Par Dominique Domerçant
De la révolution haïtienne à une destination canadienne, d’une célébration universelle et symbolique à une institution culturelle et éducative, l'aménagement dans les proximités de la station de métro montréalais du musée Vertières se veut plus qu'une simple extension ou un espace d'attraction de plus. Le musée Vertières est à la fois un symbole identitaire pour la diaspora. Un outil éducatif pour le Canada et le monde. Un instrument de diplomatie culturelle pour Haïti.
Dans l'annonce du prolongement de la ligne bleue du métro de Montréal vers cinq nouvelles stations, parmi lesquelles figure Vertières, au début de ce mois de septembre 2025, c'est une nouvelle opportunité qui est offerte à la diaspora haïtienne et la diplomatie culturelle haïtienne pour se doter d'un premier musée avec une double mission ou vocation. Celle d'une part, de valoriser à l'échelle mondiale l'universalité de la révolution haïtienne du 18 novembre 1803, que symbolise Vertières. Et d'autre part, de vulgariser la contribution de la diaspora haïtienne dans le développement des autres grandes villes et nations du monde.
Dix-ans et plus, après avoir porté le projet de création du musée de Vertières en Haïti, en dehors de la publication des livres et articles consacrés sur le sujet, suivie par l’organisation à Montréal le 18 novembre 2023, par Les Ateliers Authentiques, il y a moins de deux ans, de l’exposition artistique “Les couleurs de la dignité”, en hommage à Vertières, et moins de deux semaines après la publication du 30 août 2025, dans les colonnes de Le National, de l'article consacrant Montréal la capitale culturelle de la diaspora haïtienne, participent dans la construction de cet édifice culturel destiné à revaloriser Haïti à l'échelle mondiale. Ils sont nombreux les autres spécialistes haïtiens et étrangers, des institutions de référence au Canada et ailleurs, qui interviennent dans la promotion de l'histoire et de la culture en Haïti depuis plusieurs années, qui ont certainement leurs pierres à apporter dans la construction de ce futur musée Vertières.
Dany Laferrière à lui seul, parmi d'autres figures importantes de la diaspora haïtienne au Canada, en dehors des actuels et anciens officiels québécois et canadiens, tous et toutes des descendants des guerriers et des survivants victorieux de la bataille de Vertières le 18 novembre 1803, disposent au moins trois places dans l'aboutissement de ce premier grands musée de la victoire d'Haïti au Canada et dans l'espace francophone. Leurs proches seront certainement heureux de voir leurs noms inscrits dans la liste d'honneur, parmi les promoteurs du projet. Leurs collègues seront également heureux ou même jaloux de découvrir leur image ou leur statue érigée dans la galerie des héros de la diaspora haïtienne. Et enfin, plusieurs des catalogues qui seront consacrés aux expositions et aux enfants qui visiteront le musée Vertières, porteront certainement leurs dans les différentes salles accueillant des expositions vivantes et virtuelles.
Depuis plus de cinquante ans, pratiquement le Canada ne manque jamais l’occasion de commémorer l'intégration des membres de la diaspora haïtienne sur son territoire, tout en investissant dans la célébration de leurs contributions. Si leurs noms figurent dans plusieurs registres, et sont gravés dans plusieurs plaques d'honneur éparpillées parmi différentes collections, seul le musée de la Diaspora haïtienne, au Canada, à défaut les prochaines salles qui seront consacrées aux nouveaux héros haitiens au musée de Vertières pourraient rassembler et réunir ces hommes et ces femmes, fiers et solidaires de leur pays d'origine.
D'ici l’inauguration de cette nouvelle station baptisée Vertières, la ville de Montréal, à travers cette nouvelle destination symbolique, culturelle et historique va bénéficier au fil des ans d'une grande visibilité mondiale, en particulier sur les médias sociaux, avec un pic élevé durant les périodes encourageant les prochaines commémorations de la bataille de Vertières, le 18 novembre. Nombreux seront les Haïtiens qui vivent à Montréal, ou dans d'autres villes du Canada, et de passage dans ce territoire, qui ne vont pas rater l'occasion de se prendre en photo à la prochaine station de Vertières à Montréal. Une nouvelle destination qui va s'imposer dans le quotidien et l'agenda des Haïtiens encore fiers de leurs héros et héroïnes.
Dans un mariage entre la diplomatie culturelle et l'économie de la culture, ce musée Vertières pourrait ainsi voir le jour. La diaspora haïtienne montréalaise, fière et debout, allait s'ouvrir un nouvel équipement à la fois éducatif, culturel et scientifique pour porter son histoire, pour parler aux autres nations et communautés étrangères établies au Canada. Plus qu'une simple station symbolique. Ce premier pas franchi par Dany Laferrière il y a quelques années, en inscrivant pour la première fois Vertières dans le dictionnaire français, et en posant les pieds sur le site de la prochaine station de métro Vertières, pourraient ouvrir la voie vers le prochain chantier du premier musée de la diaspora haïtienne au Canada. Le musée Vertières, un pont entre les héroïnes et les héros d'hier, d'aujourd'hui et de demain. Toutes et tous, gardiens de l'héritage du 18 novembre 1803.
Diplomatie culturelle proactive, Haïti pourrait grandement s'inspirer des différents musées du genre existant en Amérique du Nord, en particulier les musées de l'immigration à Montréal, et dans d'autres villes du Canada, les musées des Juifs, des Afros-descendants, des Mexicains, entre autres aux Etats-Unis. En misant sur les contributions croisées et la collaboration souhaitée des nombreux spécialistes haïtiens et intéressées par la question haïtienne, ces spécialistes de la muséologie et des autres disciplines connexes et complémentaires, en mettant l'aboutissement du chantier du musée Vertières au premier plan, seraient d'un apport majeur dans l'expansion du prolongement de la station Vertières, vers le futur musée Vertières.
Dans ce plaidoyer renouvelé pour la promotion de nouveaux lieux de mémoire et des savoirs sur la grandeur universelle de l'histoire d'Haïti, à travers ce nouveau chantier culturel, il reste pratiquement beaucoup d'étapes à franchir. En dehors de l'obligation d'actualiser et d'adapter le plan de création du Musee Vertières à Montréal, qui passe par la phase de conception et de fondation, incluant la constitution ou l'élargissement du comité fondateur, l'étude de faisabilité, la definition du concept muséal, la phase de mobilisation et de partenariat représente l'une des étapes les plus importantes pour voir un jour ouvrir les portes de cet édifice de prestige et de grandeur.
De la mobilisation de la diaspora haïtienne, comme principal bénéficiaire du projet, en passant par les partenariats institutionnels et internationaux, le financement du futur musée Vertières, devra obligatoirement passer par différentes sources de financement telles les subventions publiques (Quebec, Canada, municipalité), les fonds privés des philanthropes et entreprises de la diaspora, des mécènes internationaux, et sans oublier des institutions internationales comme l'UNESCO, la Banque mondiale, et d'autres fondations culturelles. A quand le lancement des prochaines campagnes de financement pour ce musée ? Quels sont les principaux produits dérivés (livres, art, artisanat) qui seront vendus au profit de cet ambitieux projet en dehors des concerts et d'autres événements à organiser avec des artistes haïtiens et caribéens pour offrir et ouvrir bientôt les portes du musée Vertières ?
Du nombre des cinq principales phases indispensables pour porter jusqu'au bout ce projet, telles : La conception et la fondation ; La mobilisation et les partenariats ; Le financement ; La réalisation entre la construction ou l'aménagement de l'espace ; Et enfin le fonctionnement et le rayonnement du prochain musée Vertières, qui deviendra un patrimoine commun entre le Canada et Haïti, ce musée Vertières à Montréal se donnerait parmi ses principaux objectifs de rappeler que la Victoire de Vertières n'est pas un simple souvenir figé, mais une bataille vivante et continue pour la liberté et la dignité, à transmettre aux générations futures.
Dominique Domerçant
