Wesly Félix, connu sous le nom de Kid Ali, figure de panache et d’excentricité sur les rings nationaux des années 1970-80, incarne une époque où la boxe était une école de labeur, de rigueur pour les boxeurs, et de passion pour nous, Haïtiens.
S’agissant de Kid Ali, les annales retiennent une défaite amère par KO à Port-au-Prince le 26 avril 1983 face au Trinidadien Fitzroy Guisseppi — après un nul l’année précédente — des épisodes qui n’enlèvent rien à l’aura de l’« ancien champion haïtien » célébré par la presse nationale, jusqu’à l’hommage émouvant publié à son décès en décembre 2015.
Si je me hasarde à parler de notre Kid Ali aujourd’hui, c’est pour l’affirmer sans demi-mesure : la boxe peut — et doit — être un exutoire à l’énergie de la jeunesse, mais jamais un alibi pour l’illégalité.
Ce n’est que lorsque l’État rétablit l’ordre public et sécurise des salles accessibles et des rings communautaires que cet exutoire peut devenir un escalier vers le professionnalisme — entraîneurs licenciés, cartes de combats homologuées, bourses rémunérées, événements assurés et recettes imposables.
D’abord des espaces sûrs et encadrés ; ensuite la filière professionnelle.
Construisons des oasis (parcs sécurisés, gymnases scolaires, salles municipales), certifions clubs et arbitres, et nous canaliserons la rage en maîtrise, la maîtrise en carrières, et les carrières en recettes publiques.
La politique de sécurité demeure le socle non négociable ; la boxe est le moteur que nous y greffons.
La boxe offre des atouts décisifs pour canaliser l’énergie des jeunes et la détourner de trajectoires violentes :
• Agressivité canalisée, discipline, rituel: un cadre d’entraînement, des règles et une éthique.
• Ambition et responsabilité: des objectifs mesurables (combats, catégories de poids, titres) qui structurent l’effort.
• Lien social et mentorat: entraîneurs, pairs, clubs et galas nourrissent l’appartenance et la fierté locale.
• Voie vers le professionnalisme: une échelle structurée de l’amateur au pro — tournois régionaux, classements nationaux, délivrance de licences et officiels certifiés — afin que les jeunes talentueux passent à des combats rémunérés sous l’égide d’instances reconnues.
• Effet de levier économique et visibilité: accès aux parrainages, bourses, indemnités et bourses de combat ; revenus issus de la billetterie, du streaming et du merchandising ; exposition auprès des recruteurs et promoteurs — créant des carrières durables au pays et sur des circuits accrédités à l’étranger.
Le Nouvelliste nous l’a rappelé : Haïti bâtira une « culture boxe » durable en consolidant ses infrastructures et son encadrement.
Dans cet esprit, les initiatives fédérales et ministérielles comptent — non seulement pour favoriser la cohésion, mais aussi pour ouvrir un canal vers une boxe professionnelle rémunératrice.
Avec les caravanes de la Fédération haïtienne de boxe amateure (FHBA), les soirées de gala au Karibe et les programmes Jeunesse et Sports du Ministère de la Jeunesse, des Sports et du Civisme (MJSAC), de jeunes athlètes peuvent accéder à des combats rémunérés, des licences et des événements qui génèrent des taxes, du tourisme et des emplois formels et informels — de nouvelles recettes pour les pratiquants, l’État et le pays.
Frédéric Aupont
Président Commission Haitienne de Boxe (COHABO)
_N.B. Texte original en anglais traduit en français par la Rédaction de Le National. _