Amalgame !

Tour de passe-passe! Prestidigitation ! Ou simplement de la magie. Rien que de la poudre aux yeux. Car il faut dire du chat qu’il est un chat et au Mardi Gras que tu sais reconnaître les masques peu importe à quel point ils sont laids. 

Après l’épisode Ariel, l’amalgame était prévisible et annoncé. Du moins pour les pétris d’histoire d’Haïti bien imbus du brigandage politique à partir notamment de 1911 à 1915 avec les incursions répétées des paysans armés du Nord’Est (les Cacos), donnant lieu à deux journées chaotiques et sanglantes les 27 et 28 juillet 1915. 

Et puis, l’arrivée au deuxième jour, des 330 marines, envoyés par Woodrow Wilson, le 28e président américain, avec la mission express de protéger les intérêts américains dans le pays. Et patati et patata ! On en connait la suite. 

Et d’ailleurs, il n’est point besoin d’aller chercher si loin. Les férus d’histoire récente se retrouveront facilement dans la continuité de la même saga politique haïtienne des années 1986 à 1994. 

Puis, le débarquement le 19 septembre 1994 d’environ 20 mille hommes sur le territoire national suivant les instructions de Bill Clinton, le 42e président des États-Unis. Avec lui, c’est aussi une histoire d’escroquerie, de corruption et de vol au détriment des Haïtiens. 

Et la saga s’est poursuivie pour qu’en 2004 plusieurs centaines de soldats américains et français se soient encore une fois installés sur la terre des ancêtres pour y imposer leur quatre volontés tel que cela se passe en 2024. C’est un film que nous avons déjà vu se dérouler mais qui nous a toujours laissés indifférents on dirait.

Ce sont des cycles de tergiversation politiques incessants, continus et rébarbatifs. Des moments que nous ressassons et ruminons telle la chèvre et son herbe. Les années passent et nous restons les mêmes avec nos tares et nos pratiques malsaines qui ne nous quittent jamais. Nous sommes ce peuple attaché à ses maux, adorant et admirant sa misère, et qui se complait dans sa dépendance séculaire. 

Ses fulgurances et sa gloire passée n’impressionnent plus personne. Et l’on ne se souvient même plus ou presque plus de la Ravine-à-Couleuvres en février 1802 ou de la Crête-à-Pierrot en mars 1802 ni même de l’épopée de novembre 1803. 

Naturellement il serait très malaisé d’identifier le politique haïtien ou l’Haïtien d’aujourd’hui tout court à ses prouesses guerrières et militaires qui ne lui ressemblent en rien. En fait, il faut dire qu’après ces moments d’éclats majestueux, Haïti n’a connu que très peu de faste.

Joseph Anténor Firmin, ministre des Affaires Étrangères (1889-1891) sous Florvil Hyppolite (1889-1896), avait réaffirmé et imposé la souveraineté haïtienne face aux puissances impérialiste, les États-Unis d’Amérique notamment. (L’Affaire du Môle-St-Nicolas lorsque Firmin s’est opposé et a fait échec aux velléités américaines d’implanter, avec la demande d’une portion exclusive du territoire, une base militaire). 

Il doit se retourner dans sa tombe, l’auteur de l’Égalité des races humaines, de voir ce que les hommes politiques haïtiens sont devenus et ce qu’ils ont fait d’Haïti! 

Même s’il faut reconnaître également que l’Oncle Sam a toujours imposé à ce pays des échanges fondés sur des relations de Métropole et de colonie, de maîtres et d’esclaves. Une parfaite réédition moderne des rapports d’exploitation bestiale mise en place par les puissances coloniales européennes et dont Haïti a toujours été la victime impénitente et privilégiée. 

Néanmoins, les escalades de violence résultant de la multiplication des bandes armées et l’incapacité des acteurs nationaux au cours des six dernières années, 2024 en particulier, ont fait basculer la terre des Aïeux dans un fossé inédit. D’Haïti désormais, il ne reste que le nom et la gloire passée. Plus d’État. Pus de nation. Et donc plus de souveraineté ni de dignité. 

Moins que des mineurs, nous sommes pris pour des hommes et des femmes dérangés mentalement, incapables de décider de leur propre destin. La Première République noire en est réduite à suivre de petits pays insignifiants auxquels elle dictait la marche à suivre. 

La Premier République noire est aujourd’hui un charnier. Une mascarade. Une pute indésirable dégoûtée, répugnée et répudiée. Elle est devenue vile, méprisable. Elle est un oiseau déplumé, une déception et une humiliation. 

Et parce que ses héritiers, pour la plupart, ne sont que des renégats, des parjures et donc des rebuts de l’humanité, la Première République noire n’existe plus que dans la mémoire des souvenirs. Ainsi l’amalgame est la résultante d’une déficience de leaders et de leadership, une absence de volonté collective, d’amour patriotique et d’abnégation. 

L’amalgame, c’est que la patrie est méconnaissable. Vilipendée et avilie. Alors que ceux qui portent le nom d’Haïtiens et d’Haïtiennes aujourd’hui, continuent de marcher sur ses débris plutôt que de les rassembler pour les raccommoder. 

Parce qu’en vérité, ils sont, tous autant qu’ils existent, des faux-jetons, des faux-culs qui n’avaient pas mérité de naître sous ces étoiles de majesté

et de paradis. 

 

Jackson Joseph 

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