HAÏTI-CRISE

« Déploiement d’une force internationale » de plus en plus de voix s’élèvent pour Haïti

Le Conseil de Sécurité de l’ONU a tenu une séance ouverte sur le dossier d’Haïti le jeudi 6 juillet 2023. En cette occasion, des dirigeants de la Jamaïque, de la France, de la Chine et de l’Équateur entre autres continuent de faire des plaidoyers pour une franche solidarité internationale avec notamment le déploiement d’une force internationale spécialisée afin d'aider Haïti à sortir de cette impasse imposée par l’hégémonie des gangs armés.

 

« Haïti réclame, une fois de plus, le bénéfice de l’urgence », affirme le Chancelier haïtien, Jean Victor Généus,  qui a renouvelé son appel au Conseil de sécurité des Nations unies en faveur du déploiement à la hâte d’une force internationale.

 

 

En effet, le dossier de la République d’Haïti reste au centre des débats à l'échelle internationale où des voix s'élèvent pour permettre à la première République noire indépendante de se remettre de cette crise socio-économique, politique et sécuritaire délétère. « L’insécurité perpétuelle n'empêche pas seulement l'accès à la santé, à l'éducation et à d'autres biens et services de base. Mais, elle entraîne aussi une hausse d'une justice populaire qui menace d'aggraver le déferlement alarmant de violence. Alors que nous nous montrons solidaires à Haïti, cette solidarité n'a aucun sens sans une action urgente pour aider nos frères et nos sœurs en Haïti à parvenir à une paix, la stabilité, et la prospérité qu'ils méritent », a déclaré Andrew Holness, Premier ministre de la Jamaïque lors de cette séance ouverte du Conseil des Nations unies. 

 

« Ne laissons pas Haïti de sombrer dans le chaos », a martelé le représentant permanent de la France auprès des Nations unies, Nicolas de Rivière, dans son intervention lors de cette séance. Il a appelé la communauté internationale à agir le plus rapidement possible pour empêcher à la génération future de vivre les séquelles de cette violence qui règne dans le pays. «  Regardons les choses en face. Sans sécurité, il n'y aura ni développement, ni État de droit, ni justice pour les victimes, mais il n'y aura pas non plus d’apaisement social en Haïti sans le rétablissement des institutions. Ainsi, la France exhorte la communauté internationale à se mobiliser de toute urgence. Elle se fait l’écho de l’appel lancé par le Secrétaire général des Nations unies. Elle soutient le déploiement d’une force en appui à la Police nationale d’Haïti via un engagement plus robuste des Nations unies », a ajouté Nicolas de Rivière. 

 

Parallèlement, en faisant référence au deuxième anniversaire de l’assassinat du président Jovenel Moïse, M. Nicolas de Rivière a fait savoir qu'il est impératif de renforcer la lutte contre l'impunité afin de reconstruire une justice efficace qui est une obligation pour trouver une fin durable contre la violence en Haïti. « Ce Conseil, de son côté, doit rapidement adopter de nouvelles sanctions contre les criminels qui brutalisent la population haïtienne », argumente-t-il. 

 

Toutefois, il a souligné que la France encourage un dialogue politique inclusif et appelle les protagonistes de la crise globale qui mine le pays de mettre de côté leurs différends. L’objectif demeure l’organisation d’élections démocratiques lorsque les conditions sécuritaires seront réunies. 

 

« Si un flot important d'armes continue à arriver entre les mains des gangs haïtiens, il serait futile pour la communauté internationale d'essayer d'aider plus la police haïtienne. La Chine plaide depuis longtemps pour un large embargo sur les armes », a tenu à faire remarquer, pour sa part, l’ambassadeur chinois Zhang Jun au cours de la séance ouverte qui s’est tenue à New York, le jeudi 6 juillet 2023. En ce sens, M. Zhang Jun interpelle le Conseil à se concentrer sur la lutte contre le trafic d'armes en Haïti. 

 

De son côté, M. Carlos Gutierrez, le représentant de l’Équateur dit croire qu'Haïti ne pourrait penser à organiser les élections si elle ne bénéficie pas d'une assistance internationale en matière de sécurité. Dans ce cas, il plaide pour une franche coopération en faveur de la population haïtienne en vue de l'aider à faire aux nombreux défis auxquels elle est confrontée depuis certains temps.

 

Toujours dans le cadre de cette rencontre organisée par le Conseil de Sécurité des Nations unies sur la situation d’Haïti, dans son intervention, la Cheffe du Bureau intégré des Nations unies en Haïti, Marie Isabel Salvador,  a indiqué que la situation désastreuse en matière de sécurité en Haïti s'est aggravée depuis son premier exposé au Conseil.  La violence se poursuit et s'est intensifiée, se déplaçant au-delà de Port-au-Prince, comme indiqué dans le rapport du Secrétaire général des Nations unies. L'apparition de groupes d'autodéfense ajoute une autre couche de complexité. Depuis avril, le BINUH a documenté le meurtre d'au moins 264 membres présumés de gangs par des groupes d’autodéfense, a-t-elle souligné. 

 

Parmi le peuple haïtien, à travers tout l'éventail politique, il existe un large soutien au déploiement d'une telle force. Il est vrai que parler de la présence d'une Force internationale en Haïti pourrait susciter des réactions mitigées. À l'instar de ce que le Secrétaire général a entendu lors de sa visite en Haïti, j'ai moi aussi entendu, depuis mon arrivée, des appels à un soutien international en matière de sécurité. La Force internationale robuste dont Haïti a besoin doit compléter et renforcer, et non remplacer, la Police nationale d’Haïti, dans le plein respect de la souveraineté nationale d'Haïti, dit-elle.

« En tant que parties engagées dans un dialogue continu, j'attends avec impatience la visite en Haïti du Groupe de personnalités éminentes de la CARICOM dans le cadre d'un soutien continu à la poursuite des consultations inter-haïtiennes sous les auspices du Haut Conseil de Transition », a-t-elle déclaré.

 

Alors que la transition politique et la lutte contre les gangs doivent rester sur des voies distinctes, les deux sont inextricablement liées, ajoute la représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies en Haïti.

Selon elle, l'amélioration de la sécurité et la poursuite du dialogue politique donneraient la possibilité d'organiser des élections. «  C'est une étape cruciale sur la voie du rétablissement des institutions démocratiques et des élus à tous les niveaux de gouvernement. Le secteur de la justice continue de faire face à de graves défis, mais il y a quelques lueurs d'espoir, notamment l'adoption d'un décret contre la corruption, le blanchiment d'argent et le commerce illégal d'armes. Je suis également optimiste quant aux efforts continus des autorités nationales pour améliorer le processus de vérification et de certification au sein du système judiciaire. La violence sexuelle, y compris les viols collectifs et les mutilations, continue d'être utilisée par les gangs pour terroriser et infliger des souffrances aux populations et aux quartiers sous le contrôle de rivaux. », 

 

En sus, lors de son intervention au Conseil de sécurité des Nations unies, Maria Isabel Salvador a laissé entendre qu'en plus des dommages physiques et mentaux, la violence des gangs a également un impact préjudiciable profond sur les droits économiques et sociaux. « L'accès à l'éducation, à la nourriture, à l'eau, à l'assainissement et aux services de santé a été sévèrement limité par l'activité des gangs. Dans les zones touchées par la violence des gangs, les activités économiques sont périodiquement, sinon en permanence, paralysées. », s'est-elle alarmée.

 

Vladimir Predvil 

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