En 2011, le professeur Hérold Toussaint publiait un guide sur la manière de rédiger des textes universitaires. Un livre sans âge, car les besoins des étudiants restent quasiment les mêmes. Quarante chapitres qui captivent en plus d’être pédagogiques.
Tout en faisant des rappels historiques pertinents, l’auteur présente ce que devrait être l’université et le comportement qu’on est en droit d’attendre des étudiants. Aussi élabore-t-il à l’intention de ceux-ci un catalogue de bonne conduite contenant des techniques pour booster la mémoire et des suggestions sur la manière d’y parvenir. Chaque chapitre traite d’une problématique universitaire particulière de façon ludique afin de motiver la gent estudiantine à faire des recherches, chemin de la vérité et de la déontologie.
Des guides existent dans tous les domaines. En France, dans ce genre de manuels, on trouve surtout des informations sur les droits et devoirs des étudiants à l’égard des institutions étatiques chargées de leur apporter des aides substantielles. Cependant, celui que nous présente Hérold Toussaint va au-delà de ces informations universitaires et aborde la méthodologie même du travail intellectuel et tout ce qu’un étudiant doit savoir sur ce qui l’attend, une fois admis à l’université. Tout cela est présenté sous forme de questions et de réponses comme fil conducteur d’une pédagogie.
L’auteur part de l’idée que pour mieux étudier, il faut se connaître. C’est la raison pour laquelle il entraîne le lecteur dans le fonctionnement du cerveau, car il est aussi psychologue. C’est tout le charme de ce petit livre qui place la trajectoire de l’étudiant haïtien sous des auspices lumineux afin que ce dernier réussisse ses études et soit un bon citoyen, un patriote ou un nationaliste au bon sens du terme. Car dans ce guide, l’auteur ne se contente pas seulement d’appeler à une conscience estudiantine mais aussi citoyenne. À l’instar du diplomate Dantès Louis Bellegarde qui avait créé la fête du drapeau et de l’université pour rallumer la flamme du patriotisme haïtien après la tragédie de l’occupation américaine d’Haïti (1915-1934), ce manuel nous donne un aperçu du rêve de grandeur qui habite l’universitaire pour son pays et la jeunesse en particulier. C’est aussi un ouvrage universel dans son approche des problématiques dans la mesure où on retrouve les mêmes difficultés sur presque tous les campus.
L’importance de la recherche
Dans un long plaidoyer, Toussaint soutient qu’il n’y pas d’étudiants dignes de ce nom sans le désir d’effectuer constamment des recherches. Il en est de même pour les professeurs. La curiosité doit toujours être de mise et ce tous les jours, souligne le professeur Toussaint. Rigueur dans les travaux scientifiques est le message qu’il martèle d’ailleurs depuis plus de vingt ans à tous ceux qui suivent ses cours. Ce qu’il répète aussi abondamment dans cet ouvrage.
Le corpus universitaire est bien servi avec ce livre de recettes. Tout y est : à part les stratégies de rédaction de textes susceptibles de capter l’attention du professeur, on y trouve aussi l’initiation, l’immersion. Ce que Toussaint appelle « manuel de méthodologie du travail intellectuel » correspond « aux exercices que s'imposent les sportifs, aux travaux d'ateliers des apprentis, aux gammes des musiciens, aux leçons de conduite automobile, aux manœuvres militaires ». Pour dire que l'étude est avant tout « apprentissage ». « Elle comporte une technique sur un ensemble de règles, comme un édifice sur sa base, explique-t-il. Pour réussir, il est donc essentiel de croire à la possibilité d'aboutir. La foi dans le succès fait partie du succès même. Elle commande l'usage et l'efficacité de la technique, elle est la condition primordiale de toute réussite. »
Si le livre ne dit rien sur le statut d’étudiant en Haïti et ses droits, l’auteur n’a pas pour autant manqué de souligner le déficit étatique dans le domaine universitaire. Ce qui traduit aussi sa préoccupation principale de guider les étudiants haïtiens.
La richesse de sa bibliographie fait que ses publications font autorité dans le domaine universitaire haïtien et ailleurs. Il publie d’une manière soutenue des travaux de vulgarisation universitaires. Parfois, il met ses étudiants à contribution, ce qui représente pour ces derniers un excellent apprentissage.
Avec le Collectif des universitaires citoyens (CUCI), il a publié plus d’une vingtaine d’ouvrages portant sur des travaux universitaires, traitant de sujets importants pour le pays. L’un des plus importants est La guerre des diplomates en Haïti : quand Ricardo Seitenfus veut sauver son Brésil montrant toute la complexité des relations entre Haïti et ce que l’on appelle les « amis d’Haïti ». Un travail de haute qualité qui aurait dû alerter les décideurs de notre pauvre pays, car il avait remis les choses à leur place avec des arguments historiques bien étayés.
Depuis, le Professeur ne s’était pas arrêté en si bon chemin et continue de publier des livres universitaires, avec une cadence qui ne relève pas du tout de la routine, tant les sujets de ses livres sont variés, et font appel à presque toutes les disciplines universitaires. En tout cas, ce guide reste un travail de grande envergure, un dispositif pédagogique qui défie le temps.
Maguet Delva
