Vers le salon de la formation et des métiers de la culture en Haïti ?

Dans un pays où plus d’un reconnaît les potentialités artistiques et culturelles qui sommeillent chez les jeunes en majorité, en dehors des opportunités culturelles offertes ou disponibles, dans plusieurs villes et régions du pays encore debout, il paraît urgent, dans ce contexte de migration accélérée provoquant le déplacement des familles, la délocalisation des activités économiques et socioculturelles, de prendre en compte cette triple dynamique relative aux réflexions, aux  recherches  et aux réseautages capables d’offrir un véritable état des lieux actualisé autour de la formation et les métiers de la culture en Haïti, afin de mieux planifier l'avenir de ce secteur dans ce contexte de crise majeure.

De plus en plus de professionnels des arts et de la culture, parmi les plus importants, en termes de connaissances, de compétences, de créativités et des expériences confirmées dans les différents domaines et filières qui composent les industries culturelles, continuent de migrer vers d’autres villes du pays, et dans d'autres pays. Ce vide laissé ne sera pas comblé du jour au lendemain. Même si la nature a horreur du vide. Il faudra encore plus de temps de préparation pour favoriser ce grand remplacement, même avec l'appui des technologies et de l'intelligence artificielle adaptées aux industries culturelles. La culture étant à la fois universelle et unique, c'est aux Haïtiens qu'il reviendra l'obligation de répertorier les pratiques, les opérations, les spécialités qui définissent les connaissances et  compétences à valoriser et à valider au sein des industries culturelles nationales. 

De simples passionnés, des amateurs, des apprentis aussi motivés qu'ils soient parmi les jeunes talents du pays, ne pourront pas valablement assurer la relève sans bénéficier d'une somme d'expériences à la fois qualitative et quantitative. Plus qu'un simple jeu d'enfants ou de passe-temps, la culture de nos jours est synonyme de défense des territoires imaginaires et économiques, et de science utilisée pour mesurer l'excellence de l'intelligence entre les civilisations et les nations.  Face à l'acculturation, la domination, les confrontations, les déconstructions et la reconfiguration des visions et des valeurs, il nous faut renouveler et renforcer le capital humain culturel haïtien !  

Dénombrer ce qui reste des ressources compétentes et qualifiées qui étaient impliquées dans la transmission des savoirs artistiques et culturels des rares institutions de formations initiales et supérieures du pays, parmi d’autres opérateurs qui participaient régulièrement dans le transfert des compétences culturelles,  se confirme dans la liste des urgences culturelles à prioriser dans le prochain agenda national pour le développement culturel en Haïti.

Découvrir la cartographie nationale des institutions de formation engagées directement et indirectement dans le développement des ressources, et la formation des professionnels de la culture haïtienne pourrait aider de façon objective dans l’exploration des atouts et l’exposition des limites de cette industrie culturelle de plus en plus affaiblie. Comment définir une nouvelle stratégie qui encouragerait le plus grand nombre des réseaux de nos universités (publiques et privées) en Haïti à renforcer, ou  à se doter des sections, des services ou des départements capables de développer des formations initiales et continues, en vue d'offrir de nouvelles spécialisations dans les domaines des professions de la culture ?

Dans le prochain salon de la formation et des métiers de la culture, tous les acteurs de la politique et de  l'économie, de l’éducation et de la culture, des arts et du patrimoine, appuyés par les collectivités, en particulier avec une forte mobilisation des jeunes depuis les bancs de l'école, seront  tous invités à découvrir ces nombreux métiers artistiques et culturels pratiqués à couvert et de façon informelle en Haïti. 

Dans les industries culturelles locales et dans la diaspora, il faudra inventorier de façon scientifique les anciens et nouveaux métiers, notamment les métiers culturels qui vont disparaître bientôt avec l'intelligence artificielle. Cette communication intelligence qui sera tenue autour de la somme des informations pertinentes relatives à la décomposition des opérations et à la déclinaison des activités permettrait ainsi d’offrir de nouvelles opportunités aux jeunes en matière d’orientation professionnelle dans le pays. Il est pratiquement impossible de penser au relèvement des arts ou au développement culturel sans investir dans la formation des créateurs et opérateurs ? 

Dans les arts de la scène incluant la musique, le théâtre, la danse, entre autres, en passant par les arts visuels qui prennent en compte l’univers du dessin (artistique, technique, scientifique), l’architecture, la photographie, la vidéographie et le multimédia, et sans oublier la mode, la littérature, l'histoire, la muséologie, entre autres, il faudra informer et former le public haïtien. Le monde bouge, autant que les industries culturelles et créatives imposent de nouvelles normes au niveau des multiples techniques de production, de transformation, de conservation numérique, de création de contenus, de diffusion, de promotion et de rentabilisation.  Ce sont plusieurs dizaines et des centaines de métiers artistiques, culturels et du patrimoine qui  sont désormais proposés aux jeunes du pays, comme alternative pour décrocher des certificats et des diplômes face aux choix de rester ou dans l’obligation de partir. Et pourtant, ils sont de plus en plus rares les opérateurs éducatifs et culturels mobilisés dans la formulation de ses nouveaux services et produits ? 

Dans le choix de rester vivre en Haïti, et en particulier pour évoluer dans la capitale haïtienne, il serait important pour les élites actuelles  de proposer comme alternative,  de telles opportunités de formation dans les domaines des arts et de la culture en ces temps de crise.  Ce qui pourrait de façon stratégique, contribuer au développement personnel de ces passionnés et talentueux apprenants de participer dans une forme de thérapie individuelle et collective, tout en s'investissant dans la revitalisation des liens au niveau du tissu social. Le rapprochement autour d’un projet commun des talents au sein d’une famille, dans chaque quartier et dans des villes voisines ne peut que contribuer dans l'amélioration des relations plus harmonieuses entre les habitants de chaque commune.  

Dans l’obligation de fuir à tout prix sa terre natale, les formations certifiées autour des métiers des arts et de la culture peuvent de façon significative contribuer dans l'intégration (intelligente et valorisante) des Haïtiens qui vont s'établir dans les différents pays, dans la Caraïbe, entre les deux Amérique et comme partout ailleurs. Combien de jeunes talents haïtiens, notamment des anciens de l'École Sainte-Trinité, de l'École nationale des Arts (ENARTS), l'École professionnelle J.B. Damier,  entre autres, qui évoluent dans les différents temps religieux en République dominicaine, aux États-Unis, au Canada, au Mexique, sur la base de leurs talents artistiques, comme  chanteur, musicien, animateur, décorateur ?

Dans cette nouvelle dynamique de migration sociale et de mutation technologique, les dimensions artistiques et culturelles représentent toujours cette valeur ajoutée, cette dimension originale, cette portée esthétique, cette richesse créative, inépuisable et abondante que les Haïtiens devront revendre au reste du monde. Pour intégrer de nouveaux  espaces d'influence économiques,  physiques et virtuels, ou pour impressionner de nouveaux publics dans une perspective de représentation et de négociation entre l'art et l'argent, et non les armes et l'argent pour les jeunes, il faudra investir dans la valorisation des anciens et nouveaux métiers des arts, de la culture et du patrimoine. 

Démocratisons une fois pour toutes,  les métiers de la culture pendant qu'il est encore temps, en permettant au plus grand nombre de jeunes dans chaque ville, de disposer d'un ou de plusieurs certificats au minimum, dans les pratiques et métiers culturels de leurs choix. Tout en encourageant le perfectionnement des professionnels vers d'autres grades académiques d'excellence et dans la recherche, en dehors du diplôme de licence, de maîtrise, de doctorat entre autres, plus d'un reconnaîtra qu'un talent haïtien disposant en main d'un document sanctionnant ses compétences de façon formelle, tout en se perfectionnement de façon continue, pourra certainement mieux capable de convaincre son vis-à-vis, par sa  capacité à transformer ses passions artistiques et ses émotions en des métiers culturels, adaptés dans n'importe quel secteur d'activités économiques.  

Dans un mariage durable entre l'éducation et la culture, au bénéfice du développement  économique et social en Haïti, les collectivités territoriales allaient pouvoir non seulement donner naissance à un premier inventaire des ressources et compétences culturelles du pays,  en termes de capital humain, ce sont parallèlement  les principales activités récréatives et les manifestations culturelles locales et nationales qui seraient accouplées dans une nouvelle dynamique de développement durable. En route vers la découverte du premier répertoire des métiers du Carnaval en Haïti, un passage obligé pour développer et moderniser la plus grande manifestation artistique, culturelle et nationale en Haïti. Vers le premier salon de la formation et des métiers de la culture en Haïti. Une innovation sociale à encourager, un rapprochement intelligent entre l'information et l'éducation, les arts et la culture plus que nécessaire. 

 

Dominique Domerçant  

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