Cessons de nous voiler la face

Notre manie d’occulter la réalité ou de la déformer pour s’accrocher à des demi-vérités comme faits historiques doit cesser.

Le non-respect des engagements pris par des acteurs de la classe politique haïtienne, tout comme primer les rapports de forces sur les principes établis à respecter et prioriser les intérêts personnels, ceux de son clan au détriment de ceux de la collectivité et de la communauté, sont parmi les causes de la situation difficile que traverse notre mère patrie. Haïti brûle dans l’indifférence de nos politiciens trop occupés à célébrer leur victoire longtemps souhaitée sur leur adversaire déclaré  du moment. Depuis plus de trois décennies, Haïti est le théâtre de plusieurs  rendez-vous manqués. 

Il est temps de nous engager collectivement dans une démarche constructive et positive. Il est plus qu’urgent de nous mettre debout et nous prendre en mains. Nous devons assumer nos responsabilités face à la dislocation de l’état haïtien, à l’insécurité, au désordre et déséquilibre  institutionalisés. On aurait plus intérêt à  réclamer l’extradition de l’ancien premier ministre Ariel Henry et traduire en justice toute son équipe ministérielle et le groupe  décisionnel plutôt que d’investir du temps dans l’analyse de propositions  d’instances étrangères,  pour une sortie de crise politique. Ces artisans  rendraient compte à la nation de leur gestion maladroite de cette trop longue transition qui n’a apporté que du malheur au pays. Ceux et celles qui auraient été reconnus coupables devant les tribunaux devaient normalement purger leur peine en prison. Pour la vérité et pour l’histoire, il nous faut rappeler que dans la nuit du 2 au 3 mars 2024, les grandes prisons de la région métropolitaine ont été vidées de la majorité de leurs occupants. Là encore, cette condition  rend improbable leur incarcération éventuelle et leur permet de bénéficier d’une impunité de fait. 

Réhabiliter les chefs des gangs armés pour des soi-disant services rendus est aussi indigne que de remercier le blanc d’avoir empêché à l’ancien premier ministre de rentrer dans son pays d’origine. 

La démission de l’ancien premier ministre qui est vite remplacé par un de ses anciens ministres est une pure mascarade. On dirait que les autres  ministres, les membres du Haut Conseil deTransition (HCT), les anciens conseillers et preneurs de décisions, ont eu une conduite exemplaire dans l’exercice de leur fonction, puisqu’ils n’ont pas de compte à rendre. Point besoin d’avoir une boule de cristal pour prédire que le même sort de l’ancien premier ministre Ariel Henry sera réservé à tous ceux et celles qui auraient décidé de donner suite au projet machiavélique et insultant de la CARICOM. 

Notre mémoire est courte et trop sélective. Des voix bien connues s’élevaient pour réclamer la démission de l’ancien Président Jovenel Moïse, lâchement assassiné dans sa résidence, et pour annoncer avec conviction certaine que le pays allait cesser de monter le mât suiffé et  sortir de l’agonie. De ces personnages, certains ont laissé le pays et d’autres tirent les ficelles pour plonger le pays dans une crise politique sans précédent. Même bien enracinée, aucune culture de l’impunité n’est invincible.Tant et aussi longtemps que les crimes, les agressions, les vols, la corruption, le banditisme restent impunis, nous allons sombrer dans l’abîme. 

Sommes-nous rendus à un point que la solution de tous nos problèmes internes doit être issue de la communauté internationale? L’ingérence étrangère malsaine peut nuire à divers secteurs d’une société pouvant ébranler les institutions et infrastructures essentielles et existentielles d’une nation. Les souris et les  rats semblent avoir bien compris qu’ils n’ont pas intérêt â faire garder leur progéniture par des chats pour se plaindre par la suite. On doit d’abord soigner son image, s’affirmer face aux autres et apprendre à être ferme  pour gagner du respect.   

Selon l’article premier de la constitution haïtienne de 1987: "Haïti est une République, indivisible, souveraine, indépendante, coopératiste, libre, démocratique et sociale".  Si tous les qualificatifs de cet article sont au fait des voeux pieux et ne reflètent pas la situation réelle du pays, revisitons cette constitution et projetons Haïti vers un nouveau système de gouvernance. 

Nous devons démasquer les hommes et femmes de service qui ont souillé  la mémoire des pères de la nation haïtienne et causé trop de tort au peuple haïtien. La culture de l’impunité doit prendre fin. Le pays a besoin de renouveler et rajeunir sa classe politique. Nous devons bâtir notre propre calendrier et établir des relations avec de vrais pays amis. Nos ennemis internes et externes, de par leur collusion, ont tout fait pour nous faire prendre conscience   qu’ils n’ont jamais été nos amis. Sachant que les vertus se perdent dans des intérêts facilement, soyons vigilants dans notre démarche quant aux futures relations avec d’autres pays étrangers. 

La restauration de nos institutions tout comme la reconstruction du pays est une responsabilité civile et citoyenne de tous les Haïtiens. 

Mettons-nous en mode solution et regardons vers un avenir prometteur pour qu’on puisse retrouver notre dignité.

Cessons d’être simples observateurs et nous voiler la face. 

 

Chrisnel Blot

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