L’espace public genré : les troubles sexuels demeurent dans son ombre

De bouche à oreille, la sexualité prend place dans notre quotidien. Mais ses troubles ne résonnent pas plus fort que le tambour sur la tonnelle. Soit dans un silence absolu, soit sur une note grave, entre quatre murs d’une clinique. Pour reprendre l’urologue Samuel Presner David, c’est toujours pour une question de « bann ».  Il ne s’agit pas du groupe traditionnel qui fait danser les foules pendant les périodes carnavalesques, mais plutôt d’un compas langoureux, murmuré à deux, sous les néons d’une soirée lente, de l’éveil au frisson.

Médecin Mobiles, une association à but non lucratif formée de jeunes professionnel·le·s de la santé, s’est penchée sur cette affaire, encore taboue dans notre société. La méconnaissance et l’ignorance qui l’entourent en sont, sans doute, la force vitale. Ce samedi 24 mai, à la veille de la fête des mères, l’association a lancé une conférence hybride sur la question. La grande thématique du jour : « La sexualité et ses troubles ». Une occasion pour mettre les cartes sur table et sensibiliser le public sur des réalités trop souvent tues. Le fil de la discussion était mené par trois spécialistes de renom : la sexologue Fabienne d’Haïti, l’urologue Samuel Presner David et le psychologue Jean Pétuel Derosiers. Trois voix distinctes qui ont porté, d’un seul timbre, le poids du sujet. Ils étaient assistés par Lancia Pierre, qui faisait le nœud et assurait la coordination entre les intervenants et le public. De nombreuses personnes, venues de divers horizons, ont répondu à cet appel urgent et nécessaire, dans ce climat tendu et alarmant sans précédent. Car l’espace public, bien qu’il soit le berceau du genre, les troubles sexuels perdurent dans son ombre. Une ombre épaisse, faite de moqueries, de larmes, de honte et de culpabilité. Parfois, cela a même le goût amer de la dépression.

Ainsi, un environnement toxique peut affecter la performance sexuelle. De plus, un réseau social faible et un manque de soutien figurent parmi les facteurs les plus courants à la racine de ces troubles, vécus par tant de personnes. Les intervenant·es ont insisté sur la nécessité d’un cadre de vie sain et sécurisant. Contrairement à ce que beaucoup croient, la baisse de performance sexuelle n’est pas toujours liée à un dysfonctionnement érectile. Elle peut également être influencée par des maladies comme le diabète, l’hypertension, les cancers rénaux… un traumatisme, ou encore par certains médicaments censés l’améliorer, mais qui produisent l’effet inverse. Ce qui n’empêche pas que le « bann », dans le langage populaire, reste parfois une source de discorde au sein des couples.

Les murs de la salle de conférence de l’Alliance Française de Jacmel ont vibré aux questions sensibles et pertinentes de l’assistance. L’addiction et les pratiques sexuelles contemporaines, ont été abordées sans détour. Grâce à la maîtrise et à la souplesse des panélistes, le dialogue est resté fluide, vivant, harmonieux. Parmi les conseils prodigués : cultiver la communication intime entre partenaires, adopter une alimentation saine et équilibrée, pratiquer une activité physique régulière. Cependant, de nombreux points sont restés enfouis dans les confins du silence, faute de temps. Cet échange a été une réussite, mais le combat contre les idées préconçues n’en est qu’à son commencement. Cette initiative louable devrait faire école, et ceux qui se prétendent porteurs de lumière pour une génération en dérive gagneraient à l’embrasser pour aller plus loin, ensemble.

Pour revenir à la genèse, Bann est un mélange d’accords : sur un rythme discret, mêlé d’un tempo basé sur l’humeur de l’instant, la confiance, et l’estime. Entre la pulsation publique et le murmure privé, entre la fête collective et le désir intime.

 

Wesly SAINTIL

Wesly SAINTIL, Connu sous le nom d’Intellect’Art, est étudiant en Droit à l’École de Droit et des Sciences Économiques de Jacmel (EDSEJ). Il est également Accompagnateur psychosocial, nouvelliste, et un fervent passionné des lettres et des arts. Finaliste du prix littéraire Mot d’un Écolier organisé par REPONSE, ainsi que de la première édition du Festival d’Éloquence de JISTIS en 2021, il s’illustre par son talent littéraire et son éloquence. Par ailleurs, il enseigne l’étude de texte et l’expression écrite, transmettant ainsi sa passion pour la langue et la littérature. Wesly est également coordonnateur culturel local du festival des îles qui marchent cette année et actuel président du comité de Livres en Liberté à Jacmel, où il œuvre pour la promotion de la lecture et de la culture dans sa communauté.

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