appelons la mort ne serait point  une ligne, mais plutôt  une région, « une  certaine superficie », pour utiliser un langage matériel. L’on peut s’y aventurer parfois assez loin, mais pas trop. Sinon, on ne peut  plus revenir en arrière.

En fait, notre compréhension de la mort dépend en grande partie de celle que nous avons  de l’être humain.

Pour beaucoup de gens, nous sommes uniquement un corps physique, c’est-à-dire de la chair, des os et du liquide. Ce corps disparaitrait à  notre mort ainsi que notre conscience laquelle  serait une production du cerveau. Donc, quand on meurt : plus d’intelligence, de  pensée, d’émotion. Plus rien : ce serait  le néant. Ceci constitue l’essentiel de la « pensée matérialiste » à laquelle se rattache la « science officielle ». Selon le matérialisme, tout est matière et appelé à disparaitre totalement, irréversiblement.

Pour d’autres personnes, d’autres scientifiques, nous sommes une conscience (baptisée encore esprit ou âme), une entité immatérielle  incarnée provisoirement  dans un corps de chair et qui ne disparaitrait jamais, même après la mort. Le corps physique  serait donc  une enveloppe, un vêtement périssable, provisoire, que nous portons durant notre courte existence terrestre pour l’abandonner à notre décès. Pour ces gens, la conscience existe indépendamment du cerveau.  Elle n’est pas produite par ce dernier, mais l’alimenterait  durant la vie, comme un courant électrique allume une ampoule. Quand cette dernière se casse ou devient non fonctionnelle, le courant, quoiqu’invisible, persiste et peut alimenter une autre ampoule ou un appareil électrique différent. Il existe une deuxième comparaison : celle du téléviseur, lequel  fonctionne grâce à ce qu’on appelle les « ondes hertziennes » invisibles... Quand le téléviseur (le cerveau) est débranché, non fonctionnel ou brisé: plus aucune image n’apparait  sur l’écran. Néanmoins les ondes hertziennes continuent d’exister et peuvent faire fonctionner un autre poste de télé ou le même, si ce dernier n’est pas définitivement endommagé.  Ceci résume l’essentiel de  la  « pensée spiritualiste ».

Qui a raison des deux camps, les matérialistes ou les spiritualistes ?

 Terminons   par une citation du fondateur de la médecine expérimentale, Claude Bernard (1813-1878) :

 « Je suis persuadé qu’un jour viendra où le physiologiste, le poète et le philosophe parleront la même langue et s’entendront tous. »

 

Mais, je n’ai pas oublié  ta toute première question, à savoir « qu’est-ce qui se passe quand on meurt » ? On y reviendra ….

 

À suivre

 Erold JOSEPH,

Docteur en médecine, pneumologue, expert en santé publique, santé scolaire, promotion de la santé et de l’interrelation santé/éducation

Courriels : eroldjoseph2002@yahoo.fr  et eroldjoseph2002@gmail.com

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