Réunion du Conseil de sécurité : présentation de la situation par la délégation haïtienne

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Monsieur le Président,

Permettez-moi tout d’abord de présenter mes condoléances attristées à l’Ambassadeur Michel Biang de la République gabonaise suite au décès soudain du Ministre des Affaires Etrangères de ce pays frère.

Je voudrais saluer la présidence japonaise du Conseil et remercier les membres du Conseil de sécurité pour l’intérêt qu’ils continuent de manifester face à la crise multidimensionnelle qui frappe Haïti.

Je salue la participation à cette réunion du Ministre des Affaires Etrangères de la République dominicaine et du Représentants Permanents du Canada et celui du Bélize au nom de la Communauté des Etats de la Caraïbe (CARICOM).

Je remercie la Représentante Spéciale du Secrétaire Général, Madame Helen La lime pour son exposé éclairant sur les développements récents en Haïti et pour la présentation du rapport S/2023/41 du Secrétaire général qui nous fournit un diagnostic complet sur la situation sociale, politique, économique et sécuritaire en Haïti, assorti de nombreuses observations opportunes.

 

Monsieur le Président,

Nous sommes à mi-parcours du mandat du Bureau Intégré des Nations Unies en Haïti renouvelé le 15 juillet 2022 pour une année. Cette réunion constitue donc pour nous une évaluation qui permettra de voir les progrès accomplis, les lacunes à combler et les défis à surmonter dans l’exécution de son mandat. Elle survient seulement un mois après la réunion du 21 décembre dernier où le ministre des Affaires Etrangères, Son Excellence Monsieur Jean Victor Généus, était présent pour présenter les derniers développements de la situation globale dans le pays. Il en avait profité pour renouveler la requête du Gouvernement auprès du secrétaire général de 2 l’ONU pour un appui robuste en vue d’aider la Police Nationale pour faire face aux défis sécuritaires et humanitaires auxquels le pays est confronté.

 

Monsieur le Président,

Nous nous félicitons que le Rapport du Secrétaire général ait souligné, malgré la crise multidimensionnelle, certaines avancées importantes réalisées par le gouvernement. A cet effet, sur le plan politique, la signature le 21 décembre 2022, de l’accord intitulé « Consensus National pour une transition inclusive et des élections transparentes » constitue sans conteste un accomplissement majeur. Ce document qui a été adopté en Conseil des Ministres et publié dans le journal officiel Le Moniteur le 3 janvier dernier, constitue une feuille de route devant guider le pays vers la sortie de cette grave crise qu’il traverse. Il prévoit la mise en place des structures politiques, à savoir le Haut Conseil de Transition (HCT), constitué de 3 membres venant du secteur privé des affaires, du secteur social et du secteur politique, et un Organe de Contrôle de l’Action Gouvernementale (OCAG), composé de 21 membres, devant lequel le gouvernement devra rendre compte. Par ailleurs, un conseil électoral provisoire devant organiser les joutes électorales sera bientôt installé.

Il est prévu dans la feuille de route du HCT et de l’OCAG un échéancier clair devant conduire aux élections et au rétablissement des institutions républicaines au cours de l’année 2023. Le cap est mis sur les élections et le Premier Ministre en a fait l'annonce, dans le but de rassurer les participants aux prochaines joutes.

Il convient également de signaler qu’aux termes de cet accord, le gouvernement sera ouvert à de nouveaux secteurs.

Le gouvernement se réjouit que ses efforts aient été couronnés de succès et aient été reconnus par de nombreux secteurs tant au niveau national qu’au niveau international. Le secteur privé des affaires, le secteur associatif et le secteur politique ont tous félicité les efforts du gouvernement visant la recherche d’un consensus national pour mettre le pays sur la voie du retour à l’ordre constitutionnel. Il en de même au niveau international, de l’Union européenne et du département d’Etat américain qui ont salué l’Accord du 21 décembre La communauté internationale encourage les acteurs politiques à poursuivre ce dialogue inclusif devant conduire à la restauration des institutions démocratiques.

 

Monsieur le Président,

En matière d’Etat de droit, il y a lieu de mettre en exergue deux faits non négligeables. Le premier concerne la nomination du président de la Cour de Cassation, la plus haute instance judiciaire du pays, choisi parmi les juges les plus anciens. D'autres Juges, seront nommés pour compléter la composition de cette importante institution et la rendre à nouveau fonctionnelle après être restée plus de 18 mois inopérante. Le deuxième fait important, une décision historique par sa portée, concerne la recommandation du Conseil Supérieur du pouvoir Judiciaire d’écarter de la magistrature un certain nombre de juges décriés par la clameur publique.

En dépit de toutes ces avancées significatives, la situation en Haïti demeure toujours très préoccupante et fragile comme l’avait bien souligné le ministre Généus lors de la réunion du 21 décembre 2022. Il ne faut donc pas se méprendre. Le pays continue à faire face à de nombreux défis, notamment les défis sécuritaires et humanitaires. Les cas de kidnapping dans la capitale continuent ainsi que la violence des gangs armés ; même les policiers ne sont pas exempts. Ainsi, au cours de la semaine écoulée plusieurs d’entre eux ont été assassinés.

La circulation des personnes et des biens continue d’être perturbée aux entrées Nord et Sud de la capitale. Ce qui contribue à asphyxier davantage l’économie du pays qui tombe en récession, engluée dans le marasme avec un taux de croissance négative depuis plus de 3 ans et une inflation atteignant près de 47 %. C’est une situation économique catastrophique qui entraine de graves conséquences sur les conditions matérielles de vie de la population vivant déjà dans la précarité.

La situation s’est aggravée par la crise humanitaire et l’insécurité alimentaire qui frappent près de la moitié de la population. De plus, la résurgence et la propagation du choléra constituent une véritable menace de santé publique pour le pays.

 

Monsieur le Président,

Le rétablissement d’un climat sécuritaire dans le pays demeure toujours une urgence pour le gouvernement. Il s’avère plus que jamais nécessaire et urgent d’adopter des solutions fortes à court terme pour rétablir un climat sécuritaire sûr et stable comme préalable à la création des conditions devant permettre d’avancer avec le processus. Sans la sécurité, on ne peut prétendre 4 à des élections honnêtes, transparentes et démocratiques, au rétablissement et fonctionnement normal des institutions dans le pays.

Nous faisons nôtre l’appel lancé par le Secrétaire général dans son rapport au paragraphe 75, nous citons :« Malgré la fin du siège du terminal pétrolier de Varreux, je réaffirme qu’il faut de toute urgence déployer une force armée spécialisée, comme je l’ai expliqué dans la lettre que j’ai adressée au Conseil de sécurité le 8 octobre. » : Fin de citation.

S’agissant des sanctions, le Gouvernement salue le travail du Comité des sanctions et du groupe d’experts qui d’ailleurs doit se rendre en Haïti très prochainement. Il espère qu’ils effectueront un travail efficient qui permettra de punir les vrais coupables.

 

Monsieur le Président,

Nous n’avons cessé de le répéter ici que l’heure est grave. Il nous faut beaucoup plus d’actions. Il n’y a pas de place pour la lassitude. Nous avons une obligation d’agir vite. Nous nous félicitons des efforts déployés par les membres du Conseil sur la situation en Haïti et nous profitons de cette opportunité pour les encourager à œuvrer davantage, en vue d’aboutir à un consensus concernant l’appel du 7 octobre 2022 du Gouvernement à la communauté internationale, au déploiement immédiat d’une force internationale spécialisée pour renforcer les efforts de la Police Nationale d’Haïti (PNH), afin de lutter contre les gangs. C’est un impératif du moment. Car, il s’agit de maitriser les gangs armés, rétablir l’ordre et la paix par l’exécution d’un plan national de sécurité. Il n’y a plus de délai et la situation sécuritaire risque de s’aggraver chaque jour, au désarroi d’un peuple en détresse qui souffre amèrement. Ne pas agir c’est ne pas pénétrer la profondeur de la crise.

L’objectif final fixé par le Premier Ministre Ariel HENRY est de remettre le pouvoir à des élus capables d’adresser les grands défis politiques et socioéconomiques auxquels le pays est confronté. Le gouvernement d’Haïti renouvelle son appel à la solidarité agissante de la communauté internationale pour l’aider à subjuguer le phénomène des gangs et lui permettre de conduire à terme le processus du retour à l’ordre démocratique dans le pays.

 

Je vous remercie

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