La presse haïtienne !

Derrière la promotion des droits humains, et en particulier des droits spécifiques à liberté de la presse en Haïti, incluant la protection des vies, des matériels, institutions et des activités qui participent dans le fonctionnement des médias, et la valorisation des métiers de la presse, dans le respect des normes professionnelles, ces nombreux défis et enjeux ne pourront en aucun cas limiter des débats et des questionnements autour de la place du patrimoine et de la mémoire dans la presse en Haïti.

 

Découvrir l’histoire des médias et l’évolution de la presse en Haïti devrait être une nouvelle thématique à la fois institutionnelle, organisationnelle, universitaire et scientifique à ajouter dans les débats sur la presse dans le pays. À défaut de parler des victimes, il y a la mémoire du vécu d’un grand nombre d’acteurs qui s’en vont préserver et protéger pour les générations futures.  Il n’existe pratiquement aucun endroit en Haïti, aucun monument, aucun espace de mémoire, aucun centre de documentation, d’interprétation et de représentation pour raconter l’histoire de la presse haïtienne aux plus jeunes.

 

Dans deux ans, le monde va franchir le premier quart de siècle de ce nouveau millénaire. La République d’Haïti, comme beaucoup d’autres pays à travers le monde, et surtout dans sa position géographique et sa configuration sociologique et géopolitique spécifique, a connu tellement d’événements majeurs parmi les imprévisibles, influents et inédits, tels les mouvements sociaux de 2004 et de 2018, les séismes de 2010 et de 2021, l’épidémie de 2010 et la pandémie de 2020.

 

Des crises socioéconomiques et institutionnelles, et des catastrophes humaines et naturelles qui allaient impacter sur le fonctionnement de la société haïtienne dans tous ses compartiments, en particulier le secteur de la presse.

 

D’ici 2030, presque toute la génération des journalistes des années fin 70, 80, 90 et début 2000, sera renouvelée. Quels seront les rares médias créés entre 1986 et 1990 qui vont continuer à fonctionner ? Il suffit de compter les rares stations de télévision qui fonctionnent en Haïti en 2023 pour se questionner sur la mémoire de tous les opérateurs, absents, oubliés, reconvertis et qui ne reviendront jamais sur les ondes.

 

De nombreux médias, malgré la somme des investissements consentis, les ressources humaines mobilisées, les tentatives d’offrir une programmation et d’encourager la production locale, n’ont pas pu fonctionner régulièrement après trois ans, cinq ans et dix ans dans la République de Port-au-Prince, les principaux chefs-lieux de départements, d’autres villes et au niveau des communautés. Ou retrouver la mémoire et la nomenclature des différents médias et les principaux noms des journalistes haïtiens et ceux de la diaspora, avant, pendant et après 1986 ? Que sont devenus les équipements, les infrastructures et la production littéraire, audiovisuelle et thématique de la presse haïtienne ?

 

Dans la presse haïtienne, un secteur témoin et très dynamique qui vient en appui aux acteurs de la gouvernance et apporte des contributions significatives de premier ordre aux historiens et à la science, il existe une somme importante d’informations présentées sous plusieurs formes, de productions, de publications, de créations, d’éducation, et d’animations, entre autres, ne disposant pas toujours des meilleures politiques et pratiques pour une conservation responsable et scientifique. Le cas des archives de Radio Haïti Inter pourrait bien confirmer l’importance de la conservation et de la valorisation des archives et des collections autour de la presse haïtienne.

 

Dans le cadre de la célébration de traditionnelle Journée mondiale de la liberté de la presse, ce 3 mai, commémorée à moins de quinze jours de la journée internationale des musées le 18 mai, il nous faut inscrire dans l’agenda des débats dans les médias la notion de la mémoire, en cette année du patrimoine en Haïti. Une belle occasion pour les acteurs de la presse haïtienne de mieux s’informer autour des institutions de conservation, pour un meilleur rapprochement intelligent et durable pour la protection, la sauvegarde et la valorisation du patrimoine (humain, matériel et documentaire) des médias et de la presse en Haïti.

Dominique Domerçant  

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