Un premier numéro d'anthologie pour la revue Oyapock

À travers un premier numéro d'anthologie, la revue Oyapock de Guyane offre aux lecteurs et amants de la poésie le loisir de découvrir un espace de signifiance et de réalisme en résonance aux grands enjeux du monde contemporain caribéen–amazonien. Elle réunit des plumes comme celle d'Émile Boutelier, de Nitza Cavalier, de Jonas Charlecin, de Sandie Colas, de Alexandra Cretté, de James-Son Derisier, de Rossiny Dorvil, de Daniel Pujol, de JJJJ Rolph et de Widjmy St-Vil. Elle rassemble également les auteurs invités: Mélissa Béralus et Luis Bernard Henry.

À eux douze, ils rejoignent leurs voix pour crier leur verbe dans un nulle part que conditionne l'expérience explique. « Le langage est notre maison ouverte à tous. », disent-ils dans le manifeste de leur œuvre. Ceci étant, leur verbe s'offre en partage à l'Autre. C'est un précieux travail sur la langue qui ne se résume pas à leur personne. Il se donne.

Dès la lecture des premières pages, on se sent happé par un enchevêtrement entre les dimensions des vécus des poètes, du réel et de l'immensité de l'imaginaire caribéen. S'inscrivant dans une tout autre dynamique littéraire, cette anthologie rend donc témoignage à un nouvel espoir, qui est en train de naître de l'urgence de dire l'être caribéen avec des voix qui ont vécu ses pleurs, ses folies, dols et détours. Comme l'exige Jean Giono dans L'eau vive, « le poète doit être un professeur d'espérance. » Mais comment dire l'espoir avec les mots de l'indicible ? Comment dire la chute ?

Intéressés aux thèmes en résonance aux réalités de la migration, aux violences politiques et sociales, à la relation entre l'homme et la nature et à la place de la spiritualité, certains de ces poètes aux langues fumigènes sont parvenus à ériger la poésie en exutoire où décrire l'échancrure de leurs âmes. C'est le cas de Sandie Colas, dans le poème Nuit déchirante et dont le lyrisme poignant prévoit le danger à chaque effort d'exister : « Si je traverse la rue je me ferai sûrement/trucider/tuer déchiqueter… » D'autres comme Rossiny Dorvil dans Plante Carnivore,  dans un point de vue vers le bas, s'insèrent plutôt dans une esthétique qui dit la déchirure des limbes de la ville et ses problèmes sociaux en rapport à la migration : « Les sans-papiers/s’effacent de cette rue/De cette place/De cette ville/de la haine/Elle pleure, la ville/De hontes/De folies » D'autres encore, comme JJJJ Rolph dans Pourvu que tu partes, disent l'exil à travers les sentiments d'absence et de nostalgie que ça inculque à leur personne ou le souvenir d'une enfance qui ne reviendra plus : « Fini le temps où nous rêvions d’oiseau mouche/Sucions des grains de sel pour duper les/parents/Il a fallu que tu partes avec un grand soleil/autour du cou/Et je me dis:/Dans quelle langue chantions-nous les fleuves de/l’enfance? ...»

Les douze voix de ce premier numéro d'anthologie qui parlent au nom de la revue Oyapock, ne sont pas tous de Guyane. Ce sont pour la plupart des moun vini, des parachutés qui nous viennent d'un non-lieu où le verbe peut cautériser les plaies infligées à l'Autre et leur insuffler une part d'espérance. La vente signature de l'anthologie de la revue Oyapock est programmée pour le 15 décembre dans la ville de Cayenne à Zoukouyanyan (la maison du conte). Le 16 décembre à Remire Montjoly (la librairie Casa Bulles). Elle arrivera sur Port-au-Prince dès le 23 novembre.

 

Williamson Ornéus

williamsonorneus@gmail.com

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