L’Association mondiale pour la communication chrétienne (WACC), en anglais World Association for Christian Communication (WACC) Global, en collaboration avec le réseau du Projet mondial de monitorage des médias ( Global Media Monitoring Project GMMP), a lancé le rapport mondial GMMP 2025. Ce rapport présente les conclusions de la 7e édition de la plus vaste et ancienne étude internationale sur la représentation des genres dans les médias d’information. En Haïti, selon un communiqué publié ce 9 décembre 2025, la WACC a présenté le rapport GMMP+30, basé sur une journée de monitorage réalisée le 6 mai dernier dans 94 pays.
Le communiqué précise que, pour Haïti, les données ont été collectées à partir de 10 médias notamment presse écrite, radio, télévision et en ligne par 27 bénévoles issus du Département de communication de la FASCH/UEH et de REFRAKA. Il en ressort que la violence basée sur le genre (VBG) est absente des sujets traités par les médias haïtiens. La présence des femmes est de 38 % dans les thématiques économiques, 21 % dans celles liées à la criminalité et à la violence (hors VBG), et seulement 10 % dans les sujets politiques. En tant que sujets, sources ou journalistes, les femmes restent largement invisibilisées.
Dans un contexte national marqué en 2025 par une instabilité politique persistante, une insécurité généralisée, une crise économique prolongée et une urgence humanitaire aiguë, les femmes véritables potomitan (piliers) des familles haïtiennes sont pourtant très peu représentées dans les nouvelles. Elles apparaissent à 0 % comme politiciennes, à 41 % comme activistes ou travailleuses d’organisations de la société civile, mais à 100 % comme étudiantes, élèves ou écolières.
Par ailleurs, les professionnels des médias, eux-mêmes parmi les plus d’un million de déplacés internes, sont durement touchés par la crise multidimensionnelle qui frappe Haïti depuis plus de cinq ans. Ciblés par les gangs, les journalistes exercent leur métier dans un climat de danger extrême, où informer relève d’un véritable acte de bravoure. Les infrastructures médiatiques sont attaquées, et les journalistes sont victimes d’enlèvements et d’assassinats. Les médias sont parfois vandalisés et incendiés par des groupes armés.
Cette situation met particulièrement en péril les femmes journalistes, qui ne représentent que 14 % de la presse écrite, 6 % des reporters radio, mais 93 % des présentatrices à la télévision. Par contre, aucun reportage n’a abordé la violence basée sur le genre le 6 mai, et 25 % des contenus analysés véhiculaient des stéréotypes, notamment dans les cas de harcèlement sexuel, de viol ou d’agression sexuelle. Les sujets traités portaient principalement sur la politique, avec une prédominance de figures masculines issues du gouvernement.
Depuis 1995 y compris en 2010 après le séisme Haïti participe à cette initiative grâce à l’engagement de professeurs et d’étudiant·e·s bénévoles du département de communication et de membres de REFRAKA. En 2025, les organisations LANBI-éducatif et MIDEL Communication ont rejoint l’effort pour renforcer la diffusion des données du GMMP+30 aux niveaux global, régional et national, et pour appuyer les actions de plaidoyer.
La WACC et la Global Alliance on Media and Gender (GAMAG) co-organisent cet événement en ligne, dans le cadre de la Journée des droits humains et de la clôture des « 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre ».
Réalisé tous les cinq ans depuis 1995, le GMMP évalue l’évolution de la représentation des femmes et des hommes dans l’actualité. Cette initiative phare de la WACC accentué sur les dynamiques de pouvoir, de voix et de visibilité dans les médias à l’échelle mondiale.
Selon le professeur Ary Régis, ancien président de la WACC Caraïbes, malgré 30 années d’efforts, les progrès en matière d’égalité de genre dans les médias restent limités. Il souligne que si le rapport mondial repose sur des données issues de 94 pays, le rapport national pour Haïti demeure partiel et peu visible.
Le professeur insiste sur la nécessité de stratégies de sensibilisation et de plaidoyer pour que les acteurs nationaux y compris l’État haïtien et les organisations féminines s’approprient les résultats du rapport afin d’améliorer la situation. Il déplore le manque de mobilisation des médias haïtiens pour exploiter pleinement les conclusions de cette étude.
Bien que le rapport national complet pour Haïti ne soit pas encore finalisé, des données préliminaires sont disponibles. Toutefois, l’absence de stratégie globale impliquant l’État ou le ministère de l’Éducation limite l’impact de ces constats. Certaines organisations, comme le Réseau Femmes Radio Communautaire, ont néanmoins utilisé les données pour orienter leurs programmes et émissions. Les résultats du GMMP 2025 reposent sur l’analyse de plus de 30 000 articles de presse collectés le 6 mai dans 94 pays.
Le lancement du rapport offre une plateforme de réflexion critique et de partage des conclusions nationales et régionales, avec la participation de partenaires du GMMP d’Asie, des Caraïbes, d’Amérique latine et du Moyen-Orient, ainsi que de la présidente du GAMAG, Aimée Vega Montiel.
« Après trois décennies et sept cycles du Projet mondial de monitorage des médias, ce rapport montre à quel point cette promesse reste urgente et inachevée », déclare Kirsi Madi, sous-secrétaire générale des Nations unies et directrice exécutive adjointe d’ONU Femmes.
« Cette étude à long terme, fondée sur des données concrètes provenant de plus de 160 pays depuis 1995, témoigne d’une industrie mondiale de l’information à un tournant en matière d’égalité des sexes », conclut Sarah Macharia, auteure principale du rapport et coordinatrice du GMMP.
Likenton Joseph
