Croire ou ne pas croire ?

Il est bien vrai que la question de Shakespeare serait plus appropriée dans ce contexte de flou, de confusion sociopolitique inédite en Haïti. Car le « To be or not to be » du prince Hamlet est une problématique du doute entre mourir et vivre, un tiraillement face aux devoirs, une envie de suicide face à l’hypocrisie et l’indifférence de la société.

Mais le devoir, c’est le devoir. Il faut l’accomplir. Il faut y croire. Il faut s’y soumettre, quel qu’en soit le prix. Il s’agit d’un impératif catégorique pour citer Emmanuel Kant dans « Ses fondements de la métaphysique des mœurs ». Même s’il est contesté par Benjamin Constant avec «Le droit de mentir », il est de principe que le citoyen accomplisse son devoir vis-à-vis de la société et de ses concitoyens.

Au-delà des stratagèmes, le bon sens, qui est, selon l’auteur du Discours de la méthode, la chose du monde la mieux partagée, a voulu qu’un Conseil présidentiel, dans le contexte de la crise haïtienne actuelle, soit la solution la moins sujette à caution.  Mais aujourd’hui, une question s’impose : croire ou ne plus croire ?

La tergiversation des secteurs politiques sème le doute. Un pas en avant en entraine deux en arrière alors que l’insécurité, cette machine infernale, cause d’une misère noire, d’une infortune inimaginable, continue de happer les vies, l’espoir et l’avenir.

Dans ce Conseil présidentiel et quoi qu’on en dise, il y a les ressources humaines et intellectuelles qui devraient pouvoir permettre de désamorcer cette bombe à sous-munitions qui désagrège l’espérance haïtienne. Mais il y a une théorie dans l’armée qui s’appelle « La cohésion d’unité ». Cette théorie distingue deux formes de cohésion : celle de fonction dite aussi tactique et celle sociale. La cohésion de fonction est un engagement commun, partagé, qui vise à atteindre un objectif.

La cohésion sociale quant à elle, porte sur la qualité des relations entre les membres de l’équipe. Néanmoins, cette théorie d’unité ne fonctionne que lorsque l’équilibre entre ces deux formes de cohésion est maintenu. Ainsi, lorsque des membres du groupe ne sont plus en harmonie, l’atteinte des objectifs est alors compromise. Cette théorie vaut pour tous les groupes appelés à accomplir des tâches d’importance.

Les dérives et les prises de position contradictoire au sein du Conseil présidentiel et des secteurs qui y sont représentés envoient des signaux d’incohérence, d’irresponsabilité et de politicaillerie. Et cela donne lieu à toutes les formes de supputation et de récrimination parfois légitimes.

 

Croire ou ne pas croire ?

C’est un pays en lambeaux, une population désespérée, dépourvue de tout, qui appellent au secours. Je ne crois pas qu’il faille encore attendre pour faire ce qui doit être fait. Je ne crois pas qu’il soit encore le temps des chamailleries, de la défense des petits intérêts de chapelle. Je ne crois pas non plus qu’il faille continuer à donner le flan aux luttes intestines et aux querelles de clan.

À ce propos, la messe est dite, et les dés sont jetés pour ce round de boxe. Il faut refuser de croire que ce Conseil présidentiel soit lui-même porteur des germes de sa propre désagrégation.

Il est urgent de chercher la percée de lumière même lorsqu’on ne la voit pas pour la porter à l’existence, l’agrandir et l’étendre sur tout un chacun pour en arriver à cette Haïti qui souffre trop de renaître. 

 

Jackson Joseph

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