Le socle des vauriens

On parle partout de rupture.

Ne nous trompons pas. Il y a longtemps, très longtemps qu’on parle de rupture.

On fait rugir le feu, on organise des manifestations, on renverse des gouvernements, au nom de la rupture.

On embrasse même la Vierge au nom de cette même rupture après la réussite d’une manifestation.

 

Mais, au final, on se retrouve Gros-Jean comme devant. D’autres voyous, souvent pires, se hissent aux commandes et la même comédie continue. Comme si le pays avait un réservoir inépuisable de gredins et de vermines.

 

D’un autre côté aussi, on reste fidèle à des discours, des analyses qui facilitent la tâche des vauriens. Car, pour vraiment changer les choses, encore faut-il comprendre la société, les êtres et les choses qui composent la communauté, comprendre comment pensent et agissent ces âmes aux prises aux misères de notre quotidien.

On a une pléthore de citoyens qui ont été certifiés détenteurs de connaissances pour leur permettre de se lancer à l’étude de nos comportements, mais des études, des travaux sur le sujet, il y en a peu. Trop peu. Pour ne pas dire pas grand-chose. Les rares esprits qui ont tenté d’étudier nos us et nos coutumes ont souvent été méprisés alors que tous travaux dans ce domaine auraient dû servir d’avancée dans le territoire brumeux pour ne pas dire obscure de l’âme haïtienne.

 

Pourquoi par exemple ce refus de la compétition et de la compétence ? Pourquoi le refus de mettre à la disposition de l’autre les moyens de se surpasser et donc logiquement de surpasser les autres et de devenir un modèle ? C’est totalement risible de voir comment chez nous on s’approprie de la réussite de jeunes haïtiens à l’étranger alors que notre pays, notre communauté n’a absolument rien à voir avec cette performance. Au contraire ce même talent, on aurait tout fait ici pour le décourager. Il n’y a rien pour encourager, encadrer, appuyer, le moindre talent. Il suffit que le moindre citoyen dans son quartier, dans son petit commerce fasse une innovation, réussit quelque chose qui le distingue de l’autre, immédiatement il est en danger de mort. Tous les Haïtiens sont au courant de ces comportements, mais refusent souvent d’en discuter pour essayer de changer ces absurdités. Au lieu de glorifier un talent, de donner en exemple l’effort et le travail, nous disons : « Se pa maji se don. » Un sociologue avait parlé avec raison d’une quête dévoyée de l’égalité. Mais on n’est jamais allé plus loin. Car à la culture haïtienne, on n’y touche pas. Interdis de lui donner quelques bons coups de balai même si elle nous enferme sous la tonèl !

On a dépensé des millions dans de stupides campagnes d’éducation civique qui pour la plupart ont lamentablement raté leurs objectifs. En avaient-ils vraiment ? Au vu de ce qui se passe actuellement du haut au bas de notre échelle sociale, il est vraiment temps de se mettre à la tâche pour fissurer le socle des vauriens sans avoir peur de vider quelques tabous dans la boite aux ordures.

 

Gary Victor

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