Quel matériel humain ?

L’objectif de tout parti politique est la prise du pouvoir. Mais cette prise de pouvoir est toujours liée à une manière de comprendre les faits sociaux, culturels, scientifiques et surtout économiques. Le pouvoir est un moyen d’intervenir dans le réel pour mettre une nation sur la voie d’un progrès continu, ou dans le cas des conservateurs les plus extrémistes pour maintenir la société dans une sorte d’état immuable comme l’aurait voulu leur Dieu ou les ancêtres, dans la défense d’une utopique pureté raciale par exemple.

Il arrive aussi que la prise du pouvoir soit une fin en soi. C’est le cas souvent en Haïti pour la plupart de nos dits partis politiques, des groupements politiques qui se mettent à foisonner dès que les élections approchent. La comédie consiste alors à concocter rapidement un projet de société qu’on livrera en pâture à une presse et une population trop complaisante. Projet de société qu’on s’empressera d’oublier même si on prétextera les réalités objectives de la pratique du pouvoir pour expliquer que ce projet soit aussi vite passé à la trappe.

La faune de nos partis politiques ou de nos groupements politiques est souvent hallucinante avec ces hommes et ces femmes qui font semblant de jouer le jeu démocratique - parfois ils ne le jouent pas du tout - mais qui ne font qu’espérer que le parti pour lequel ils militent se retrouve au pouvoir. Alors, on pourra bénéficier à la faveur d’un partage de pouvoir, de postes bien rémunérés dans l’administration publique. On a vu des cas où des groupes politiques se sont tout simplement évaporés suite à une juteuse distribution de postes, un découpage du gâteau. Les militants de ces partis peuvent même s’entredévorer pour obtenir des miettes qui leur permettront de survivre dans cette précarité. Les gouvernements en place, connaissant très bien cette réalité, jouent souvent sur ce tableau pour faire échec à des mobilisations qui elles aussi sont souvent des moyens pour des militants de se mettre plein les poches, car nos grands brasseurs sont toujours à l’affut du chaos politique pour faire des affaires dans l’ombre.

Notre matériel humain est déplorable. Il faut le reconnaître pour tenter d’y remédier. Notre grande précarité ne facilite pas la tâche. La presse devait s’investir dans une sorte de grande campagne d’éducation civique pour faire comprendre aux citoyens qu’on ne peut continuer dans ces pratiques de corruption qui ne font que nous enfoncer dans notre bourbier. C’est vrai que nous sommes assiégés par les gangs, mais d’une certaine manière, à tous les niveaux, nous avons aussi des comportements de gangsters, ce qui est plus dangereux, car même après avoir éliminé ces gangs, nous resterons dans ces espaces glauques, troubles, construits avec une conception dévoyée du pouvoir qui ignore l’Humain et son environnement physique pour ne prendre en compte que les instincts bestiaux de l’individu. Il est temps qu’on recherche dans notre société ceux qui travaillent, ceux qui pensent, ceux qui ont réussi avec leur talent et leur effort et qu’on cesse de donner en exemple les brasseurs, les dealers, les vendeurs du temple. C’est seulement ainsi qu’on commencera à espérer des jours meilleurs.

 

Gary Victor

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